Incursion sur piste et risque de collision
Véhicules de remorquage d’aéronefs ATSTOW504 +1 exploités par Airport Terminal Services
et
Jazz Aviation LP De Havilland Aircraft of Canada Limited DHC-8-402, C-GGNZ
Aéroport international de Calgary (CYYC) (Alberta)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu. Les pronoms et les titres de poste masculins peuvent être utilisés pour désigner tous les genres afin de respecter la Loi sur le Bureau canadien d’enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports (L.C. 1989, ch. 3).
Résumé
Peu avant 11 h, heure avancée des Rocheuses, le 6 octobre 2023, 2 véhicules de remorquage d’aéronefs (remorqueurs) (indicatif d’appel ATSTOW504 +1) exploités par Airport Terminal Services à l’aéroport international de Calgary (CYYC) (Alberta) prévoyaient de se rendre de l’aire de trafic 1 au côté sud de l’aéroport pour repositionner un aéronef stationné sur la piste 26. Le contrôleur sol a donné au conducteur du remorqueur de tête l’instruction de se diriger vers le sud en empruntant les voies de circulation C, C1 et Y et d’attendre à l’écart de la piste 26. Peu après, cette instruction a été remplacée par l’instruction d’emprunter la voie de circulation C2 pour céder le passage à un aéronef qui circulait au sol vers le nord, dans la direction opposée, sur la voie de circulation C. Cette communication comprenait l’instruction d’attendre à l’écart de la piste 17R, instruction que le conducteur de tête a relue.
Une fois que l’aéronef qui circulait au sol était passé, le contrôleur sol a donné l’instruction au conducteur du remorqueur de tête de poursuivre sa route sur la voie de circulation C et d’attendre à l’écart de la piste 26. Le conducteur de tête a relu l’instruction, et, à 11 h 04, les 2 véhicules se sont engagés sur la piste 17R. À ce moment-là, un autre aéronef, un De Havilland Aircraft of Canada Limited DHC-8-402 exploité par Jazz Aviation LP, qui effectuait le vol JZA7124, entamait sa course au décollage sur la piste 17R. L’équipage de conduite de l’aéronef a aperçu les 2 remorqueurs alors que l’aéronef s’approchait de la vitesse de décision (V1), mais il a décidé de poursuivre le décollage. Lorsque l’aéronef a pris son envol, il se trouvait à une distance latérale d’environ 3700 pieds des remorqueurs. Il est ensuite passé au-dessus des remorqueurs et a franchi les 350 pieds au-dessus du sol alors que les remorqueurs sortaient de la piste à la voie de circulation U.
1.0 Renseignements de base
1.1 Déroulement de l’événement
Le matin du 6 octobre 2023, les pistes en serviceUne piste en service est « [t]oute piste utilisée à un moment donné pour les décollages ou les atterrissages. Lorsque plusieurs pistes sont utilisées, elles sont toutes considérées comme étant en service. » (Source : NAV CANADA, Manuel des services de la circulation aérienne – Service consultatif de vol – Station d’information de vol [en vigueur le 1er avril 2024], Glossaire ATS 1.7, p. 284.) à l’aéroport international de Calgary (CYYC) (Alberta) étaient les pistes 17L et 17R. À 10 h 30Les heures sont exprimées en heure avancée des Rocheuses (temps universel coordonné moins 6 heures)., après la période de pointe des départs d’aéronefs de la matinée, le nombre de postes de contrôleur de la circulation aérienne dans la tour de contrôle de Calgary a été réduit aux 3 postes suivants :
- tour est/ouest combiné;
- sol ouest;
- sol est, contrôle de l’aire de trafic et délivrance d’autorisations combiné.
De plus, on a décidé à ce moment-là d’arrêter le système avancé de guidage et de contrôle de la circulation de surface (A‑SMGCS)Voir la section 1.18.1.1 Système avancé de guidage et de contrôle de la circulation de surface du présent rapport pour obtenir une description de l’A-SMGCS. pour pouvoir faire une mise à jour logicielle planifiée. La durée de l’arrêt avait été estimée à 30 minutes. Les contrôleurs ne pouvaient donc pas utiliser le système pour surveiller les mouvements au sol ou activer les barres d’arrêt virtuelles pour aider à atténuer les conséquences d’une incursion sur piste. Les 3 contrôleurs devaient se fier uniquement à un balayage visuel des zones dont ils étaient responsables. Pour pallier cette perte d’équipement de surveillance, l’unité de contrôle de la circulation aérienne (ATC) a adopté un processus de mouvements simplifiés appelé Segregated PlusSegregated Plus est un processus mis en place par l’unité de la tour de CYYC pour pallier une perte d’équipement de surveillance des mouvements de surface. Il consiste à modifier le mode d’exploitation de l’aéroport de la façon suivante : atterrissages uniquement sur la piste 17L, avec un espacement de 3 milles marins (NM) entre les aéronefs; et décollages et atterrissages sur la piste 17R, mais avec un espacement de 12 NM pour laisser plus de temps entre les mouvements des aéronefs.. En organisant les pistes à des fins distinctes – la piste 17L pour les atterrissages uniquement et la piste 17R pour les décollages et les atterrissages, avec des espacements accrus – les contrôleurs disposaient de plus de temps pour confirmer visuellement les mouvements sur la surface de l’aéroport. On considérait à ce moment que le volume du trafic était modéré et que le niveau de complexité des opérations était moyen en raison de l’indisponibilité de l’A-SMGCS. À 10 h 59, les conducteurs de 2 véhicules de remorquage d’aéronefs (remorqueurs), exploités par Airport Terminal Services (ATS), ont appelé le contrôleur sol pour lui demander des instructions sur la façon de se rendre de l’aire de trafic principale, soit l’aire de trafic 1, où ils se trouvaient, à l’extrémité sud de l’aéroport afin de déplacer un aéronef stationné sur la piste 26, qui était fermée, jusqu’à l’aire de trafic 5. En résumé, le contrôleur sol a donné l’instruction au conducteur du remorqueur de tête d’aller en direction sud sur les voies de circulation C, C1 et Y et d’attendre à l’écart de la piste 26.
![Figure 1. Trajectoire des remorqueurs (ligne continue magenta avec flèches directionnelles) à l’aéroport international de Calgary (Source : NAV CANADA, Canada Air Pilot [CAP], CAP 3 : Alberta, Saskatchewan, and Manitoba, en vigueur du 11 juillet 2024 au 5 septembre 2024, avec annotations du BST) Figure 1. Trajectoire des remorqueurs (ligne continue magenta avec flèches directionnelles) à l’aéroport international de Calgary (Source : NAV CANADA, Canada Air Pilot [CAP], CAP 3 : Alberta, Saskatchewan, and Manitoba, en vigueur du 11 juillet 2024 au 5 septembre 2024, avec annotations du BST)](/sites/default/files/2025-07/A23W0122-figure-01-FRA_0.jpg)
Un aéronef qui venait d’atterrir, le De Havilland Aircraft of Canada Limited DHC-8-402 exploité par Jazz Aviation LP, qui effectuait le vol JZA133, était sorti de la piste 17R sur la voie de circulation C3 et se dirigeait vers le nord sur la voie de circulation C. En raison de travaux de peinture des lignes sur la voie de circulation U entre la voie de circulation C et la piste 29, la voie de circulation Y était inaccessible aux aéronefs. Par conséquent, à 11 h 01 min 45 s, le contrôleur sol a donné aux 2 remorqueurs se dirigeant vers le sud l’instruction de céder le passage à l’aéronef en s’engageant sur la voie de circulation C2 et d’attendre à l’écart de la piste 17R, tout en restant à l’écart de la voie de circulation C (figure 1). Le conducteur du remorqueur de tête a demandé des précisions au contrôleur sol, que le conducteur a reçues puis relues correctement.
À 11 h 02 min 25 s, un autre aéronef, le De Havilland Aircraft of Canada Limited DHC-8-402 exploité par Jazz Aviation LP, qui effectuait le vol JZA7124 et se préparait à décoller, a reçu l’instruction de circuler au sol à partir de l’aire de trafic 1 et d’attendre à l’écart de la piste 17R. Pendant ce temps, les conducteurs des remorqueurs se sont engagés sur la voie de circulation C2 pour céder le passage à l’aéronef effectuant le vol JZA133, qui se dirigeait vers le nord sur la voie de circulation C.
À 11 h 03 min 00 s, les 2 remorqueurs se trouvaient sur la voie de circulation C2 et s’étaient arrêtés sur l’axe longitudinal, tout juste avant la marque de point d’attente avant la piste 17R. Pour le conducteur du remorqueur de tête, il s’agissait d’une position d’arrêt typique lorsqu’on lui demandait d’attendre à l’écart d’une piste. En effet, lorsqu’un conducteur reçoit l’instruction d’attendre à l’écart d’une piste, l’instruction suivante de l’ATC est normalement de traverser la marque de point d’attente avant piste et de s’engager sur la piste plutôt que de faire demi-tour. Une fois que l’aéronef effectuant le vol JZA133 est passé au nord de la voie de circulation C2 sur la voie de circulation C, les conducteurs des remorqueurs ont reçu, du contrôleur sol, à 11 h 03 min 47 s, l’instruction d’emprunter la voie de circulation C et d’attendre à l’écart de la piste 26, instruction que le conducteur du remorqueur de tête a relue. À peu près à ce moment-là, l’aéronef au départ, qui attendait à l’écart de la piste 17R, a reçu, du contrôleur tour, l’instruction de s’aligner et d’attendre sur cette piste, puis a reçu l’autorisation de décoller à 11 h 04 min 00 s.
À ce moment-là, le remorqueur de tête était positionné près de la marque de point d’attente avant la piste 17R sur la voie de circulation C2. Le conducteur du véhicule de tête n’avait jamais fait demi-tour sur une voie de circulation auparavant et pensait qu’il s’agissait d’une procédure non autorisée. En l’absence d’instruction explicite de faire demi-tour dans la dernière communication du contrôleur sol, le conducteur de tête pensait également qu’il ne serait pas possible de faire demi-tour sur la voie de circulation C2 pour accéder à la voie de circulation C. En effet, il estimait que l’espace était insuffisant pour que les 2 véhicules puissent faire demi-tour, compte tenu du rayon de virage de chaque véhicule (figure 2).
