Sortie en bout de piste
Flair Airlines Ltd.
Boeing 737-800, C-FFLC
Aéroport de Kitchener/Waterloo (CYKF) (Ontario)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
L’aéronef a reçu l’autorisation de partir alors que l’inverseur de poussée no 1 (gauche) était non fonctionnel, ce qui était permissible selon la liste minimale d’équipements. Pour respecter les exigences de la liste minimale d’équipements, la manette d’inversion de poussée no 1 était verrouillée dans la position « fermé », et un autocollant y était apposé à la vue des pilotes. Des défectuosités étaient signalées sur l’inverseur de poussée no 1 de l’aéronef à l’étude depuis mai 2022. Même si des efforts de dépannage par le passé avaient permis d’identifier une pièce spécifique qui devait être remplacée pour corriger la situation, la pièce de rechange n’a pas été achetée avant le début novembre 2022 et n’avait pas été installée au moment de l’événement. L’enquête a permis de déterminer que le système de suivi de la maintenance, de la réparation et de la révision de Flair Airlines Ltd. permettait de repérer des défectuosités récurrentes telles que définies par la réglementation, mais ne permettait pas de repérer des défectuosités comme la défectuosité de l’inverseur de poussée gauche dans l’événement à l’étude, qui ne correspondait pas à la définition d’une défectuosité récurrente. La défectuosité avait été signalée 23 fois dans les 6 mois précédant l’événement. Si le problème sous-jacent derrière une défectuosité persistente liée à la maintenance n’est pas réglé en temps opportun, il y a un risque qu’il s’aggrave, entraînant de lourdes conséquences.
Le 1er vol, qui est parti à 20 h 13 HNE et qui est arrivé à CYVR à 1 h 18 HNE, s’est déroulé sans incident. Le vol de retour a décollé à 2 h 38 HNE avec 6 membres d’équipage et 134 passagers à bord. Pendant la phase de croisière du vol, un problème médical parmi les passagers a retenu l’attention de l’équipage de conduite pendant beaucoup de temps, faisant en sorte que l’équipage n’a pas eu la possibilité d’obtenir du repos contrôlé dans le poste de pilotage pendant le vol.
Dans la semaine précédant l’événement, le commandant de bord du vol à l’étude avait effectué 2 autres vols de nuit. Même s’il avait bénéficié d’une période de repos conforme à la réglementation et qu’il se soit jugé apte au service après son autoévaluation au début du vol planifié le 24 novembre 2022, le commandant de bord avait cumulé un important déficit de sommeil au cours de la semaine précédant l’événement et pilotait l’aéronef après une période d’éveil de près de 18 heures, à la fin d’un creux circadien. Par conséquent, au moment de l’événement, le niveau de fatigue du commandant de bord réduisait son attention et sa vigilance, en plus d’augmenter la probabilité d’un raté. L’enquête a permis de déterminer que si les pilotes ne surveillent pas leur repos pour évaluer s’ils ont cumulé un déficit de sommeil, il y a un risque accru que la fatigue ne soit ni détectée, ni atténuée.
Pendant la descente, l’équipage de conduite a obtenu les derniers renseignements météorologiques du système automatisé d’observations météorologiques à CYKF, qui signalait des plafonds à environ 600 pieds au-dessus du sol, une pluie légère et une visibilité réduite. Le vol a eu l’autorisation d’effectuer une approche à l’aide du système d’atterrissage aux instruments vers la piste 26. Pendant l’approche, alors que le pilote automatique et l’automanette étaient activés et que le commandant de bord était le pilote aux commandes, l’aéronef est descendu à moins de 600 pieds au-dessus du sol, mais est resté dans les nuages. Par conséquent, le commandant de bord s’est mentalement préparé à effectuer les actions qui auraient été nécessaires pour une remise des gaz.
L'aéronef est sorti des nuages peu après, et l’approche a continué. À environ 300 pieds au-dessus du sol, le commandant de bord a désactivé le pilote automatique. Le commandant de bord, qui était le pilote aux commandes, a laissé l’automanette activée après avoir désactivé le pilote automatique en raison d’une habitude formée lors d’expériences de vol antérieures lors desquelles la pratique était permise.
Peu avant l’atterrissage, le commandant de bord avait l’intention d’appuyer sur le commutateur de désactivation de l’automanette, mais il a plutôt appuyé sur le commutateur de décollage/remise des gaz par inadvertance. Ce raté est probablement attribuable en partie au niveau de fatigue du commandant de bord et au fait qu’il était prédisposé à appuyer sur le commutateur de décollage/remise des gaz, s’étant préparé mentalement à une remise des gaz plus tôt dans l’approche. De plus, la sélection par inadvertance du commutateur de décollage/remise des gaz à 70 pieds au-dessus du sol s’est produite pendant une période de l’approche où l’équipage de conduite se concentrait principalement sur ce qui se passait à l’extérieur du poste de pilotage. Par conséquent, étant donné que les indications de la sélection par inadvertance du commutateur de décollage/remise des gaz n’étaient pas suffisamment saillantes pour alerter l’équipage de la situation, les indications de changement de mode sur le tableau annonciateur de mode et sur l’écran de poussée moteur n’ont pas été remarquées par l’équipage de conduite. Même si l’automanette commandait temporairement les 2 manettes de poussée vers une poussée de remise des gaz, le commandant de bord les tenait toutes 2 dans la position de ralenti ou près de la position de ralenti pendant l’arrondi et l’atterrissage.
À 6 h 24 HNE, l’aéronef s’est posé sur la piste 26. La manette d’inversion de poussée gauche avait été verrouillée en position « fermée » conformément à la liste d’équipement minimal (MEL). Lorsqu’il a sélectionné la manette d’inversion de poussée droite après le toucher des roues, le pilote a retiré sa main des manettes de poussée, ce qui a permis à la manette gauche d’avancer, à l’insu de l’équipage, comme l’avait commandé l’automanette. Cela a eu un certain nombre de conséquences : l’avancée de la manette de poussée a fait en sorte que les aérofreins, qui s’étaient brièvement déployés, se sont rétractés et ont désactivé le système de freinage automatique, ce qui a réduit la décélération de façon significative pendant la course à l’atterrissage.
Le commandant de bord a immédiatement eu des difficultés avec la maîtrise directionnelle de l’aéronef et a amorcé un freinage manuel. Le commandant de bord a fermé l’inverseur de poussée no 2 et a pu garder l’aéronef sur la surface de la piste tout en serrant les freins manuels. Lorsque le commandant de bord a serré les freins au maximum, il restait environ 2500 pieds de piste, et l’aéronef roulait à une vitesse sol de 115 noeuds sans aérofreins, avec l’un des moteurs produisant une poussée quasi maximale et l’autre, une inversion de poussée près du maximum. À cette vitesse et dans cette configuration, il ne restait pas suffisamment de piste pour immobiliser l’aéronef, et ce dernier a dépassé l’extrémité de la piste à 6 h 25 HNE. L’aéronef a dépassé la surface pavée de la piste 26 à une vitesse sol de 45 noeuds, est entré dans une zone d’herbe meuble et s’est immobilisé à environ 300 pieds du bord du pavage et à 500 pieds de l’extrémité de la piste.