Il n’a pas jugé possible de faire marche arrière, car cette manœuvre aurait nécessité que les 2 conducteurs sortent de leur véhicule, débranchent la barre de remorquage du 2e remorqueur, ce qui aurait pris du temps, et coordonnent les mouvements des remorqueurs. De plus, au cours de l’été, le conducteur du remorqueur de tête avait fait des détours similaires sur la piste 29 lors de travaux de construction sur celle-ci et à proximité. Par conséquent, à 11 h 04 min 04 s, les 2 remorqueurs ont franchi la marque de point d’attente avant piste et ont pénétré sur la piste 17R à partir de la voie de circulation C2, ce qui a entraîné une incursion sur piste. Le conducteur du remorqueur de tête a eu pour raisonnement que si la manœuvre était incorrecte, le contrôleur sol interviendrait et les arrêterait, lui et l’autre conducteur. Peu après, à 11 h 04 min 16 s, l’équipage de conduite de l’aéronef au départ a entamé sa course au décollage.
À 11 h 04 min 25 s, les remorqueurs se trouvaient sur la surface de la piste 17R, entraînant un risque de collision avec l’aéronef qui venait d’entamer sa course au décollage. Les véhicules ont continué à circuler sur la piste dans l’intention d’en sortir par la voie de circulation U.
À 11 h 04 min 30 s, le contrôleur sol, qui ne connaissait pas les intentions du conducteur du remorqueur de tête, a remarqué la présence des remorqueurs sur la piste 17R. À ce moment-là, le contrôleur sol contrôlait 4 autres aéronefs. Il a demandé au contrôleur tour d’interrompre le décollage de l’aéronef, et le contrôleur tour a donné l’ordre d’interruption à 11 h 04 min 36 s en utilisant une phraséologie non normaliséeLorsqu’une autorisation de décollage est annulée après que l’aéronef a entamé sa course au décollage, la phraséologie requise est « (id d’aéronef), ARRÊTEZ, ARRÊTEZ, (id d’aéronef), ARRÊTEZ, ARRÊTEZ [raison] ». (Source : NAV CANADA, Manuel des services de la circulation aérienne – Tour, version 2.9 (31 mars 2023), p. 140.) (voir la section 1.18.2.3, Phraséologie à utiliser dans les situations essentielles à la sécurité du présent rapport). L’équipage de conduite du vol JZA7124 ne se souvenait pas d’avoir entendu l’instruction d’interruption de décollage donnée par le contrôleur tour.
Quelques instants plus tard, l’équipage de conduite a aperçu les véhicules sur la piste. Il a poursuivi le décollage, étant donné que l’aéronef était proche de la vitesse de décision (V1) au décollage et qu’il considérait cette ligne de conduite comme la plus sécuritaire. À 11 h 04 min 39 s, en résumé, le contrôleur sol a donné aux remorqueurs l’instruction de sortir de la piste 17R par la voie de circulation U, de s’engager sur la voie de circulation C et d’attendre à l’écart de la piste 26. Le conducteur du remorqueur de tête a relu les instructions.
À 11 h 04 min 43 s, l’aéronef au départ traversait la piste 29 et avait accéléré au-delà de la V1. À une distance latérale approximative de 3700 pieds des remorqueurs, l’aéronef a pris son envol. À 11 h 04 min 53 s, alors que les véhicules sortaient de la piste 17R par la voie de circulation U, l’aéronef les a survolés à une hauteur d’environ 350 pieds, et l’équipage de conduite a poursuivi le vol sans autre incident.
1.2 Personnes blessées
Il n’y a eu aucun blessé.
1.3 Dommages à l’aéronef et aux remorqueurs
Il n’y a pas eu de dommages.
1.4 Autres dommages
Il n’y a pas eu d’autres dommages.
1.5 Renseignements sur le personnel
1.5.1 Conducteurs des remorqueurs
Le conducteur du remorqueur de tête travaillait pour ATS à CYYC depuis 2011 en tant qu’agent de piste et était titulaire d’un permis d’exploitation de véhicules côté piste (AVOP) de type DAUn AVOP de type DA permet à un conducteur de conduire des véhicules sur les aires de trafic et les voies côté piste, et de remorquer des aéronefs sur les aires de trafic. Selon les AVOP Airside Traffic Directives pour CYYC, [traduction] « les détenteurs d’un AVOP de type DA peuvent circuler sur les aires de trafic I, III, IV, V, VI VII, VIII, IX et sur les routes périphériques autour du seuil de la piste 17R et de la piste 11 dans un véhicule qui n’est pas équipé d’une radio aéronautique. » (Source : Calgary Airport Authority, AVOP Airside Traffic Directives [révisées en septembre 2022], section 5.2 : DA AVOP All Aprons, p. 58.) spécifique à la zone pour les opérations sur l’aire de trafic 1. La date d’expiration de son AVOP de type DA en vigueur à ce moment-là était le 1er décembre 2025. Au moment de l’événement, son permis avait presque 3 ans révolus sur une période de validité de 5 ans. Le conducteur était également titulaire d’un AVOP de type D-Tow (remorquage) DDTUn AVOP de type D-Tow (remorquage) comprend l’AVOP de type DA, mais il permet aussi à un conducteur de remorquer des aéronefs sur certaines voies de circulation et pistes, aux termes de l’accord conclu entre la compagnie de remorquage et l’administration aéroportuaire. Les 3 AVOP de type D-Tow (remorquage) sont le DTN, DTS et DDT. L’AVOP de type D-Tow (remorquage) DDT permet à son détenteur de conduire un véhicule sans escorte sur les pistes et voies de circulation contrôlées, contrairement aux 2 autres AVOP de type D-Tow (remorquage), qui n’autorisent les conducteurs à remorquer des aéronefs que sur des voies de circulation et pistes précises. (Source : Ibid., sections 6.1 et 6.4, p. 72 et 75) l’autorisant à effectuer des opérations de remorquage sur des aires de trafic, des voies de circulation et des pistes précises sous le contrôle direct de l’ATC, et qui accordait l’autorisation de conduire sur les pistes et voies de circulation contrôléesIbid., section 6.4 : D-Tow AVOPs, p. 75.. L’AVOP de type D-Tow (remorquage) DDT exige un certificat restreint d’opérateur radio (compétence aéronautique) (CRO-A), que le conducteur du remorqueur de tête détenait.
Le conducteur du 2e remorqueur travaillait pour ATS à CYYC en tant qu’agent de piste depuis 2 ans et possédait un AVOP de type DA, dont la date d’expiration était le 24 janvier 2027. Ce conducteur n’avait ni la formation ni l’autorisation nécessaire pour circuler dans les zones contrôlées de l’aéroport, et il était donc tenu de suivre le remorqueur de tête en tout temps. Bien que le 2e remorqueur était équipé d’une radio, son conducteur n’a pas communiqué directement avec l’ATC.
1.5.2 Contrôleurs de la circulation aérienne
Contrôleur sol ouest | Contrôleur tour est/ouest combiné | |
---|---|---|
Licence | Contrôleur de la circulation aérienne | Contrôleur de la circulation aérienne |
Date d’expiration du certificat médical | 1er décembre 2023 | 1er septembre 2025 |
Expérience des services de la circulation aérienne | 9 ans | 19 ans |
Expérience dans la présente unité | 3 ans | 15 ans |
Heures de service avant l’événement | 0,25 heure | 2,0 heures |
Heures hors service avant la période de travail | 15,75 heures | 10,25 heures |
Trois contrôleurs de la circulation aérienne se trouvaient dans la cabine de la tour au moment de l’événement. Les 3 contrôleurs en service détenaient la licence et les qualifications appropriées conformément à la réglementation en vigueur. Le contrôleur tour ouest/est combiné avait commencé son quart de travail à 9 h le 6 octobre 2023 et revenait tout juste de sa 1re pause au moment de l’événement. Le contrôleur sol ouest, qui était responsable du côté ouest de l’aéroport, avait commencé son quart de travail à 10 h 45 et en était à sa 1re affectation de la journée. Au moment de l’incursion sur piste, les 2 contrôleurs surveillaient activement les espaces extérieurs par les fenêtres de la tour, car l’A-SMGCS était inutilisable. Lors d’une formation de recyclage des contrôleurs suivie à l’hiver 2021, le contrôleur tour avait été informé du changement de phraséologie pour les événements d’interruption de décollage. À la suite de cette incursion, NAV CANADA n’a effectué aucun suivi auprès du contrôleur concernant la phraséologie utilisée lors de l’événement.
1.6 Renseignements sur l’aéronef et les remorqueurs
1.6.1 Renseignements sur l’aéronef
Sans objet.
1.6.2 Renseignements sur les remorqueurs
1.6.2.1 Douglas-Kalmar TBL-280 Tugmaster
Le remorqueur de tête était un tracteur de manutention d’aéronefs Douglas-Kalmar TBL-280 Tugmaster, sans barre de remorquage. Il est conçu principalement pour [traduction] « le refoulement, le remorquage entre portes et les opérations de remorquage de maintenance sur de plus longues distances et à des vitesses plus élevées pour des aéronefs dont la roue du train avant peut supporter jusqu’à 35 tonnesDouglas Equipment, spécification NS.1758, Douglas-Kalmar TBL-280 Tugmaster Towbarless Aircraft Handling Tractor, numéro 8, p. 2. ».
Ce remorqueur est capable de s’atteler à un aéronef et d’en soulever la roue du train avant pour les opérations de refoulement et de remorquage sans avoir besoin d’une barre de remorquage ou d’une 2e personneIbid.. Ce type de remorqueur n’était pas adapté à l’aéronef qui allait être remorqué, d’où la nécessité du 2e remorqueur.Le rayon de virage à partir des roues avant est de 39,5 pieds en mode 2 roues directrices et de 26,4 pieds en mode 4 roues directrices. Au moment de l’événement, le remorqueur était configuré en mode 2 roues directrices avant. Le remorqueur était équipé d’une radio VHF (très haute fréquence) et d’un transpondeur, qui était exigé par l’administration aéroportuaire de Calgary pour circuler sur les voies de circulation et les pistes.
1.6.2.2 Tracteur de remorquage d’aéronefs JBT AeroTech B250
Le 2e remorqueur était un tracteur de remorquage d’aéronefs JBT AeroTech B250 à 4 roues directrices. Il est capable de prendre en charge des aéronefs aussi gros que les familles d’aéronefs Airbus 320 et Boeing 737 et convenait donc à cette tâche.Il dispose également de points d’attache de barre de remorquage à l’avant et à l’arrière. Son rayon de virage est de 18,5 pieds en mode 2 roues directrices et de 13,3 pieds en mode 4 roues directrices. Ce remorqueur n’était pas équipé d’un transpondeur, mais était équipé d’une radio VHF. Il devait suivre un remorqueur équipé d’un transpondeur (le Douglas-Kalmar TBL-280) lorsqu’il circulait sur l’aire de mouvement de l’aéroport.
1.7 Renseignements météorologiques
Le message d’observation météorologique régulière d’aérodrome (METAR) émis à 11 h pour CYYC indiquait les conditions suivantes :
- vents soufflant du 220° vrai à 4 nœuds;
- visibilité de 40 milles terrestres;
- nuages épars à 25 000 pieds au-dessus du sol;
- température de 10 °C et point de rosée de −3 °C.
Les conditions météorologiques n’ont pas été considérées comme un facteur dans le présent événement.
1.8 Aides à la navigation
Sans objet.
1.9 Communications
Tout l’équipement de communication utilisé par les conducteurs des remorqueurs, les contrôleurs de la circulation aérienne et l’équipage de conduite dans cet événement fonctionnait normalement. Les radios de communication des 2 remorqueurs étaient opérationnelles.
1.10 Renseignements sur l’aérodrome
CYYC comprend 4 pistes (08/26, 11/29, 17R/35L et 17L/35R), de nombreuses voies de circulation et 10 aires de trafic. NAV CANADA est le fournisseur des services de contrôle de la circulation des aéronefs et des véhicules sur les aires de manœuvreL’aire de manœuvre est la « [p]artie d’un aérodrome, autre qu’une aire de trafic, destinée au décollage et à l’atterrissage des aéronefs ainsi qu’aux mouvements des aéronefs connexes au décollage et à l’atterrissage ». (Source : Transports Canada, DORS/96-433, Règlement de l’aviation canadien, article 101.01) de l’aéroport.
En 2023, CYYC s’est classé au 4e rang des aéroports les plus achalandés au Canada selon le nombre de passagers, accueillant environ 18,5 millions de passagers cette année-làYYC Calgary International Airport, « Key facts and figures », à l’adresse https://www.yyc.com/en-us/about-us/facts-figures (dernière consultation le 4 avril 2025)..
1.10.1 Marques et panneaux de la voie de circulation C2
La marque de point d’attente avant piste qui est utilisée sur la voie de circulation C2 est de configuration ATransports Canada, TP 312F, Aérodromes – Normes et pratiques recommandées, 5e édition (révisé le 15 janvier 2020), section 5.2.16 : Marques de point d’attente avant piste, figure 5-12 : Marques de point d’attente avant piste, page 104. et offre une marque axiale de voie de circulation améliorée jusqu’à elle. De plus, des panneaux d’identification de piste, ainsi que des feux de protection de piste hors-sol, se trouvent de chaque côté de la marque de point d’attente avant piste, là où la voie de circulation C2 rejoint la piste 17R. Un rectangle rouge, sur lequel la marque d’identification de la piste (numéro et lettre de la piste) est peinte en lettres blanches, au même endroit que la marque de point d’attente avant piste sur la voie de circulation menant à la piste (figure 3).
Les directives de circulation côté piste - AVOPAVOP Airside Traffic Directives de l’administration aéroportuaire de Calgary décrivent comme suit les marques de point d’attente avant piste [traduction] :
Les marques de point d’attente avant piste consistent en deux lignes continues et deux lignes discontinues, toutes de couleur jaune et peintes sur la largeur d’une voie de circulation, les lignes discontinues étant les plus proches de la piste pour indiquer le point d’attente avant piste. Les véhicules doivent S’ARRÊTER [majuscules dans la version originale] derrière les lignes continues, en laissant suffisamment d’espace pour faire demi-tour. Les véhicules et les aéronefs ne peuvent pas franchir les marques de point d’attente avant piste avant d’en avoir reçu l’autorisation du contrôleur sol de Calgary. (Certaines marques de point d’attente avant piste sont des lignes droites tandis que d’autres sont des lignes courbes.Calgary Airport Authority, AVOP Airside Traffic Directives (révisées en septembre 2022), section 4.9.3 : Runway Holding Position Markings, p. 49.)
1.11 Enregistreurs de bord
L’aéronef De Havilland Aircraft of Canada Limited DHC-8-400, qui décollait de la piste 17R au moment de l’incursion sur piste, était équipé d’un enregistreur numérique de données de vol et d’un enregistreur de conversations de poste de pilotage. Les données sur l’événement consignées par l’enregistreur de conversations de poste de pilotage ont été écrasées, et les données de l’enregistreur numérique de données de vol n’étaient pas nécessaires à l’enquête, étant donné que les renseignements sur la position des remorqueurs et de l’aéronef étaient disponibles.
1.12 Renseignements sur l’épave et sur l’impact
Sans objet.
1.13 Renseignements médicaux et pathologiques
Rien n’indique que des facteurs médicaux ou physiologiques, y compris la fatigue, ont nui à la performance des personnes concernées par l’événement à l’étude.
1.14 Incendie
Il n’y a eu aucun incendie.
1.15 Questions relatives à la survie des occupants
Sans objet.
1.16 Essais et recherche
1.16.1 Rapports de laboratoire du BST
Le BST a produit le rapport de laboratoire suivant dans le cadre de la présente enquête :
- LP148/2023 – ATS Radar and Audio Analysis [Analyse des données audio et du radar des ATS]
1.17 Renseignements sur les organismes et sur la gestion
1.17.1 Programme du permis d’exploitation de véhicules côté piste de l’administration aéroportuaire de Calgary
Le Règlement de l’aviation canadienTransports Canada, DORS/96-433, Règlement de l’aviation canadien, alinéa 302.07(1)g). oblige les exploitants d’aéroports à s’assurer que les fonctions dans les aires d’utilisation d’aéronefs ne sont attribuées qu’aux employés qui ont terminé avec succès une formation en matière de sécurité. Le programme d’AVOP de CYYC permet aux personnes qualifiées de conduire un véhicule sur le côté pisteCôté piste signifie « [a]ire de mouvement d’un aéroport, y compris la totalité ou une partie des terrains et bâtiments adjacents, dont l’accès est contrôlé ». (Source : NAV CANADA, base de données terminologiques Terminav) d’un aéroport, au-delà ou en dehors de toute zone louée.
Pour obtenir un AVOP, le demandeur doit :
- détenir un permis de conduire valide (au moins de la catégorie 5Dans la province de l’Alberta, un permis de conduire de catégorie 5 autorise la conduite de la plupart des voitures, camions ou fourgonnettes par un conducteur non accompagné. ou l’équivalent);
- détenir une carte d’identité de zone réglementée valide pour l’employeur (c’est-à-dire, la compagnie) précisé sur l’AVOP;
- réussir un test écrit et un test pratique;
- signer et présenter un formulaire de demande d’AVOP, qui est également signé par l’employeur du demandeur concerné (l’employeur qui demande l’autorisation doit être un gestionnaire de la compagnie possédant le pouvoir de signature pour les AVOP de la compagnie)Calgary Airport Authority, AVOP Airside Traffic Directives (révisées en septembre 2022), section 3.2 : Application for an Airside Vehicle Operator’s Permit (AVOP), p. 15..
La demande de renouvellement de l’AVOP est similaire à la demande initialeIbid., section 3.3.8 : Renewals, p. 18..
Les AVOP sont propres à chaque compagnie et, au moment de l’événement, toute la formation était effectuée par l’entremise d’ATS, les demandes et les résultats de test étant présentés au bureau de l’administration des AVOP de l’administration aéroportuaire de Calgary. Les tests pratiques pour l’AVOP de type DA étaient menés par ATS et ceux pour l’AVOP de type D-Tow (remorquage), par une tierce partie mandatée par l’administration aéroportuaire de Calgary.
L’enquête a permis de déterminer que les conducteurs des remorqueurs avaient suivi des modules de formation, conformément aux exigences de leur employeur, ATS, et de l’un de ses clients, WestJet Airlines Ltd. (WestJet). Ces modules couvraient l’équipement utilisé au cours des opérations sur l’aire de trafic. De plus, les agents de piste, y compris les conducteurs des remorqueurs, devaient satisfaire à d’autres exigences en cours d’emploi en travaillant avec des examinateurs de la compagnie cliente qui étaient des spécialistes du type d’aéronef que les agents de piste devaient déplacer. Cependant, aucune formation périodique n’a été dispensée concernant l’ensemble des connaissances nécessaires pour être titulaire d’un AVOP de type DA ou d’un AVOP de type D-Tow (remorquage) valide.
1.17.2 Airport Terminal Services
Dans l’événement à l’étude, le mouvement prévu était de déplacer un aéronef de WestJet. Au moment de l’événement, ATS avait conclu un contrat aux termes duquel elle était chargée de fournir les services nécessaires aux opérations au sol de WestJet à CYYC, y compris le déplacement et le remorquage des aéronefs sur toutes les aires de trafic, les voies de circulation et les pistes, ainsi que dans le hangar de WestJet.
Même si ATS ne disposait pas d’un système formel pour gérer la sécurité, elle se conformait aux systèmes de gestion de la sécurité (SGS) de ses clients. ATS avait signé un accord avec WestJet stipulant que si des événements devaient se produire pendant que les véhicules d’ATS remorquaient un aéronef de WestJet, ces événements seraient signalés au moyen du SGS de WestJet.
Les conducteurs des remorqueurs dans l’événement à l’étude n’étaient pas au courant de l’obligation de signaler les événements liés à la sécurité dans un système quelconque.
Peu après l’événement, le contrat conclu entre ATS et WestJet a pris fin comme prévu, et ATS a cessé de déplacer des aéronefs pour le compte de WestJet à CYYC.