Il n’y a eu aucun blessé et aucun dommage apparent à l’aéronef. Après avoir reçu des renseignements de la part des intervenants au sol concernant l’état de l’aéronef, l’équipage de conduite a décidé de démarrer le groupe auxiliaire de bord de l’aéronef pour assurer le confort des passagers à bord en attendant l’arrivée d’escaliers mobiles et d’autobus pour transférer les passagers jusqu’à l’édifice du terminal.
1.0 Renseignements de base
1.1 Déroulement du vol
À 18 h 50Les heures sont exprimées en heure normale de l’Est (temps universel coordonné moins 5 heures)., le 24 novembre 2022, les membres de l’équipage de conduite à l’étude ont commencé leur journée de travail à l’aéroport de Kitchener/Waterloo (CYKF) (Ontario).Ils devaient effectuer 2 vols selon les règles de vol aux instruments à bord de l’aéronef Boeing 737-800 de Flair Airlines Ltd. (Flair) : le vol FLE500 de CYKF à destination de l’aéroport international de Vancouver (CYVR) (Colombie-Britannique) suivi du vol FLE501, soit le vol de retour à destination de CYKF, qui devait partir et arriver le matin du 25 novembre.
Le Boeing 737-800 a été autorisé à partir avec l’inverseur de poussée no 1 (gauche) non fonctionnel, ce que permettait la liste d’équipement minimal (MEL)La liste d’équipement minimal (MEL) est une « [l]iste prévoyant l’exploitation d’un aéronef, dans des conditions spécifiées, avec un équipement particulier hors de fonctionnement; cette liste, établie par un exploitant, est conforme à la LMER [liste minimale d’équipements de référence] de ce type d’aéronef ou plus restrictive que celle-ci » (Source : Organisation de l’aviation civile internationale [OACI], Doc 9868, Procédures pour les services de navigation aérienne : Formation, Troisième édition [2020], partie I : Procédures générales, chapitre 1 : Définitions et sigles, p. I-1-3). approuvée de l’entreprise de transport aérien. Conformément à la MEL, la manette d’inversion de poussée gauche était bloquée en position « fermé »de manière à empêcher qu’on ne puisse la déplacer de la position de poussée (figure 1), et un autocollant de mise en garde y était apposé.

À 2 h 38, le vol de retour, le vol FLE501, a quitté CYVR à destination de CYKF avec à son bord 2 membres d’équipage de conduite, 4 membres d’équipage de cabine et 134 passagers. Le commandant de bord occupait le siège de gauche et était le pilote aux commandes (PF), et le premier officier occupait le siège de droite et était le pilote surveillant (PM). Le vol entier a eu lieu pendant les heures d’obscurité. Pendant la phase de croisière du vol, l’équipage de conduite a passé beaucoup de temps à gérer une urgence médicale qui était survenue parmi les passagers.
À 6 h 03, pendant la descente, les conditions météorologiques ont été obtenues à partir du système automatisé d’observations météorologiques (AWOS) de CYKF en vue de l’approche et de l’atterrissage. Les conditions prévues étaient les suivantes : un couvert nuageux à 600 pieds au-dessus du sol (AGL) et une visibilité de 2 milles terrestres dans de la pluie légère et de la brume, ainsi que de forts vents d’ouest en rafales. Par conséquent, l’équipage de conduite a déterminé qu’une approche reposant sur le système d’atterrissage aux instruments (ILS) pour la piste 26 serait préférable. Le Centre de contrôle regional (ACC) de Toronto a donné l'autorisation à l’équipage d’effectuer cette approche.
Après que l’aéronef eut dépassé le repère d’approche finale, le PF a commencé à regarder par la fenêtre en s’attendant à voir le sol au fur et à mesure que l’approche progressait. Cependant, le plafond nuageux était plus bas que ce qui avait été signalé par l’AWOS et, après que l’aéronef eut descendu en-dessous de 600 pieds AGL, le PF n’était toujours pas capable d’établir un contact visuel avec le sol comme il l’avait prévu, ce qui l’a incité à répéter mentalement les étapes requises au cas où une remise des gaz s’avérerait nécessaire.Peu après, il a établi un contact visuel avec le sol, puis bientôt avec le balisage lumineux d’approche de la piste 26.
À 6 h 24 min 13 s, alors que l’aéronef se trouvait à environ 300 pieds AGL, le PF a désactivé le pilote automatique. Il a laissé l’automanette activée.
À 6 h 24 min 36 s, l’aéronef a effectué un atterrissage ferme à environ 1400 pieds au-delà du seuil de piste à une vitesse sol de 142 nœuds. Les aérofreins se sont déployés, et le PM a annoncé verbalement que les aérofreins s’étaient déployés. Le PF a retiré sa main des deux manettes de poussée pour saisir la manette d’inversion de poussée no 2 (droite) et a actionné cet inverseur de pousséeLorsqu’une manette d’inversion de poussée est utilisée, un dispositif de verrouillage mécanique empêche le déplacement de la manette de poussée sur laquelle la manette d’inversion de poussée est installée.. Étant donné que le PF ne maintenait plus la manette gauche de la poussée au ralenti, l’automanette, qui était toujours activée, pouvait maintenant la déplacer en avant vers la poussée de remise des gaz, ce qui a entraîné la rétraction des aérofreins et désactivé le système de freinage automatique. Il restait environ 5600 pieds de piste à ce moment-là.
Le PF ne s’est pas rendu compte que la manette gauche de poussée avançait, et il avait de la difficulté à conserver la maîtrise directionnelle de l’aéronef parce que le moteur gauche accélérait vers une poussée maximale tandis que l’inverseur de poussée droit était déployé. La trajectoire de l’aéronef a commencé à dévier vers le bord droit de la piste.
À 6 h 24 min 41 s, soit 5 secondes après le toucher des roues, le PF a commencé à appliquer un freinage manuel à l’aide des freins de palonnier sur les pédales du palonnier, tandis qu’il continuait d’essayer de garder l’aéronef sur la piste latéralement. La vitesse sol de l’aéronef était d’environ 132 nœuds et il restait approximativement 4600 pieds de piste.
À 6 h 24 min 48 s, après avoir constaté le comportement inhabituel de l’aéronef et l’absence de décélération, le PM a balayé le poste de pilotage du regard et remarqué que la manette gauche de poussée n’était pas au ralenti comme prévu. Passant sous la main droite du PF, il a ramené la manette gauche de poussée en position de ralenti. Quand il l’a relâchée, elle a commencé à retourner vers la position de poussée maximale; toutefois, ni l’un ni l’autre des membres d’équipage ne l’a remarqué, car ils étaient tous deux concentrés sur la maîtrise directionnelle de l’aéronef.