1.17.2.1 Programme de formation d’Airport Terminal Services
La formation d’ATS visant l’obtention des AVOP de type DA et D-Tow (remorquage) comprend une formation sur ordinateur et une formation en cours d’emploi (FCE). Les programmes de formation sur ordinateur et de FCE sont coordonnés de manière à enseigner des techniques de communication et de remorquage efficaces. Un stagiaire accompagne un formateur dans un véhicule jusqu’à ce que les 2 estiment que le stagiaire est compétent. ATS fait passer un test pratique pour l’obtention de l’AVOP de type DA afin de certifier l’aptitude du stagiaire à remorquer des aéronefs, et une tierce partie fait passer un test pour l’AVOP de type D-Tow (remorquage). Si le stagiaire échoue, il doit suivre une autre FCE jusqu’à ce qu’il soit jugé prêt à repasser le test pratique, avec un maximum de 3 tentatives. Pour les opérations de jour, les détenteurs d’un AVOP de type DA et D-Tow (remorquage) ne reçoivent pas d’autre formation et ne sont soumis qu’au test écrit et au test pratique de renouvellement de permis tous les 5 ansAu moment de l’événement, les AVOP Airside Traffic Directives de l’administration aéroportuaire de Calgary étaient en révision. La nouvelle édition a été publiée le 1er novembre 2023. Dans l’édition révisée, la période de renouvellement d’un AVOP a été réduite, passant de 5 ans à 3 ans. pour assurer le maintien de leur compétence. Pour les opérations de nuit, une vérification obligatoire distincte des compétences doit être effectuée dans les 180 jours suivant le test pratique initial pour l’AVOP de type DA et l’AVOP de type D-Tow (remorquage).
Bien que le programme de formation d’ATS destiné aux conducteurs de véhicules au sol, y compris les conducteurs de remorqueurs, couvre les procédures de base relatives aux communications avec l’ATC, les conducteurs de véhicules au sol d’ATS reçoivent une formation minimale sur la gestion de leurs relations avec les contrôleurs sol, qui symbolisent l’autorité en matière d’opérations au sol, et sur la façon d’interagir avec eux lorsque des situations complexes ou inhabituelles se présentent.
Par exemple, dans le matériel de formation d’ATS, la seule référence directe à une situation problématique liée aux communications provenant de l’ATC figure en dernier point sur une seule diapositive dans l’une des ressources d’apprentissage en ligne d’ATS. Il y est conseillé aux conducteurs de véhicules au sol de répondre par « Say again » (Répétez) s’ils trouvent qu’une instruction donnée par un contrôleur n’est pas claireAirport Terminal Services, Towing and ATC Communications, version 2 (août 2014), p. 17.. À l’inverse, les directives de circulation côté piste - AVOP de l’administration aéroportuaire de Calgary traitent de la manière d’interagir avec l’ATCCalgary Airport Authority, AVOP Airside Traffic Directives (révisées en septembre 2022), section 7.0 : Air Traffic Control and Radio Procedures, p. 78 à 96. dans divers scénarios, y compris les traversées de piste où l’exactitude des communications avec l’ATC est capitale.
1.18 Renseignements supplémentaires
1.18.1 NAV CANADA
1.18.1.1 Système avancé de guidage et de contrôle de la circulation de surface
Les contrôleurs effectuent un balayage visuel de l’aérodrome à CYYC, ce qui nécessite de déplacer leur attention d’une situation à une autre pour s’assurer que les aéronefs et les véhicules sont manœuvrés conformément à leurs instructions. Pour améliorer ce processus, l’aéroport est également équipé d’un A-SMGCS de niveau 1, qui fournit au personnel de la tour de contrôle un affichage en temps réel de la circulation des aéronefs et des véhicules dans les aires de manœuvre de l’aéroport.
L’Organisation de l’aviation civile internationale définit l’A-SMGCS comme suit :
Système fournissant des indications d’acheminement (de routage), de guidage et de contrôle des aéronefs et des véhicules pour préserver le flux des mouvements sol déclaré dans toutes les conditions météorologiques comprises dans le niveau opérationnel de visibilité d’aérodrome (AVOL) en maintenant le degré de sécurité requisOrganisation de l’aviation civile internationale, Doc 9830 AN/452, Manuel sur les systèmes perfectionnés de guidage et de contrôle des mouvements à la surface (A-SMGCS), première édition (2004), Glossaire, p. X..
L’A-SMGCS intègre les renseignements fournis par le système de multilatération (MLAT) et le radar des mouvements de surface (SMR). Le système MLAT utilise un réseau de capteurs au sol pour recevoir les signaux de transpondeurs montés dans les aéronefs et les véhicules; il assure ainsi une surveillance supplémentaire des mouvements au sol dans l’ensemble de l’aéroport. Le système MLAT calcule la position d’un véhicule ou d’un aéronef en interrogeant son transpondeur depuis plusieurs antennes. Les données de MLAT sont ensuite combinées avec celles du SMR pour représenter la circulation au sol sous forme d’icônes s’affichant à l’écran des contrôleursNAV CANADA, Calgary Control Tower Unit Operations Manual (modifié le 15 juin 2023), p. 71..
Selon le manuel des opérations de l’unité de la tour de contrôle de Calgary de NAV CANADA, tous les aéronefs sont censés laisser leur transpondeur en marche lors des manœuvres sur les aires de trafic, voies de circulation et pistesIbid.. Les aéronefs qui n’ont pas reçu de code de transpondeur des services de la circulation aérienne doivent utiliser le code de transpondeur 1000. Si un aéronef est équipé d’un transpondeur en mode SLes transpondeurs en mode S peuvent établir des liaisons de données permettant le transfert d’information supplémentaire., son numéro d’immatriculation civile s’affichera à l’écran. Les véhicules d’équipement de soutien au sol, y compris les remorqueurs, qui quittent l’aire de trafic 1 sont équipés d’un transpondeur pour véhicule, qui est interrogé par le système MLAT, puis sa cible est affichée sur les écrans des contrôleurs. La fréquence de ces transpondeurs de véhicule ne peut être modifiée. Lorsqu’un tel transpondeur est installé, la fréquence de sortie de l’appareil est enregistrée auprès de l’administration aéroportuaire et de NAV CANADA.
1.18.1.1.1 Barre d’arrêt virtuelle
L’A-SMGCS de CYYC intègre une fonctionnalité appelée la barre d’arrêt virtuelle. Les barres d’arrêt sont obligatoires pour les opérations dans des conditions de faible visibilité et de visibilité réduite, et facultatives au cours des opérations se déroulant dans des conditions normales. Selon le manuel des opérations de l’unité de la tour de contrôle de Calgary [traduction],
pour améliorer la sécurité lorsque la visibilité est faible, la configuration de l’A-SMGCS comprend des barres d’arrêt virtuelles, qui sont situées à proximité des lignes d’attente physiques. Les barres d’arrêt virtuelles réduisent le risque d’incursion sur piste [caractères gras ajoutés]Pour éviter les alarmes injustifiées, les barres d’arrêt virtuelles de l’A-SMGCS sont conçues pour s’activer après qu’un aéronef a franchi un point d’attente. Les barres d’arrêt virtuelles sont conçues pour prévenir les contrôleurs d’une incursion et leur donner le temps de demander à l’aéronef ou au véhicule de s’arrêter avant de s’engager sur la piste proprement dite, réduisant ainsi la gravité des conséquences de l’incursion., car elles font retentir une alarme lorsqu’un aéronef entre sur une piste (ou la traverse) sans désactiver la barre d’arrêt au préalable. Ces barres d’arrêt sont uniquement « virtuelles » et ne sont visibles qu’à l’écran de l’A-SMGCS. Les équipages des aéronefs et les conducteurs de véhicules n’ont aucune indication que l’ATC utilise cette fonction.
Les aéronefs qui ont atterri (ou se trouvent sur la piste) et en sortent ne déclenchent pas d’alarme. Pour réduire le nombre de fausses alarmes, les barres d’arrêt virtuelles sont placées juste après les lignes d’attenteNAV CANADA, Calgary Control Tower Unit Operations Manual (modifié le 15 juin 2023), p. 56..
1.18.1.2 Procédures à suivre en cas d’indisponibilité du système avancé de guidage et de contrôle de la circulation de surface
Le principal outil utilisé par les contrôleurs de la tour de contrôle de Calgary pour l’espacement de la circulation sur les pistes est le balayage visuel. L’A-SMGCS est considéré comme un outil de soutien et aide les contrôleurs lorsqu’ils ne voient pas l’aire de manœuvre.
Il est peu fréquent que l’A-SMGCS soit indisponible à CYYC; toutefois, lorsque cela arrive, il existe des procédures à suivre. En cas d’indisponibilité de l’A-SMGCS, le superviseur de la tour de contrôle en avise l’administration aéroportuaire de Calgary, le directeur de service de NAV CANADA au Centre de contrôle régional d’Edmonton, et l’unité de contrôle terminal de Calgary. Le surveillant veille à ce que les contrôleurs des arrivées et des départs soient informés des changements apportés aux opérations et à ce que les moyens de défense nécessaires soient mis en place. De plus, le manuel des opérations de l’unité de la tour de contrôle de Calgary présente les recommandations suivantes concernant les opérations de la tour [traduction] :
A. Restriction de la circulation des véhicules et des aéronefs
Lorsque la visibilité empêche le contrôleur de voir une partie de l’aire de manœuvre et que le SMR est inutilisable, les mouvements des véhicules et des aéronefs doivent être limités. Le surveillant de la tour (ou son représentant désigné) doit informer l’IOC [gestionnaire des opérations intégrées] de l’aéroport :
- que les mouvements de véhicules sont limités à ceux qui sont essentiels aux opérations aéroportuaires;
- que tous les véhicules doivent recevoir une autorisation de l’ATC pour circuler sur les aires de manœuvre.
B. Pratiques opérationnelles suggérées
- Les pratiques exemplaires suivantes devraient être prises en compte lors d’une indisponibilité du SMR :
- Les contrôleurs doivent rester vigilants et appliquer les bonnes pratiques en matière de balayage visuel de l’aérodrome et de l’EXCDS [système d’affichage amélioré].
- Le contrôleur sol doit veiller à fournir au contrôleur tour une séquence sûre des départs sur l’EXCDS et continuer à appliquer les pratiques exemplaires dans l’aire de circulation au sol pour surveiller le trafic.
- Si les aéronefs ne sont pas visibles de la tour :
- Arrivées – demander au pilote d’appeler après avoir dégagé la piste.
- Départs – demander au pilote qu’il appelle pendant la circulation au sol (ce qui facilitera l’alignement des aéronefs suivants).