À 6 h 24 min 52 s, soit 16 secondes après le toucher des roues, une pression de freinage maximale a été appliquée. La vitesse sol de l’aéronef était d’environ 115 nœuds, et il restait approximativement 2500 pieds de piste.
À 6 h 24 min 55 s, le PF a fermé l’inverseur de poussée droit à l’aide de la manette d’inversion de poussée et, à 6 h 24 min 57 s, le PF avait de nouveau déplacé les 2 manettes de poussée vers la position de ralenti, où elles sont restées pendant le reste de la course à l’atterrissage. Ce geste coïncidait avec l’écart latéral maximal de l’aéronef par rapport à l’axe longitudinal. La vitesse sol était d’environ 100 nœuds, et il restait approximativement 1700 pieds de piste.
À 6 h 25 min 5 s, l’aéronef a ralenti à moins de 80 nœuds et l’automanette s’est automatiquement désactivée. Il restait environ 300 pieds de piste, en plus d’environ 200 pieds de surface pavée au-delà de l’extrémité de la piste. Une seconde plus tard, le PF a redéployé l’inverseur de poussée droit.
À 6 h 25 min 9 s, l’aéronef est sorti de piste sur la surface pavée au-delà de l’extrémité de piste. Trois secondes plus tard, soit 36 secondes après le premier toucher des roues, l’aéronef est sorti de la surface pavée à une vitesse sol d’environ 45 nœuds. Il est entré dans la zone meuble et herbeuse au-delà de l’extrémité de la piste avant de s’immobiliser à environ 300 pieds au-delà de la surface pavée (soit environ 500 pieds au-delà de l’extrémité de la piste 26) (figure 2).

Le PM a communiqué avec le personnel de sauvetage et de lutte contre les incendies d’aéronefs (SLIA) de CYKF et avec l’ACC de Toronto pour les informer de la sortie en bout de piste. Le personnel de SLIA avait déjà remarqué la sortie de l’aéronef en bout de piste et avait amorcé une intervention. Peu après que l’aéronef se fut immobilisé, l’équipage de conduite a démarré le groupe auxiliaire de bord pour alimenter l’aéronef en énergie et permettre de conserver la chaleur de la cabine afin d’assurer le confort des passagers.
En quelques minutes, un technicien d’entretien d’aéronef de l’organisme de maintenance agréé embauchée par Flair est arrivé à l’aéronef après avoir été témoin de la sortie en bout de piste. Il a pu parler à l’équipage de conduite par la fenêtre du poste de pilotage et, après avoir fait le tour de l’aéronef à pied, il a indiqué qu’il ne semblait pas y avoir de dommages important à l’aéronef ou de fuite de liquide. Quelques instants plus tard, le personnel de SLIA et d’autres employés de l’aéroport sont arrivés à l’aéronef.
En raison des conditions météorologiques froides et pluvieuses, l’équipage de conduite a décidé de garder les passagers à bord jusqu’à ce qu’un escalier puisse être transporté jusqu’à l’aéronef, ce qui a permis aux passagers de débarquer normalement. Ils ont été transportés à l’aérogare par le personnel de l’aéroport.
1.2 Personnes blessées
Il n’y a eu aucun blessé parmi les 6 membres de l’équipage et les 134 passagers à bord.
1.3 Dommages à l’aéronef
L’aéronef a fait l’objet d’une inspection pour un atterrissage à forte traînée et forte charge latérale. Les moteurs ont été soumis à une inspection visuelle et une inspection endoscopique interne pour détecter des débris de corps étrangers, conformément aux procédures applicables dans le manuel de maintenance de l’aéronef.
Aucun des 2 moteurs n’a subi de dommages. Toutefois, des procédures de nettoyage et de lubrification ont été effectuées sur les moteurs, le fuselage et le train d’atterrissage afin d’éliminer la contamination par les débris de corps étrangers.
Des rondelles déplacées ont été trouvées au niveau du tourillon avant du train d’atterrissage principal gauche et de la goupille de fixation du fuselage lors d’une inspection, ce qui a nécessité le remplacement des goupilles supérieure et inférieure.
1.4 Autres dommages
Il n’y a pas eu d’autres dommages.
1.5 Renseignements sur le personnel
1er avril 2023 | ||
Heures de vol sur type au cours des 90 jours précédant l’événement | ||
Le commandant de bord a été embauché par Flair en mai 2022 par intégration directe, et son entraînement sur Boeing 737 a commencé peu après. Avant de se joindre à Flair, il avait accumulé plus de 25 ans d’expérience de vol en tant que commandant de bord de compagnie aérienne sur plusieurs aéronefs de type Boeing et Airbus, malgré qu’il n’avait aucune expérience à bord d’un Boeing 737. Il a reçu sa qualification de type sur 737 en avril 2022. Son 1er vol en tant que membre d’équipage de conduite à bord du 737 s’est déroulé le 24 mai 2022, et son 1er vol en tant que commandant de bord à bord du 737 s’est déroulé le 31 juillet 2022.
Le premier officier s’est joint à la compagnie aérienne en août 2022 et a reçu sa qualification de type sur 737 en août 2022. Son 1er vol en tant que premier officier a eu lieu le 15 septembre 2022, date à laquelle son entraînement en ligne a débuté.
1.6 Renseignements sur l’aéronef
1.6.1 Généralités
La masse et le centrage de l’aéronef respectaient les limites prescrites.
1.6.2 Correction différée de la défectuosité liée à l’inverseur de poussée gauche
Le vol a décollé avec une défectuosité non corrigée liée à l’inverseur de poussée gauche. La MEL exigeait que la manette d’inversion de poussée en question soit bloquée en position « fermé » pour éviter qu’elle ne soit actionnée. La MEL exigeait également qu’un autocollant soit apposé sur la manette. Le report de la correction et les mesures de maintenance connexes ont été consignés conformément aux exigences de la MEL de l’entreprise de transport aérien et du manuel de contrôle de maintenance (MCM).
Au cours des 6 mois précédant l’événement, il y a eu 23 signalements de défectuosités liées à l’inverseur de poussée gauche. Durant ce temps, la correction de la défectuosité de l’inverseur de poussée gauche avait été différée à 6 reprises en vertu de la MEL. Une prolongationFlair Airlines Ltd., Maintenance Control Manual, révision 39 (17 mars 2022), 4.5.3 MEL Item(s) Repair Interval Extensions Procedure, p. 4-3. a été accordée pour trois de ces reports, notamment le report en vigueur au moment de l’événement à l’étude, qui a été consigné le 10 novembre 2022. Selon les exigences de la MEL, la défectuosité devait être corrigée dans les 10 jours suivants, mais en raison d’un problème lié à la disponibilité des pièces, une prolongation de 10 jours supplémentaires avait été accordée le 20 novembre 2022.
1.6.3 Commande automatique de vol
Lorsqu’il est embrayé, le pilote automatique déplace physiquement les volants de commande du pilote (voir la figure 7 dans la section 1.6.3.1 Pilote automatique) aux positions requises pour maintenir la trajectoire de vol de l’aéronef sur les modes de commande souhaités. Pour la redondance, il y a 2 pilotes automatiques identiques, chacun avec son propre directeur de vol. C’est ce qu’on appelle un système à 2 canaux. Dans la majorité des opérations aériennes, 1 seul canal du pilote automatique est utilisé.
Le directeur de vol a pour fonction d’afficher les barres directrices sur chaque écran principal de vol (PFD) si les modes de tangage et de roulis sont activés. Les barres de commande du directeur de vol sont un signal visuel pour les pilotes : elles indiquent si des ajustements au tangage et au roulis sont nécessaires pour maintenir la position de l’aéronef en fonction des modes de commande sélectionnés.
L’automanette assure la commande automatique de poussée pour les décollages, les montées, les croisières, les descentes, les approches, ainsi que les remises de gaz ou les atterrissages. Lorsqu’elle est activée, l’automanette déplace physiquement les manettes de poussée au moyen d’un servomoteur distinct sur chacune des manettes de poussée.
La plupart des modes du pilote automatique et de l’automanette sont sélectionnés par les pilotes au moyen du MCP situé juste en-dessous de l’écran anti-éblouissement (figure 3).
Le mode de remise des gaz peut seulement être sélectionné au moyen de l’un des commutateurs TO/GA qui se trouvent sur les manettes de poussée (voir la figure 1 dans la section 1.1 Déroulement du vol).
Les pilotes entrent la trajectoire du vol, les altitudes et les vitesses souhaitées dans l’ordinateur de gestion de vol (FMC), qui calcule continuellement l’angle de tangage, l’angle de roulis et la vitesse anémométrique à commander pour maintenir cette trajectoire.

Lorsque les modes d’automanette et de pilote automatique sont armés ou activés, leur statut est affiché sur le tableau annonciateur de mode (FMA) à l’écran principalFlair Airlines Ltd., B737-800 Flight Crew Operating Manual, volume 2, révision 21 (2 août 2022), Autopilot Flight Director System (AFDS), p. 4-20-1. de chaque pilote au-dessus de l’indicateur d’assiette. Le FMA, qui est divisé en 3 parties, indique les modes activé (en vert) et armé (en blanc) pour l’automanette, le roulis et le tangage, de gauche à droite respectivement (figure 4).

Le pilote automatique et l’automanette utilisent des servomoteurs pour conduire leurs commandes respectives aux positions requises afin de suivre la trajectoire de vol commandée par le FMC. Les mouvements générés par les servomoteurs dirigent également les commandes du poste de pilotage pour donner une rétroaction aux pilotes.
1.6.3.1 Pilote automatique
Le pilote automatique du Boeing 737-800 peut contrôler la trajectoire de vol de l’aéronef à toutes les phases du vol. Il est actionné à l’aide de 1 ou 2 commutateurs d’activation de commande (CMD) du pilote automatique sur le MCP, qui se trouve sur l’écran anti-éblouissement. Les différents modes de fonctionnement du pilote automatique sont contrôlés à l’aide d’une série de commutateurs et de sélecteurs situés sur le MCP (figure 5).

Lorsque le pilote automatique à un seul canalest activé, les pilotes peuvent surpasserDans le domaine du pilotage, «surpasser» signifie manipuler une commande malgré les interventions d’un système automatique de contrôle, par exemple corriger la trajectoire malgré l’intervention du pilote automatique. manuellement les servomoteurs du pilotage automatique pour solliciter le manche (tangage), ce qui nécessite environ 20 livres de force, ou pour solliciter le volant de commande (roulis), ce qui nécessite environ 10 livres de force. Dans un cas comme dans l’autre, le surpassement manuel du pilote automatique entraîne la désactivation du pilote automatique, mais ce n’est pas une méthode approuvée pour désactiver le pilote automatique.


1.6.3.2 Automanette
On arme l’automanette en plaçant le commutateur ARM de l’automanette sur le MCP à la position ARM, où il est maintenu magnétiquement jusqu’à ce que l’automanette soit désactivée (figure 5). Un voyant lumineux vert s’allume au-dessus du commutateur ARM lorsqu’il est déplacé à la position ARM. Lorsque l’automanette est armée, elle s’active automatiquement lorsqu’un mode applicable est activé.
Les équipages de conduite peuvent surpasser le mouvement de la manette de poussée en positionnant manuellement les manettes, ce qui nécessite une force d’environ 3,5 livres par manette de poussée. Une fois que le pilote relâche les manettes de poussée, l’automanette peut repositionner automatiquement les manettes de poussée pour répondre aux exigences de poussée calculées par l’ordinateurFlair Airlines Ltd., B737-800 Flight Crew Operating Manual, volume 2, révision 21 (2 août 2022), Autothrottle System - Boeing, p. 4-20-21..
De plus, contrairement au pilote automatique, il n’y a pas d’avertissement sonore lorsque l’automanette est désactivée. Les voyants lumineux de désactivation de l’automanette clignoteront plutôt en rouge. Ce commutateur illuminé est situé au-dessus de l’écran intérieur de chaque pilote (figure 3), à côté du voyant lumineux de désactivation du pilote automatique (figure 6).
- mettre le commutateur d’armement de l’A/T en position OFF;
- appuyer sur l’un ou l’autre des commutateurs de désactivation de l’A/T;
- la détection d’une défaillance du système de l’A/TIbid., Automatic Flight – System Description, Autothrottle Disengagement, p. 4-20-9..
- deux secondes se sont écoulées depuis le toucher des roues à l’atterrissage;
- les leviers de poussée se séparent de plus de 10 °;
- une différence de poussée importante ainsi qu’une commande de roulis au volant de commande de 10 °ou plus à n’importe quel moment tout au long du domaine de volIbid., p. 4-20-9 à 4-20-10..
Lorsque le mode de remise des gaz de l’automanette est activé, il y aura débrayage automatique de l’automanette seulement si une défaillance du système est détectée ou si l’aéronef ralentit à moins de 80 nœuds. Bien que la conception prévoie un désactivation à 80 nœuds, cette condition n’est pas décrite dans les manuels du fabricant et de l’exploitant.
Lorsque l’automanette se désactive, le commutateur A/T ARM revient à la position OFF et les voyants lumineux rouges de désactivation de l’automanette clignotent. Les voyants lumineux de désactivation de l’automanette ne s’allument pas lorsqu’il y a désactivation automatique de l’automanette après le toucher des rouesIbid., p. 4-20-10..
1.6.3.2.1 Blocs de commutation de l’automanette
Il y a 2 blocs de commutation de l’automanette situés sous le pylône de commande, 1 pour chacune des manettes de poussée. Chaque bloc de commutation contient 9 commutateurs, dont 3 font partie du système de l’inverseur de poussée : 1 commutateur pour l’armement, 1 commutateur de fermeture et 1 commutateur pour le verrouillage synchrone du manche.