- Demander des comptes rendus de position pendant la circulation au sol, surtout si un conflit potentiel se présenteIbid., p. 70..
Le manuel recommande ensuite le mode pistes séparées pour les aéronefs à l’arrivée et au départ pendant les opérations de jour dans des conditions météorologiques de vol à vue [traduction] :
Opérations de jour dans des conditions météorologiques VFR [règles de vol à vue] – Séparées [pistes] 35/17
- départ [piste] 35L/17R et arrivée [piste] 35R/17L avec décharge de 6 ou 7 mouvements autorisée par heure
- espacement : 4 NM sur 35R/17L et 20 NM sur 35L/17R
[…]
La coordination d’un espacement réduit pour chacun des aéronefs ou pendant de très courtes périodes peut être envisagée lorsque la demande de départs est très faible et que la charge de travail le permetIbid., p. 70 et 71.. L’ajout d’un contrôleur constitue une autre stratégie possible pour atténuer l’incidence d’une indisponibilité de l’A-SMGCS. Par exemple, le manuel des opérations de l’unité de la tour de contrôle de Calgary décrit une opération non routinière appelée Chinook 29, qui est utilisée lorsque la piste 29 est en service. Au cours de cette opération, un contrôleur de surveillance, qui se trouve entre les postes tour ouest et sol ouest, assiste le contrôleur sol ouest. Le contrôleur de surveillance est notamment chargé de maintenir une écoute permanente sur la fréquence sol ouest; de veiller à l’exactitude des relectures par les aéronefs et les véhicules (et d’aviser le contrôleur sol ouest de toute incohérence); et de prévenir les contrôleurs sol ouest et tour ouest de tout véhicule ou aéronef qui s’écarte des instructions d’une manière susceptible de présenter un risque pour la sécuritéIbid., p. 73..
1.18.1.3 Phraséologie à utiliser dans les situations essentielles à la sécurité
En cas d’incursion sur piste grave, un contrôleur peut décider que la marche à suivre la plus sécuritaire est de donner l’instruction à un aéronef au départ d’interrompre son décollage. Ces instructions, notamment celle d’interrompre un décollage, ne sont pas courantes, mais elles sont considérées uniquement comme une option de dernier recours. Les directives dans le Manuel des services de la circulation aérienne de NAV CANADA indiquent :
L’interruption du décollage est une procédure d’urgence utilisée dans des situations où la continuation du décollage présenterait un grand danger pour l’aéronef. La décision d’un contrôleur d’interrompre le décollage est une mesure extrême utilisée uniquement lorsqu’il n’y a aucune solution de rechange possibleNAV CANADA, Manuel des services de la circulation aérienne – Tour, version 2.9 (31 mars 2023), p. 128..
Lorsque le contrôleur tour a donné l’instruction d’interrompre le décollage, la phraséologie exigée par le Manuel des services de la circulation aérienne n’a pas été utilisée. La phraséologie applicable aux situations essentielles à la sécurité a été cernée comme un enjeu de sécurité dans le Rapport d’enquête sur une question de sécurité du transport aérien A17O0038 du BST. En partie, le rapport indiquait que, lorsque les contrôleurs de la circulation aérienne reconnaissent un conflit entre des aéronefs ou des véhicules, ils doivent émettre des instructions rapidement pour le résoudre. Ces instructions doivent être reconnues et comprises par les destinataires visés pour que les mesures les plus sécuritaires soient mises en œuvre. Si ces mesures ne sont pas prises, il y a un risque que le conflit se termine en collision. Par conséquent, le BST a recommandé que
NAV CANADA modifie ses directives sur la phraséologie, afin que les transmissions essentielles à la sécurité visant à éliminer les conflits perçus, comme les instructions d’interruption de décollage ou de remise des gaz, soient suffisamment captivantes pour attirer l’attention des équipages de conduite, surtout lorsque leur charge de travail est élevée.
Recommandation A18-04 du BST
En réponse à la recommandation A18-04, NAV CANADA a modifié en octobre 2019 sa phraséologie liée aux interruptions de décollage afin d’inclure la répétition comme méthode visant à s’assurer que les instructions attirent suffisamment l’attention pour être reconnues au cours des périodes de charge de travail élevée, telle que le décollage. En mars 2020, le BST a estimé que les mesures prises par NAV CANADA pour réduire le risque étaient efficaces et a fermé la recommandation avec la cote attention entièrement satisfaisante.
1.18.2 Modèles mentaux
Les êtres humains prennent des décisions en partie en se construisant une représentation mentale de la façon dont le monde fonctionne, ce que l’on appelle un modèle mental. Il a été établi que [traduction] « la fonction de ces modèles est d’ordonner les connaissances liées à la tâche de manière à permettre à celui qui l’effectue de faire des déductions utiles sur ce qui se passe, sur ce qui se passera ensuite et sur ce qui peut [italique dans la version originale] se passerD. Woods, S. Dekker, R. Cook et al., Behind Human Error, 2e éd. (Ashgate Publishing, 2010), p. 104. ». Ce modèle se développe au fil du temps, à la fois par des moyens formels, tels que la formation, et des moyens informels, tels que l’expérience acquise en cours d’emploi.
Les modèles mentaux ne reflètent généralement pas les composantes et les fonctionnalités exactes d’un système particulier, compte tenu de la quantité de renseignements à laquelle il faudrait avoir accès pour y parvenirIbid.. Toutefois, la représentation mentale est souvent suffisamment précise et réduit les exigences cognitives de sorte à faciliter la prise de décisions efficace. Des renseignements inexacts ou des lacunes dans la compréhension peuvent se « glisser » dans un modèle mental, auquel cas les actions s’appuyant sur ce modèle inexact sont incorrectes lorsqu’elles sont appliquées à la situation réelle correspondante.
De plus, si l’on considère l’application des modèles mentaux au sein d’une équipe, il est possible que les membres de l’équipe aient des modèles mentaux qui sont incompatibles avec ceux des autres membres de l’équipe. Des actions erronées peuvent donc être commises en raison d’une compréhension différente d’une situation particulière et de la nécessité de davantage de communication entre les membres de l’équipe.
L’amélioration de l’apprentissage et de la compréhension entre les membres de l’équipe (quel que soit leur niveau d’autorité) quant à leurs divers rôles, points de vue et environnements de travail peut aider à réduire les effets négatifs causés par des modèles mentaux divergents. Par exemple, l’administration aéroportuaire de Calgary organise fréquemment des activités de sensibilisation avec NAV CANADA afin de faciliter l’échange de renseignements entre les divers membres du personnel chargés d’assurer la sécurité des opérations au sol à l’aéroport. Cependant, de nombreux conducteurs de véhicules au sol ne bénéficient pas de ces activités, car les activités de gestion de la sécurité de leur organisation sont gérées par les compagnies aériennes qu’ils desservent et non par l’administration aéroportuaire.
1.18.3 Gradient d’autorité
Le gradient d’autorité désigne l’équilibre de l’autorité perçue entre le chef désigné d’une équipe et les membres de cette équipeE. Seedhouse, A. Brickhouse, K. Szathmary et E.D. Williams, Human Factors in Air Transport: Understanding Behavior and Performance in Aviation (Springer, 2020), chapitre 8 : Training, section 8.1.3 : Transcockpit Authority Gradient, p. 140.. Ce gradient est influencé par divers facteurs qui comprennent, sans toutefois s’y limiter, l’âge, le sexe, l’expérience et la réputation.
Le gradient d’autorité est optimal lorsque le chef (p. ex. le commandant de bord) est clairement identifié et que tous les membres de l’équipe peuvent contribuer au processus décisionnel et se sentent à l’aise de le faireIbid.. Dans cet environnement, le chef est chargé de veiller à ce que toutes les consignes données soient claires et comprises; toutefois, si, en communiquant des renseignements importants, cette personne en omet ou se trompe, à la suite d’un oubli ou d’un moment d’inattention, il est essentiel que les autres membres de l’équipe demandent des éclaircissements sans hésitation.
Un gradient d’autorité prononcé témoigne d’un style de leadership autoritaire, où soit le chef fait fi des contributions des membres de l’équipe, soit ces derniers ne se sentent pas à l’aise de s’exprimer. En revanche, si le gradient est faible, cela signifie que le chef cède trop d’autorité et ne contrôle plus l’équipeIbid.. Lorsqu’un gradient d’autorité sous-optimal a une incidence négative sur le rendement, comme dans les 2 exemples susmentionnés, il en résulte généralement une rupture des pratiques de gestion des ressources de l’équipage, qui entrave la communication et empêche la prise de décisions judicieuses. Les équipes qui sont organisées selon un gradient d’autorité prononcé ou faible peuvent avoir besoin d’une formation approfondie sur le travail d’équipe et le renforcement de l’esprit d’équipe pour ajuster le gradient d’autorité et, par conséquent, améliorer la dynamique de l’équipe, de même que sa capacité à communiquer et à prendre des décisions de façon efficace.
Des gradients d’autorité peuvent exister autant dans les équipes pluridisciplinaires que dans les équipes homogènesB. Luva et A. Naweed, « Authority gradients between team workers in the rail environment: a critical research gap », Theoretical Issues in Ergonomics Science, vol. 23, numéro 2 (2022), p. 157.. Par exemple, contrairement à l’équipe pilote-pilote dans un poste de pilotage, les opérations au sol dans un aéroport font intervenir plusieurs professionnels de disciplines différentes, tels que des pilotes, des contrôleurs sol, des conducteurs de véhicules et des membres de l’équipe au sol, qui doivent tous collaborer pour assurer des mouvements sûrs et efficaces de la circulation aérienne. Dans cet environnement, il serait probablement d’autant plus difficile de surmonter un gradient d’autorité prononcé parce que les membres de l’équipe sont dispersés (c.-à-d. qu’ils appartiennent à des organisations différentes et sont physiquement éloignés les uns des autres) et que les différences entre leurs rôles dans les opérations au sol créent intrinsèquement un gradient d’autorité beaucoup plus prononcé que dans une équipe à une seule discipline, comme dans le cas de l’équipage de conduite d’un aéronef. En particulier, le rôle d’un contrôleur sol par rapport à celui d’un conducteur de véhicule présente un gradient d’autorité prononcé. Ce gradient prononcé peut parfois se manifester par l’incertitude des conducteurs de véhicules quant à savoir s’ils devraient demander des éclaircissements lorsqu’ils estiment que les instructions des contrôleurs ne sont pas claires, ce qui peut amener les conducteurs de véhicules à interpréter ces instructions puis à les exécuter, malgré d’éventuelles lacunes de compréhension.