Ces commutateurs détectent la position de la manette d’inversion de poussée et fournissent des signaux à d’autres systèmes liés à l’utilisation de l’inverseur de poussée associéThe Boeing Company, 737-600/700/800/900Aircraft Maintenance Manual, chapitre 78 : Engine Exhaust, Thrust Reverser Control System – Arm, Stow and Sync Lock Switches..
La réparation ou le remplacement du bloc de commutation peut donc être une tâche longue, nécessitant des travaux dans un espace confiné. Cette pièce a été remplacée après l’événement, et il a été signalé que cela avait résolu les problèmes existants touchant le système d’inverseur de poussée gauche.
1.6.3.3 Mode de remise des gaz des commandes automatiques de vol
Le mode de remise des gaz (GA) de la commande automatique de vol est activé et est indiqué sur le FMA lorsque l’un ou l’autre des commutateurs TO/GA est enfoncé (figure 7). Le mode de l’automanette activé passe à la remise des gaz (GA), à condition que l’automanette soit armée, et le mode de tangage activé passe à TO/GA. Ces changements de mode apparaissent sur le FMA de l’écran de vol principal de chaque pilote, et des boîtes vertes entourent les modes modifiés pendant les 10 premières secondes (figure 8).
De plus, l’activation du mode TO/GA se traduira par l’affichage de repères de navigation sur les écrans de vol principaux. Le repère de tangage indiquera l’assiette en tangage à garder pour maintenir la vitesse ascensionnelle programmée, le repère de roulis indiquera les bonnes commandes que le pilote doit exécuter pour maintenir la route-sol actuelle, et le curseur de vitesse anémométrique commandé indiquera la vitesse anémométrique visée pour la configuration de l’aéronefFlair Airlines Ltd., B737-800 Flight Crew Operating Manual, volume 2, révision 21 (2 août 2022), Automatic Flight – System Description, Go-Around, p. 4-20-21..
En approche, avec l’automanette en position ARM, le mode de remise des gaz de l’automanette est armé automatiquement lorsque l’aéronef descend à moins de 2000 pieds de hauteur radioaltimétriqueL’équipement de radionavigation à bord d’un aéronef utilise la réflexion d’ondes radioélectriques sur le sol en vue de déterminer la hauteur de cet aéronef au-dessus de la surface de la terre. (Source : Termium Plus), que le pilote automatique soit activé ou non.

1.6.4 Circuit de freinage automatique
Le panneau de commande du freinage automatique contient un sélecteur rotatif qui peut être placé à RTO (décollage interrompu), OFF (éteint), 1, 2, 3 ou MAX. Le taux de décélération dépend de la position du sélecteur.
- en déplaçant la manette d’AÉROFREIN vers le cran de position sortie;
- en poussant vers l’avant la ou les manettes de poussée, sauf durant les 3 premières secondes après le poser des roues à l’atterrissage;
- en actionnant les freins manuellementFlair Airlines Ltd., Flight Crew Operating Manual, volume 2, révision 21 (2 août 2022), Autobrake System, p. 14-20-4 et 14-20-5..
Le voyant AUTO BRAKE DISARM (figure 10) indique que le système a été désarmé. Il est situé au-dessus du sélecteur de freinage automatique, qui lui-même se trouve sur le tableau de bord central au-dessus de l’écran supérieur qui affiche les principaux renseignements sur le moteur.

1.6.5 Circuit d’aérofreins automatiques
Le Boeing 737-800 intègre un circuit d’aérofreins automatiques qui utilise à la fois des déporteurs vol et des déporteurs sol pour faciliter la décélération de l’aéronef après l’atterrissage. Le freinage automatique fonctionne dans les conditions suivantes [traduction] :
- la manette SPEED BRAKE est en position ARMED;
- le voyant SPEED BRAKE ARMED est allumé;
- la hauteur radioaltimétrique est inférieure à 10 pi;
- la jambe du train d’atterrissage se comprime au toucher des roues; […]
- les deux manettes de poussée sont ramenées à la position IDLE;
- les roues du train d’atterrissage principal se mettent à tourner (plus de 60 nœuds).
Remarque : Après un atterrissage tous volets rentrés (sans volets), la manette SPEED BRAKE ne se déplacera pas au-delà du cran FLIGHT DETENT et les déporteurs ne se déploieront pas complètement. […]
Après [...] l’atterrissage, si l’une ou l’autre des manettes de poussée est avancée, la manette SPEED BRAKE se déplace automatiquement vers le cran DOWN et tous les panneaux de déporteurs se rétractent.Ibid., Speed Brakes, Ground Operation, p. 9-20-14 et 9-20-15.
La poignée de l’aérofrein est située à gauche des manettes de poussée. Il y a 3 voyants lumineux associés au système de freinage d’aérofrein. Les voyants SPEED BRAKE ARMED et SPEED BRAKE DO NOT ARM sont situés sous les indicateurs du pilote automatique et de l’automanette à gauche, tandis que le voyant SPEEDBRAKES EXTENDED se trouve sous les indicateurs du pilote automatique et de l’automanette droite (figure 11).

1.7 Renseignements météorologiques
À 6 h 24, l’AWOS à CYKF indiquait les conditions suivantes :
- vents du 300° vrai à 16 nœuds, avec rafales à 23 nœuds;
- visibilité de 2½ milles terrestres dans de la pluie légère et de la brume;
- couvert nuageux à 600 pieds AGL;
- température de 5 °C et point de rosée de 4 °C;
- calage altimétrique de 29,83 pouces de mercure.
Il n’y avait pas de compte rendu à jour de l’état de la surface de la piste au moment de l’événement.
1.8 Aides à la navigation
1.9 Communications
1.10 Renseignements sur l’aérodrome
La piste la plus longue de CKYF est la piste 08/26, qui mesure 7003 pieds de long et 148 pieds de large. La piste 26 est desservie par une approche ILS, tandis que toutes les pistes de l’aéroport offrent au moins 1 approche de navigation de surface (RNAV/GNSS).
Les deux extrémités de la piste 08/26 comprennent des aires de sécurité d’extrémité de piste (RESA). Selon le Supplément de vol – Canada, l’extrémité départ de la piste 26, où l’événement s’est produit, a une RESA d’environ 90 m (295 pieds) de long, dont les 60 premiers mètres (196 pieds) sont pavés, tandis que l’extrémité opposée a une RESA pavée d’une longueur de 60 mètres (196 pieds).
Après l’enquête du BSTRapport d’enquête aéronautique A05H0002 du BST. sur la sortie en bout de piste d’un Airbus A340-313 en 2005 à l’aéroport international Toront/Lester B. Pearson (CYYZ) (Ontario), le Bureau a recommandé que
Dans sa réponse de septembre 2023, TC a indiqué qu’aucune autre mesure ne sera prise pour réduire le risque résiduel que représente l’écart entre la réglementation de TC et la norme et la recommandation de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI)La norme actuelle de l’OACI pour toutes les pistes de plus de 1200 mètres exige une RESA d’au moins 90 mètres (300 pieds) au-delà de la bande de piste, qui doit s’étendre sur au moins 60 mètres (196 pieds) au-delà de l’extrémité de piste, y compris tout prolongement d’arrêt; ensemble, les 2 pistes doivent totaliser un minimum de 150 mètres (496 pieds) de longueur où la surface est dégagée, nivelée et exempte d’objets non désintégrables.. Par conséquent, en mars 2024, le Bureau a estimé que la réponse de TC dénotait une attention en partie satisfaisante, et le dossier de la lacune a été ferméRecommandation A07-06 du BST : Exigences relatives aux aires de sécurité d’extrémité de piste (RESA), à l’adresse https://www.tsb.gc.ca/fra/recommandations-recommendations/aviation/2007/rec-a0706.html (dernière consultation le 15 janvier 2025)..
Les aéroports au Canada qui desservent un nombre excédentaire de passagers pour le service régulier disposeront de 3 ans pour se conformer aux nouvelles exigences concernant la RESA, qui sont entrées en vigueur en décembre 2021. Étant donné que le nombre de passagers à CYKF a dépassé 325 000 en 2022 et 2023, l’aéroport sera tenu de se conformer aux exigences d’ici 2026 si son nombre de passagers continue de dépasser 325 000 par année.
Les RESA de la piste 08/26 de CYKF satisfaisaient aux exigences au moment de la construction de la piste. Il convient de noter qu’au-delà de chaque extrémité dela piste 08/26, il y a une zone herbeuse relativement plate qui s’étend sur plus de 150 m à partir de l’extrémité des surfaces pavées, qui fait en pratique fonction de RESA.
Il y a une tour de contrôle à l’aéroport, ouverte tous les jours de 7 h à 23 h. Pendant les heures de fermeture de la tour, l’aéroport n’est pas contrôlé.
1.11 Enregistreurs de bord
L’aéronef était doté d’un enregistreur de données de vol à semi-conducteurs qui contenait environ 27 heures de données de vol, couvrant le vol à l’étude et les 6 vols précédents. Les données de l’enregistreur de données de vol ont été téléchargées avec succès.
L’aéronef disposait également d’un enregistreur de conversations de poste de pilotage, qui avait une capacité d’enregistrement de 120 minutes. Ses données ont été téléchargées avec succès et comprenaient des enregistrements audio de bonne qualité du vol à l’étude.
1.12 Renseignements sur l’épave et sur l’impact
L’aéronef est sorti de la piste et a abouti sur de l’herbe mouillée. Les roues ont créé des ornières, qui ont causé une décélération plus rapide de l’aéronef. Le dessous de l’aéronef a été éclaboussé de boue et de saleté.
1.13 Renseignements médicaux et pathologiques
1.13.1 Fatigue
La fatigue liée au sommeil est un phénomène largement répandu dans l’industrie du transport, y compris l’aviation. La fatigue découle d’une insuffisance de sommeil de bonne qualité. En général, les adultes ont besoin de 7 à 9 heures de sommeil consécutives chaque nuit pour se sentir bien reposésM. Hirshkowitz, K. Whiton, S.M. Albert et al., « National Sleep Foundation’s sleep time duration recommendations: methodology and results summary », Journal of the National Sleep Foundation by Elsevier Inc. dans Sleep Health 1 (2015), p. 40 à 43..
Le sommeil est un besoin biologique fondamental qui doit être satisfait. Dans le cas contraire, une personne peut se trouver en déficit de sommeil, soit en raison d’une seule période de sommeil grandement réduite (perturbation aiguë du sommeil), soit en raison d’un déficit de sommeil qui s’est accumulé au fil du temps (perturbation chronique du sommeil).
Le travail d’un pilote peut comprendre de longues heures de travail irrégulières, des vols de nuit, des horaires de travail imprévisibles et des déplacements à diverses distances pour se rendre au travail et en revenir. Ces facteurs peuvent grandement contribuer à la fatigue en affectant la quantité de sommeil réparateur des pilotes.
Un examen des antécédents de sommeil des 2 pilotes a révélé que le commandant de bord était probablement fatigué pendant l’approche et l’atterrissage du vol à l’étude. Cela s’explique en grande partie par un repos irrégulier et insuffisant avant l’événement, qui s’est produit pendant un creux circadien, tard dans le quart de travail.
1.13.1.1 Rythme circadien, état d’éveil et vigilance
L’état d’éveil et la performance d’une personne varient sensiblement selon le moment de la journée, en raison de changements physiologiques synchronisés avec le rythme circadien (quotidien). D’un point de vue physiologique, le corps est prêt à dormir la nuit et à être éveillé pendant le jour.
Par conséquent, la performance globale et les fonctions cognitives sont à leur plus bas pendant la nuit, d’environ 2 h à 6 h. Cette période, appelée « phase basse du rythme circadien », survient au moment du point bas quotidien de la température corporelle centrale, lorsque la somnolence est la plus marquéeOrganisation de l’aviation civile internationale (OACI), Doc 9966, Manuel pour la supervision des approaches de gestion de la fatigue, Deuxième édition, Version 2 (2020), Glossaire, p. XVII-XVIII..
L’état d’éveil varie en fonction de l’heure de la journée et suit le cycle de température corporelle, atteignant un sommet dans la journée et diminuant à son niveau le plus bas pendant la nuitS. Saba Naz, M. Muddassar Shafiq et M. Albreiki, « Interaction between Melatonin, Sleepiness-Alertness and Body Temperature », dans Sleep Medicine – Asleep or Awake? (24 juillet 2023).. Cette diminution pendant les heures nocturnes affecte la plupart des aspects de la performance cognitive humaine, y compris la vitesse de traitement, la mémoire de travail, l’attention visuelle et la vigilanceT. Vlasak, T. Dujlovic et A. Barth, « Neurocognitive impairment in night and shift workers: a meta-analysis of observational studies », dans Occupational and Environmental Medicine (2022), vol. 79, numéro 6, p. 365 à 372.,S.L. Chellappa, C.J. Morriset F. Scheer, « Daily circadian misalignment impairs human cognitive performance task-dependently », dans Sci Rep (14 février 2018)..
La vigilance est associée à un état d’éveil suffisant pour surveiller l’environnement de manière efficace, en mettant un accent particulier sur la recherche de stimuli qui annoncent un danger potentielB.S. Oken, M.C. Salinsky et S.M. Elsas, « Vigilance, alertness, or sustained attention: Physiological basis and measurement », dans Clinical Neurophysiology (2006), vol. 117, p. 1885 à 1901.. Il a été démontré qu’une baisse de vigilance réduit le taux global de détection des stimuli critiques pendant toute la durée d’une tâche donnéeJ. Deaton et R. Parasuraman, « Effects of task demands and age on vigilance and subjective workload », dans Proceedings of the Human Factors and Ergonomics Society Annual meeting (1997), vol. 32, p. 1458 à 1462..