Bien que dans l’événement à l’étude, le conducteur du remorqueur de tête ait effectivement interrogé le contrôleur sol lorsqu’il n’était pas certain de l’instruction de s’engager sur la voie de circulation C2, les enquêteurs ont été avisés d’autres événements où les conducteurs de véhicules au sol à CYYC n’ont pas demandé de précisions lorsque la communication n’était pas claire, en raison des effets négatifs découlant d’un gradient d’autorité sous-optimal. L’administration aéroportuaire de Calgary reconnaît ces effets et a mis en place plusieurs mesures d’atténuation, comprenant, sans toutefois s’y limiter, des protocoles de communication et des procédures d’exploitation normalisées, de la formation, des mécanismes de signalement pour les conducteurs de véhicules au sol et les contrôleurs de la circulation aérienne, ainsi que des réunions régulières avec NAV CANADA pour discuter des questions de sécurité. NAV CANADA a également mis en place des mesures d’atténuation pour réduire le risque qu’une mauvaise communication ne survienne entre les contrôleurs et les conducteurs de véhicules au sol, comme l’élaboration du guide Phraséologie du trafic terrestreNAV CANADA, Phraséologie du trafic terrestre, version 3 (avril 2022), à l’adresse https://www.navcanada.ca/fr/phraseologie-du-trafic-terrestre.pdf (dernière consultation le 27 juin 2025)., où l’on trouve des consignes sur la façon de gérer les communications avec les contrôleurs.
1.18.4 Maintien des compétences et niveau minimum de compétence
Le maintien des compétences constitue un aspect fondamental de la sécurité dans le secteur de l’aviation, qui inclut les opérations dans les aéroports. Il fait en sorte qu’une personne conserve les connaissances et le niveau de compétence requis pour obtenir une licence ou une qualification et en exercer les privilèges, même après qu’un certain temps s’est écoulé. Cette personne demeure donc compétente et capable de relever les défis complexes et dynamiques du secteur de l’aviation.
Par exemple, la publication de Transports Canada intitulée Comment garder ses compétences à jourTransports Canada, TP 2228F-37, Un instant! Pour votre sécurité : Comment garder ses compétences à jour (janvier 2010), à l’adresse https://publications.gc.ca/collections/collection_2018/tc/T52-4-2228-37-2018-fra.pdf (dernière consultation le 26 juin 2025). explique en détail comment les pilotes doivent satisfaire à l’exigence de l’expérience récente en divisant celle-ci en 3 périodes. Il existe des périodes prévues de 6 mois, de 2 ans et de 5 ans au cours desquelles les pilotes doivent effectuer des activités de pilotage précises et suivre une formation couvrant différents aspects de leur licence afin d’en exercer les privilèges. Toutefois, le respect de ces exigences en matière de maintien des compétences ne fait que garantir un niveau minimum de compétence chez le pilote. Transports Canada reconnaît que pour que les pilotes soient compétents, une formation continue doit être suivie avec succès afin qu’ils puissent exercer leur fonction comme prévu dans l’environnement de l’aviation.
À l’inverse, le programme d’AVOP de l’administration aéroportuaire de Calgary ne prévoit aucune exigence en matière de maintien des compétences pour les conducteurs de véhicules côté piste. Au cours des 5 années qui s’écoulent entre la délivrance d’un AVOP pour les opérations de jour et son expiration, le titulaire de l’AVOP n’est pas tenu de démontrer qu’il a maintenu ses compétences et qu’il a conservé le niveau de connaissances requis pour obtenir le permis.
1.18.5 Procédures, adaptation et travail
Les procédures sont appliquées par des personnes expérimentées et formées dans le monde réel. Les procédures existent pour assurer la normalisation et pour décrire les étapes des tâches, mais il peut arriver qu’il y ait des discordances entre les procédures et les pratiques de travailA. Degani et E.L. Weiner, On the Design of Flight-Deck Procedures (NASA Ames Research Center, juin 1994), p. 2.,S. Dekker, “People as a Problem to Control ”, Safety Differently: Human Factors for a New Era, 2e édition (CRC Press, 2015), p. 79 à 114.. Une discordance crée un écart entre la manière dont le travail est inscrit dans une procédure et la manière dont le travail est effectué. Cet écart crée des possibilités d’adaptation du travail lorsqu’il faut concilier de multiples objectifs tels que le travail sécuritaire, la réalisation du travail et le respect de la réglementationR. Cook et C. Nemeth, « Taking things in one’s stride: Cognitive features of two resilient performances », dans E. Hollnagel, DD. Woods et N. Leveson (éd.), Resilience engineering: Concepts and precepts (Ashgate Publishing, 2006), p. 205 à 220..
L’absence de familiarisation, de formation périodique ou de vérification régulière de la conformité relativement à la manière dont le travail est effectué dans le cadre des opérations quotidiennes peut accroître la probabilité d’adaptations qui dérivent par rapport aux procédures établies. Plus une pratique de travail adaptée est appliquée longtemps sans qu’un incident survienne, plus elle devient établieJ. Rasmussen, « Risk management in a dynamic society: A modelling problem », Safety Science, vol. 27, no 2/3 (1997), p. 183 à 213.. Au fil du temps, la nouvelle méthode de travail adaptée devient la méthode de travail normale, et les nouveaux membres de l’équipe peuvent adopter ces adaptations comme étant la pratique normale au lieu de suivre la procédure réelle.
Dans ces circonstances, il existe un risque qu’une pratique adaptée n’ait pas pris en compte tous les dangers associés au travail et à l’environnement local, ainsi que les mesures d’atténuation qui sont prévues dans une procédure formelle pour gérer ces risques. La pratique adaptée peut ne pas tenir compte d’exigences de sécurité essentielles ou de la coordination avec d’autres procédures, bien qu’elle permette quand même d’accomplir le travail. Ces adaptations, développées naturellement et progressivement pour accomplir des tâches dans des environnements et des conditions de travail complexes, peuvent miner les marges de sécurité sans que personne s’en aperçoiveS. Dekker, Drift into Failure: From Hunting Broken Components to Understanding Complex Systems (CRC Press, 2011), p. 112 à 115..
1.18.6 Liste de surveillance du BST
La Liste de surveillance du BST énumère les principaux enjeux de sécurité qu’il faut s’employer à régler pour rendre le système de transport canadien encore plus sûr.
Le risque de collisions dues aux incursions sur piste figure sur la Liste de surveillance 2022. Comme le démontre l’événement à l’étude, si le personnel conduisant sur les aires de trafic et les voies de circulation des aéroports ne reçoit pas une formation périodique appropriée, il peut ne pas posséder les connaissances requises pour utiliser l’équipement de façon sécuritaire et s’acquitter de ses responsabilités.
MESURES À PRENDRE Réduire le risque d’incursions sur piste est un enjeu complexe qui exige la collaboration de tous les secteurs de l’industrie du transport aérien. Il n’existe pas de solution unique pour réduire le risque d’incursions sur piste partout au pays. Plutôt, des solutions adaptées à chaque aéroport, jumelées à des progrès technologiques à grande portée (comme des aides à la conscience situationnelle dans le poste de pilotage et des feux d’état de la piste), pourraient être plus efficaces. L’enjeu du risque de collisions dues aux incursions sur piste demeurera sur la Liste de surveillance du BST jusqu’à ce que
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2.0 Analyse
L’enquête n’a révélé aucune défaillance mécanique ou technique des véhicules de remorquage d’aéronefs (remorqueurs) qui aurait pu contribuer à l’incursion sur piste. Les pilotes, les contrôleurs de la circulation aérienne et le conducteur du remorqueur de tête concernés dans l’incursion détenaient tous les licences, qualifications et/ou permis appropriés pour le travail à effectuer, sans indication que des facteurs médicaux ou la fatigue ont nui à leur rendement.
L’analyse se concentrera donc sur la formation et les compétences du conducteur du remorqueur de tête, sur les divers modèles mentaux de la situation qu’avaient le contrôleur sol et le conducteur du remorqueur de tête, et sur le gradient d’autorité qui existe entre les contrôleurs de la circulation aérienne et les conducteurs de véhicules au sol. L’analyse portera également sur les moyens de défense mis en place par le personnel des services de la circulation aérienne de NAV CANADA à l’aéroport international de Calgary (CYYC) (Alberta), lorsque le système avancé de guidage et de contrôle de la circulation de surface (A‑SMGCS) a été mis hors service pour effectuer des activités de maintenance planifiées. Enfin, l’analyse portera sur la phraséologie des contrôleurs de la circulation aérienne dans les situations essentielles à la sécurité.
2.1 Formation périodique et compétence des conducteurs de remorqueurs
Le conducteur du remorqueur de tête dans l’événement à l’étude possédait un permis d’exploitation de véhicules côté piste (AVOP) de type D-Tow (remorquage) DDT, qui accorde des privilèges précis de conduite et de remorquage d’aéronefs sur l’aérodrome. Pour l’AVOP de type D-Tow (remorquage) DDT, le remorqueur de tête devait obtenir un certificat restreint d’opérateur radio avec compétence aéronautique (CRO-A), qui est valide à vie. Une fois titulaire d’un CRO-A, le conducteur du remorqueur de tête pouvait étudier la matière supplémentaire nécessaire pour réussir le test visant l’obtention de l’AVOP de type D-Tow (remorquage) DDT. Tout comme l’AVOP de type DA, cet AVOP a une période de validité de 5 ans.
Cependant, ces permis et certificats, une fois délivrés, ne sont soumis à aucune exigence de mise à jour des connaissances au cours de leur période de validité. Les différents types d’AVOP n’exigent pas de formation périodique liée aux connaissances et aux compétences essentielles que les demandeurs doivent posséder pour réussir les tests nécessaires et obtenir les permis et les certificats respectifs. Les titulaires de permis et de certificats ne sont pas tenus de revoir la matière qui a été couverte ou de démontrer, après une certaine période, qu’ils la connaissent toujours et qu’ils peuvent la mettre en pratique. Le programme d’AVOP de l’administration aéroportuaire de Calgary ne comporte pas de volet de formation consacré à la mise à jour de ces connaissances. Airport Terminal Services, l’employeur des conducteurs des remorqueurs, avait mis en place un programme de formation annuel à l’intention des conducteurs de remorqueurs, mais ce programme portait uniquement sur l’équipement utilisé et entretenu sur l’aire de trafic plutôt que sur les connaissances requises pour effectuer les opérations en conformité avec l’AVOP.
Dans l’événement à l’étude, le conducteur du remorqueur de tête s’est arrêté trop près de la marque de point d’attente avant piste et n’a pas eu assez d’espace pour faire demi-tour, bien que les directives de circulation côté piste - AVOP de l’administration aéroportuaire de Calgary exigent que les véhicules laissent assez d’espace pour faire demi-tour. Cette pratique découle probablement d’une adaptation de procédure où, avec le temps, le conducteur a commencé à s’arrêter au repère visuel le plus clair pour la tâche – la marque de point d’attente avant piste en tant que telle – plutôt que plus loin du repère, parce que, dans la plupart des cas, le contrôleur donnait l’instruction au conducteur de poursuivre sa route. Il s’agit également d’un exemple de procédure rédigée dans un sens général et nécessitant une interprétation de la part du conducteur pour savoir ce qui constitue un espace suffisant en fonction du véhicule qu’il conduit. En l’absence d’un programme de formation périodique axé sur les éléments de procédure et d’un processus de surveillance (tel qu’un contrôle de compétence) permettant de surveiller les écarts par rapport aux procédures au fil du temps, il est facile que de telles adaptations ne soient pas relevées et corrigées.
Le conducteur du remorqueur de tête dans l’événement à l’étude en était à près de 3 ans du cycle de 5 ans de validité de son AVOP de type DA et de son AVOP de type D-Tow (remorquage) DDT. Tout au long de son emploi depuis l’obtention de ces permis, il n’avait pas reçu de formation périodique liée aux connaissances requises pour obtenir ces permis, et sa pratique avait donc dévié des procédures établies. Cet écart était probablement attribuable à la nécessité de formation périodique ciblant expressément la connaissance des directives de circulation côté piste - AVOP, ainsi qu’à la nécessité d’une surveillance accrue du respect des procédures de conduite côté piste par les conducteurs de véhicules.
Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs
En raison d’un écart par rapport aux procédures attribuable à l’absence de formation périodique et de surveillance, le conducteur du remorqueur de tête s’est arrêté trop près de la marque de point d’attente avant piste de la voie de circulation C2, ce qui ne laissait pas assez d’espace pour que le véhicule puisse faire demi-tour, comme l’exigent les directives de circulation côté piste - AVOP.
2.2 Décision de s’engager sur la piste 17R
Avant que l’incursion sur piste se produise et alors que les 2 remorqueurs se dirigeaient vers le sud sur la voie de circulation C en direction de leur destination, le contrôleur sol a donné l’instruction au conducteur du remorqueur de tête de s’engager sur la voie de circulation C2, d’attendre à l’écart de la piste 17R, de rester à l’écart de la voie de circulation C pendant le passage d’un aéronef se dirigeant vers le nord sur cette voie de circulation, puis de s’engager de nouveau sur la voie de circulation C. Pendant cette série d’instructions, le modèle mental de la situation qu’avait le conducteur de tête était en conflit avec le modèle mental qu’avait le contrôleur sol et, par extension, avec ce que le contrôleur sol s’attendait à ce que le conducteur de tête fasse en fonction de ces instructions.
Le modèle mental du conducteur de tête comprenait plusieurs éléments qui faisaient en sorte que le fait de s’engager sur la piste 17R, dans le but de rejoindre la voie de circulation C, semblait être le bon choix à ce moment-là. Lorsqu’il a reçu du contrôleur sol l’instruction de s’engager sur la voie de circulation C2 et d’attendre à l’écart de la piste 17R, il a interprété cette instruction comme signifiant que les 2 remorqueurs devaient se rendre jusqu’à la marque de point d’attente avant piste et s’arrêter tout juste avant celle-ci. Cette action n’était pas conforme à la procédure prévue dans les directives de circulation côté piste - AVOP de l’administration aéroportuaire de Calgary pour s’approcher des marques de point d’attente avant piste, qui précise qu’un conducteur doit s’arrêter à une position dans laquelle il disposerait de suffisamment d’espace pour faire demi-tour. Cependant, l’action du conducteur était probablement une pratique qui découlait logiquement du fait qu’une instruction d’attendre à l’écart d’une piste est presque toujours suivie d’une instruction de poursuivre sur cette route jusqu’à la piste et de ne pas faire demi-tour. De plus, le conducteur n’avait jamais fait demi-tour sur une voie de circulation auparavant et pensait qu’il ne s’agissait pas d’une procédure autorisée. Il était donc logique, pour le conducteur du remorqueur de tête, d’attendre tout juste avant la marque de point d’attente avant piste, en se basant sur son expérience habituelle après avoir reçu ce genre d’instruction du contrôle de la circulation aérienne (ATC) et en l’anticipant.
En raison de l’endroit où il s’était arrêté en attendant le passage de l’aéronef qui circulait au sol, il ne s’est pas senti en mesure de faire demi-tour une fois qu’il a reçu l’instruction de s’engager sur la voie de circulation C. La zone de la voie de circulation C2 aux environs de la marque de point d’attente avant piste est un espace étroit (d’environ 88 pieds de large) et, compte tenu du rayon de virage dont disposait le conducteur du remorqueur de tête en mode 2 roues directrices (39,5 pieds), l’espace lui a semblé insuffisant pour accomplir la manœuvre. Par ailleurs, il n’a pas jugé possible de faire marche arrière, car cette manœuvre aurait nécessité que les 2 conducteurs sortent de leur véhicule et débranchent la barre de remorquage du 2e remorqueur. Le conducteur du remorqueur de tête était également convaincu que, sauf instruction explicite du contrôleur, les conducteurs n’étaient pas censés faire demi-tour lorsqu’ils circulaient sur les surfaces contrôlées d’un aéroport, telles que les voies de circulation et les pistes, et que cette manœuvre aurait nécessité des instructions précises de la part du contrôleur. Tous ces éléments l’ont donc amené à conclure qu’un demi-tour ne constituait pas une option viable.
La route qui semblait logique pour le conducteur du remorqueur de tête était de s’engager sur la piste 17R pour ensuite revenir immédiatement sur la voie de circulation C en empruntant la voie de circulation U. Cette option lui semblait d’autant plus raisonnable qu’elle comprenait un court détour sur une piste, une manœuvre qu’il connaissait bien après avoir effectué quelque chose de similaire à plusieurs reprises au cours de l’été, pendant les travaux de construction entrepris près de la piste 29. Il estimait également que le contrôleur sol serait en mesure de voir ce que lui et l’autre conducteur faisaient et de les arrêter si leurs actions n’étaient pas acceptables.
Le modèle mental du contrôleur sol concernant cette même situation était différent. Il pensait que les conducteurs des remorqueurs suivraient les instructions à la lettre. De plus, lorsque le conducteur du remorqueur de tête a donné au contrôleur sol une relecture correcte de l’instruction qui lui avait été communiquée, il s’agissait pour le contrôleur sol d’une confirmation que l’instruction avait été bien comprise. Ces 2 éléments ont fait en sorte que le contrôleur s’attendait à ce que l’instruction subséquente de s’engager sur la voie de circulation C soit respectée.
Il est difficile pour les contrôleurs de surveiller chaque mouvement jusqu’au bout, mais ils effectuent par intermittence un contrôle des mouvements qu’ils gèrent pour assurer la conformité à leurs instructions. En l’occurrence, le fait que le contrôleur sol s’attendait à ce que l’instruction qu’il avait donnée au conducteur du remorqueur de tête soit respectée a permis au contrôleur sol de se concentrer sur les autres aéronefs et véhicules.
Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs
Selon le modèle mental du contrôleur sol, le conducteur du remorqueur de tête allait continuer à suivre la route indiquée dans son instruction. Cela était en contradiction avec le modèle mental du conducteur du remorqueur de tête, selon lequel la seule façon de poursuivre sa route était de s’engager sur la piste 17R; ce modèle mental avait été façonné, en partie, par la proximité du remorqueur par rapport au point d’attente avant piste. Par conséquent, le conducteur du remorqueur a mal interprété les instructions du contrôleur sol et s’est engagé sur la piste 17R alors que l’aéronef au départ commençait sa course au décollage, ce qui a entraîné un risque de collision.
2.3 Gradient d’autorité
Le gradient d’autorité entre les contrôleurs de la circulation aérienne, y compris les contrôleurs sol, et les conducteurs de véhicules au sol est intrinsèquement prononcé. Ce rapport s’explique par la nature différente de leurs rôles. Un contrôleur de la circulation aérienne se fait une représentation mentale de tous les véhicules circulant dans sa zone de contrôle, les surveille et est chargé de veiller au mouvement sécuritaire et efficace de ces véhicules, tandis qu’un conducteur de véhicules au sol est uniquement responsable du véhicule qu’il conduit et de suivre les instructions du contrôleur. Toutefois, le conducteur du véhicule au sol doit demander des éclaircissements si les instructions du contrôleur ne sont pas claires ou semblent être inexactes.
D’une manière générale, même si les contrôleurs jouent le rôle de chef dans cet environnement, ils doivent malgré tout travailler en équipe avec les autres personnes. Pour ce faire, il faut s’assurer que tout le personnel circulant sur les surfaces de l’aéroport comprend bien les instructions qui lui sont données. Malgré le fait qu’ils soient bien formés, les contrôleurs sont vulnérables aux moments d’inattention et aux oublis qui entraînent la communication de renseignements erronés ou incomplets aux autres membres de l’équipe. Si un conducteur de véhicule au sol entend une instruction qui n’est pas claire ou qui manque de renseignements, il est important qu’il se sente à l’aise de demander des éclaircissements sur l’intention de l’instruction du contrôleur. Cela représente un niveau de rapport optimal entre le chef (le contrôleur) et le membre de l’équipe (le conducteur du véhicule au sol). Cependant, le gradient d’autorité entre les 2 est, en réalité, beaucoup plus fort. Par conséquent, certains conducteurs de véhicules au sol ne se sentent pas à l’aise de soulever ce genre de question auprès des contrôleurs, ce qui peut entraîner des situations potentiellement dangereuses dans lesquelles les conducteurs de véhicules au sol tentent d’exécuter l’instruction alors qu’il leur manque des précisions ou qu’ils ne connaissent pas l’intention du contrôleur.