La vigilance, en particulier la vigilance psychomotrice, qui implique de répondre à un stimulus par un mouvement corporel (par exemple, en enfonçant un bouton à l’apparition d’un voyant lumineux), est reconnue comme étant altérée par la fatigueM. Ingre, T. Åkerstedt, B. Peters et al., « Subjective sleepiness, simulated driving performance and blink duration: Examining individual differences », dans Journal of Sleep Research, vol. 15 (2006), p. 47 à 53..
1.13.1.2 Heures de travail et de périodes de repos des membres d’équipage de conduite
Même si les antécédents de travail de l’équipage de conduite au cours de la semaine précédant l’événement satisfaisaient aux exigences du Règlement de l’aviation canadien (RAC)Transports Canada, DORS/96-433, Règlement de l’aviation canadien, sous-partie 700, section III : Gestion de la fatigue des membres d’équipage de conduite., le commandant de bord avait accumulé un important déficit de sommeil au cours de la semaine précédant l’événement et avait été éveillé pendant près de 18 heures consécutives au moment de l’événement à l'étude.
Le vol à l’étude était le 3e vol de nuit du commandant de bord dans les 4 jours précédant l’événement. Son horaire était le suivant :
- il était en service de vol de 18 h 45 le lundi à 6 h 54 le mardi;
- il a fait 2 courtes siestes pendant la journée le mardi, après la fin de son service;
- son service le mercredi matin a commencé à 0 h 45 et s’est terminé à 7 h 49;
- une fois en congé le mercredi, il est resté éveillé jusqu’à minuit;
- le jeudi, il a dormi de façon intermittente pendant 12 heures à partir de minuit et s’est réveillé à 12 h 30;
- son service le jeudi soir a commencé à 18 h 50 et s’est poursuivi jusqu’à ce que l’événement se produise à 6 h 25 vendredi.
Même si le temps hors service du commandant de bord était conforme à la réglementation et aurait dû lui permettre de se reposer suffisamment, son emploi du temps, y compris le temps de service de réserve et les vols retardés, combiné à des engagements personnels et à un trajet de navette de 90 minutes, peut avoir eu une incidence sur sa capacité à prioriser efficacement son repos pendant cette période. Avant le début sa journée de service, le commandant de bord s’est autoévalué et a déterminé qu’il était apte au travail.
Le premier officier avait eu 4 jours de congé avant le vol et était vraisemblablement bien reposé. Bien que l’événement se soit produit tard au cours du quart de travail et après 18 heures d’éveil, le premier officier avait pris des mesures pour réduire la fatigue en ajustant son rythme de sommeil et d’éveil dans les jours précédant le vol à l’étude. Le premier officier n’avait pas cumulé de déficit de sommeil et n’était probablement pas fatigué pendant l’événement.
1.13.1.3 Facteurs de risque liés à la fatigue
Six facteurs de risqueBureau de la sécurité des transports du Canada, Guide to Investigating Sleep-related Fatigue (février 2022). peuvent causer la fatigue : perturbations aiguës du sommeil, perturbations chroniques du sommeil, état d’éveil continu, effets du rythme circadien, troubles du sommeil et autres troubles médicaux et psychologiques, et maladies ou prise de médicaments influant sur le sommeil ou induisant de la somnolence (annexe B).
- Perturbations aiguës du sommeil
- Perturbations chroniques du sommeil
- État d’éveil continu
- Effets du rythme circadien
Troisièmement, l’événement est survenu pendant le creux circadien nocturne, lorsque les fonctions cognitives et la performance globale sont à leur plus bas. Compte tenu du nombre, de l’ampleur et de la combinaison des facteurs de risque liés à la fatigue, le commandant de bord était probablement fatigué pendant l’approche et l’atterrissage du vol à l’étude.
1.14 Incendie
Rien n’indique la présence d’un incendie soit avant ou après l’événement.
1.15 Questions relatives à la survie des occupants
1.16 Essais et recherche
1.16.1 Rapports de laboratoire du BST
Le BST a produit les rapports de laboratoire suivants dans le cadre de la présente enquête :
- LP124/2022 – Flight Data Analysis [Analyse des données de vol]
- LP125/2022 – CVR Data Recovery [Récupération des données du CVR]
- LP127/2022 – NVM Recovery – AACU [Récupération des données de la mémoire non volatile - unité de commande antidérapage/freinage automatique]
1.17 Renseignements sur les organismes et sur la gestion
Lancée en 2017, Flair est établie à Edmonton (Alberta). Au moment de l’événement, sa flotte comprenait 22 Boeing 737, dont 3 (y compris l’aéronef de l’événement) étaient des modèles 737-800 et 19 étaient des modèles 737-MAX 8.
1.17.1 Gestion de la fatigue
Le RAC impose des exigences normatives pour atténuer les risques et les effets de la fatigue. En 2018, une mise à jour importante du RAC a introduit des approches à la fois normatives et axées sur le rendementCette approche axée sur le rendement précise des objectifs, ou des normes en matière de résultats, et permet à l’entité réglementée de déterminer les moyens de conformité. en matière de gestion de la fatigue, qui étaient en vigueur au moment de l’événement.
La période de service de vol a été modifiée à un maximum de 9 à 13 heures, en fonction de l’heure de début et des secteurs de vol. Les périodes de repos ont été prolongées à 12 heures, ou 11 heures plus le temps de déplacement si le pilote se repose à la maison, ou 10 heures si le pilote est dans un logement convenable fourni par l’exploitant aérien.
a) les stratégies personnelles de gestion de la fatigue ayant trait :
(ii) au mode de vie, à l’exercice et au régime alimentaire,
(iii) à la consommation d’alcool et de drogues;
b) l’incidence de la fatigue sur la sécurité aérienne;
c) les exigences en matière de sommeil et les connaissances scientifiques concernant la fatigue;
d) les causes et les conséquences de la fatigue;
e) les manières de reconnaître les signes de la fatigue chez soi-même et chez les autres;
g) les facteurs humains et organisationnels qui peuvent causer la fatigue, notamment :
(i) la qualité et la durée du sommeil,
(ii) l’incidence du travail par quart et des heures supplémentaires,
(iv) les effets du changement de fuseau horaireTransports Canada, DORS/96-433, Règlement de l’aviation canadien, paragraphe 705.124(4) (en vigueur depuis le 20 septembre 2021)..
Le système de gestion de la sécurité (SGS)Flair Airlines Ltd., Safety Management System, Policy and Procedures, revision 26 (1er novembre 2022). de Flair décrit un programme de formation en ligne axé sur les facteurs humains dans l’aviation, les répercussions de la performance individuelle sur le système, et les outils mis à la disposition des employés pour empêcher que des erreurs ne soient commises. Cependant, le document ne fait référence à aucune formation spécialement conçue pour la gestion de la fatigue.
De même, le COM de FlairFlair Airlines Ltd., Company Operations Manual, révision 53 (1er septembre 2022). aborde la gestion de la fatigue pour les membres d’équipage de conduite en établissant un système qui surveille le temps de vol, les périodes de service, les heures de travail, les périodes de repos et le temps hors service.