Les conducteurs de véhicules au sol travaillant à Airport Terminal Services recevaient une formation minimale sur la gestion de leurs relations avec les contrôleurs. Dans la formation que leur avait prodiguée leur employeur, la seule référence directe à la résolution d’une instruction peu claire de l’ATC était la consigne selon laquelle les conducteurs de véhicules au sol devaient répondre par « Say again » (Répétez). Les directives de circulation côté piste - AVOP contiennent effectivement des renseignements utiles à l’intention des conducteurs de véhicules au sol sur la façon d’interagir avec l’ATC dans ces situations; cependant, ces directives écrites ne suffiraient probablement pas à atténuer les effets d’un gradient d’autorité prononcé.
Il serait également utile que les contrôleurs apprennent au sujet de certaines des pratiques utilisées par les conducteurs de véhicules au sol pour effectuer leur travail, de sorte que les contrôleurs puissent à tout le moins comprendre un peu comment leurs instructions pourraient être interprétées ou exécutées par ces conducteurs. L’administration aéroportuaire de Calgary organise fréquemment des activités de sensibilisation avec NAV CANADA pour faciliter l’échange de ce genre de renseignements; toutefois, avant l’événement à l’étude, de nombreux conducteurs de véhicules au sol n’avaient pas eu la possibilité d’y participer parce que les activités de gestion de la sécurité de leur organisation étaient gérées par les compagnies aériennes qu’ils desservaient et non par l’administration aéroportuaire.
Dans une situation d’équipe, comme dans le cas présent, faisant intervenir de nombreux membres d’équipe, il est important que ces derniers puissent communiquer et qu’ils se sentent à l’aise de s’adresser à un chef lorsqu’ils remettent en doute la clarté ou la sécurité d’une instruction; sinon, il y a un risque que des actions contraires aux intentions du chef soient prises.
Fait établi quant aux risques
Si le gradient d’autorité entre un contrôleur de la circulation aérienne et un conducteur de véhicule au sol n’est pas géré de manière proactive, un conducteur de véhicule au sol peut ne pas se sentir à l’aise de demander des éclaircissements s’il estime qu’une instruction n’est pas claire ou est erronée. Une telle situation pourrait amener un conducteur à prendre des actions différentes de celles prévues par un contrôleur de la circulation aérienne.
2.4 Moyens de défense en cas d’indisponibilité de l’équipement de surveillance de l’aéroport
L’A-SMGCS permet au contrôleur de surveiller les mouvements au sol sur la surface de l’aéroport avec un affichage en temps réel de la circulation des aéronefs et des véhicules, en particulier dans les zones difficiles à voir pour le contrôleur. À CYYC, l’A-SMGCS est également configuré avec la fonction de barre d’arrêt virtuelle, qui est obligatoire pour les opérations dans des conditions de faible visibilité et de visibilité réduite et, quoique rarement utilisée, facultative pour les opérations se déroulant dans des conditions normales. Les barres d’arrêt virtuelles font retentir une alarme dans l’A-SMGCS lorsqu’un aéronef ou un véhicule s’engage sur une piste ou franchit une marque de point d’attente avant piste, à moins que cette alarme ne soit désactivée. Cette fonction, qui n’envoie aucune notification aux aéronefs ou aux véhicules, est utilisée par l’ATC pour aider à réduire la gravité des conséquences en cas d’incursion sur piste.
Lorsque l’A-SMGCS a été mis hors service pour qu’une mise à jour logicielle puisse être effectuée, les contrôleurs n’avaient pas l’affichage en temps réel pour voir la circulation des aéronefs et des véhicules à l’aéroport. Par conséquent, ils se fiaient uniquement au balayage visuel des aires dont ils étaient responsables; dans ce cas-ci, le contrôleur sol ouest était responsable du côté ouest de l’aéroport. Puisque l’A-SMGCS n’était pas disponible pour aider les contrôleurs, Segregated Plus, un processus visant à réduire les risques d’incursion sur piste, a été activé : l’espacement entre les aéronefs à l’arrivée et au départ a été augmenté, la piste 17L a été désignée pour les atterrissages seulement et la piste 17R a été désignée pour les décollages et les atterrissages. L’objectif était de fournir plus de temps aux contrôleurs pour effectuer un balayage visuel des mouvements sur l’aérodrome, donner les instructions et les autorisations appropriées, ainsi que confirmer que les relectures étaient correctes.
Pendant l’indisponibilité de l’A-SMGCS et alors que le processus Segregated Plus était utilisé, 26 secondes se sont écoulées entre le moment où les remorqueurs ont franchi le point d’attente et le moment où le contrôleur a regardé les 2 remorqueurs et qu’il a constaté qu’ils s’étaient engagés sur la piste 17R. Pendant ce temps-là, le contrôleur sol effectuait d’autres activités de contrôle.
Lorsque les contrôleurs ne disposent pas d’outils technologiques, tels que l’A-SMGCS, un certain nombre de stratégies d’atténuation peuvent être utilisées pour compléter le balayage visuel. Une modification des opérations, comme la mise en œuvre du processus Segregated Plus à CYYC, peut ne pas suffire à réduire suffisamment les risques; d’autres stratégies, comme la mise en poste d’un autre contrôleur, peuvent donc s’avérer nécessaires.
Au moment de l’événement à l’étude, l’A-SMGCS et ses fonctionnalités de sécurité, comme les barres d’arrêt virtuelles, étaient hors service en raison d’une mise à jour logicielle.
Fait établi quant aux risques
Si NAV CANADA compte principalement sur un supplément de temps et un allongement de l’espacement lorsque l’A-SMGCS est désactivé et que les principales fonctionnalités de sécurité ne sont donc pas disponibles, il y a un risque accru que des situations dangereuses, comme des incursions sur piste, se produisent et qu’elles soient détectées trop tard pour que l’on puisse corriger la situation.
2.5 Phraséologie du contrôle de la circulation aérienne à utiliser dans des situations essentielles à la sécurité
Durant les phases de décollage et d’atterrissage d’un vol, la charge de travail de l’équipage de conduite est élevée. Durant ces périodes, les personnes se concentrent principalement sur les tâches les plus critiques; par conséquent, elles filtreront les informations sensorielles qui semblent moins pertinentes ou moins importantes ou n’en tiendront pas compte.
Lorsque le contrôleur tour a été alerté de la présence de véhicules sur la piste, l’équipage de conduite du vol JZA7124 n’a pas entendu l’instruction d’interruption de décollage qui lui avait été donnée. Cela s’explique probablement en partie par la charge de travail élevée qui incombait à l’équipage de conduite pendant le décollage. L’instruction qui a été donnée par le contrôleur tour ne correspondait pas au Manuel des services de la circulation aérienne de NAV CANADA. Bien qu’il soit impossible de déterminer ce qui se serait passé si la bonne phraséologie avait été utilisée, les paroles prononcées se sont avérées inefficaces, puisqu’aucun membre de l’équipage de conduite ne se souvenait d’avoir entendu l’instruction d’interrompre le décollage.
On n’a pas été en mesure de déterminer pourquoi le contrôleur n’a pas utilisé la phraséologie en vigueur.
Fait établi quant aux risques
Si les contrôleurs de la circulation aérienne n’utilisent pas la bonne phraséologie dans les situations essentielles à la sécurité, les conséquences découlant de ces situations pourraient être plus graves.
3.0 Faits établis
3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
Il s’agit des facteurs qui ont causé l’événement ou qui y ont contribué.
- En raison d’un écart par rapport aux procédures attribuable à l’absence de formation périodique et de surveillance, le conducteur du remorqueur de tête s’est arrêté trop près de la marque de point d’attente avant piste de la voie de circulation C2, ce qui ne laissait pas assez d’espace pour que le véhicule puisse faire demi-tour, comme l’exigent les directives de circulation côté piste - AVOP.
- Selon le modèle mental du contrôleur sol, le conducteur du remorqueur de tête allait continuer à suivre la route indiquée dans son instruction. Cela était en contradiction avec le modèle mental du conducteur du remorqueur de tête, selon lequel la seule façon de poursuivre sa route était de s’engager sur la piste 17R; ce modèle mental avait été façonné, en partie, par la proximité du remorqueur par rapport au point d’attente avant piste. Par conséquent, le conducteur du remorqueur a mal interprété les instructions du contrôleur sol et s’est engagé sur la piste 17R alors que l’aéronef au départ commençait sa course au décollage, ce qui a entraîné un risque de collision.
3.2 Faits établis quant aux risques
Il s’agit des facteurs dans l’événement qui présentent un risque pour le système de transport. Ces facteurs peuvent, ou non, avoir causé l’événement ou y avoir contribué, mais ils pourraient présenter un risque dans le futur.
- Si le gradient d’autorité entre un contrôleur de la circulation aérienne et un conducteur de véhicule au sol n’est pas géré de manière proactive, un conducteur de véhicule au sol peut ne pas se sentir à l’aise de demander des éclaircissements s’il estime qu’une instruction n’est pas claire ou est erronée. Une telle situation pourrait amener un conducteur à prendre des actions différentes de celles prévues par un contrôleur de la circulation aérienne.
- Si NAV CANADA compte principalement sur un supplément de temps et un allongement de l’espacement lorsque l’A-SMGCS est désactivé et que les principales fonctionnalités de sécurité ne sont donc pas disponibles, il y a un risque accru que des situations dangereuses, comme des incursions sur piste, se produisent et qu’elles soient détectées trop tard pour que l’on puisse corriger la situation.
- Si les contrôleurs de la circulation aérienne n’utilisent pas la bonne phraséologie dans les situations essentielles à la sécurité, les conséquences découlant de ces situations pourraient être plus graves.
4.0 Mesures de sécurité
4.1 Mesures de sécurité prises
4.1.1 NAV CANADA
NAV CANADA a ajouté la phraséologie liée aux interruptions de décollage à la banque de questions du test de vérification des connaissances – tour pour s’assurer que les contrôleurs tour sont testés sur cette phraséologie utilisée lors d’urgences.
Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le 4 juin 2025. Le rapport a été officiellement publié le 22 juillet 2025.