1.17.2 Horaire des réservistes
À Flair, les pilotes réservistes sont parfois informés qu’ils vont piloter seulement 90 minutes avant de devoir se présenter au travail, ce qui rend difficile de planifier une période de repos adéquate. Leur période de service potentielle pourrait durer jusqu’à 18 heures à compter du début de leur période de service de réserve, bien que le maximum réel de service de vol soit de 12,5 heures.
1.17.2.1 Périodes de disponibilité des réservistes de Flair
À Flair, les pilotes réservistes peuvent être affectés à 1 de 3 périodes de disponibilité de réserve (PAR). La PAR est une période pouvant totaliser jusqu’à 14 heures au cours de laquelle un membre d’équipage de conduite doit être disponible et prêt à se présenter au travail dans un délai de 90 minutes.
Les 3 PAR standards assignées aux pilotes de Flair sont les suivantes :
Si Flair souhaite modifier la PAR d’un pilote, il est tenu de lui donner un préavis de 12 à 32 heures, selon l’heure de début de la nouvelle PAR. Par exemple, lorsque la période de service de réserve modifiée tombe pendant la phase basse du rythme circadien du pilote, un préavis de 32 heures est requisIbid., Appendix D: Flight Crew Member Fatigue Management, D.1: Definitions, p. APP D-2, D-3..
Il incombe aux pilotes réservistes de s’assurer qu’ils peuvent se présenter au travail en 90 minutes pendant leur PAR. Pendant qu’ils sont réservistes, il n’est pas rare que les pilotes qui ne sont pas en mesure de se déplacer en 90 minutes de leur domicile jusqu’à l’aéroport trouvent un logement plus près de l’aéroport, à leurs frais, pour satisfaire à cette exigence.
1.17.2.2 Périodes maximales de service de réserve et de service de vol
Conformément au COM de Flair, une période de service de réserve est le temps total entre le début de la période de disponibilité de réserve et la fin d’une période de service de vol assignée. La période de service totale ne peut dépasser 14 ou 18 heures, selon l’heure de début de la période de service de réserve.
Par exemple, si la période de service de réserve commence entre 2 h et 17 h 59, la période maximale est de 18 heures. Si la période de réserve commence entre 23 h et 1 h 59, ce qui inclut la phase basse du rythme circadien, la période de service maximale est de 14 heuresIbid., D.19: Flight Crew Member On Reserve, p. APP D-21..
Conformément au COM de FLAIR, le temps de service de vol maximal pour l’affectation du vol à l’étude était de 12 heures, car l’heure de début se trouvait entre 17 h et 21 h 59, et l’affectation prévoyait moins de 5 volsIbid., Table D.1 : Maximum Flight Duty Period (Average Flight Duration 50 Minutes or More), p. APP D-6.. L’équipage de conduite avait cumulé environ 11,4 heures de service continu au moment de l’événement.
1.17.3 Repos contrôlé dans le poste de pilotage
Le COM de FlairIbid., D.21 : Controlled Rest on the Flight Deck, p. APP D-23. permet un repos contrôlé dans le poste de pilotage pendant lequel 1 membre d’équipage peut se reposer en ayant les yeux fermés pendant un maximum de 45 minutes au cours du vol.
En ce qui concerne le but et l’utilisation permise du repos contrôlé dans le poste de pilotage, TC a indiqué ce qui suit dans une circulaire d’information publiée en mai 2022 :
La possibilité pour les MEC [membres d’équipage de conduite] de prendre un repos aux commandes au poste de pilotage ne peut être garantie; par conséquent, un exploitant aérien ne peut pas envisager cette possibilité comme une mesure continue de contrôle ou d’atténuation des risques liés à la fatigue pour s’attaquer aux causes des dangers liés à la fatigue générés par la dérogationTransports Canada, Circulaire d’information (CI) No 700-045 : Processus lié aux exemptions et aux dossiers de sécurité du système de gestion des risques liés à la fatigue (édition 03, 2 mai 2022), alinéa 6.3.4(2)c)..
1.17.4 Procédures d’exploitation normalisées
Le manuel d’exploitation de l’équipage de conduite (FCOM) de Flair repose sur le FCOM de Boeing. Il comprend des procédures d’exploitation normalisées (SOP) conçues pour s’assurer que les équipages de conduite effectuent des opérations aériennes conformément à une norme commune.
L’annonce des changements sur le FMA et l’écran de mode des poussées lorsqu’ils se produisent est considérée comme une bonne pratique de gestion des ressources de l’équipage (GRE)Flair Airlines Ltd., B737-800 Flight Crew Operating Manual, volume 1, revision 21 (2 août 2022), Chapter NP: Normal Procedures, Introduction, Autopilot Flight Director System (AFDS) Procedures, p. NP-11-12..
La procédure d’approche normale exige que les pilotes désactivent l’automanette en même temps qu’ils désactivent le pilote automatiqueIbid.. Amplified Procedures, Landing Procedure – ILS CAT I, p. NP-21-56..
De nombreux autres exploitants d’aéronefs de la catégorie de transport permettent l’utilisation de l’automanette pendant l’approche après la désactivation du pilote automatique. Le commandant de bord du vol à l’étude avait longtemps travaillé pour d’autres exploitants où il s’agissait d’une pratique courante.
1.17.5 Opérations avec un seul inverseur de poussée
Le FCOM et le COM de Flair ne renferment que 2 éléments concernant l’exploitation avec 1 inverseur de poussée non fonctionnel : une restriction empêchant l’affectation des aéronefs à des pistes d’une largeur inférieure à 148 pieds avec 1 inverseur de poussée non fonctionnelIbid., Chapter L: Limitations, Limitations and Operational Information, Aircraft General, p. L-10-2. et un rappel que la masse limitée en cas de piste mouillée ou d’obstacle et la V1 doivent être réduits pour tenir compte des effets sur la performance lors des accélérations et des arrêts qu'entraîne le fait de ne disposer que d'un seul inverseur de pousséeIbid., Chapter PI: Performance Inflight, Text, Thrust Reverser Inoperative, p. PI-27-4..
La MEL exige qu’un inverseur de poussée non fonctionnel soit verrouillé en position de poussée et qu’un autocollant y soit apposé, comme il est indiqué dans la liste d’équipement minimal de l’aéronefFlair Airlines Ltd., Minimum Equipment List (MEL): Boeing 737-800, révision 10 (29 septembre 2022), item 78-01, p. 78-1., et que les pilotes tiennent compte de la performance lorsqu’il s’agit de calculer les paramètres de performance liés au décollage. Un fil de fer, qui a été utilisé dans ce cas-ci, est un moyen de garantir le respect de l’exigence de verrouillage de l’inverseur de poussée.
1.17.5.1 Formation
Le manuel de formation des équipages de conduite de 737 NG de Boeing comprend un diagrammeThe Boeing Company, 737 NG Flight Crew Training Manual, révision 21 (30 juin 2022), Chapter 6 : Landing, Landing Roll, Reverse Thrust Operation, p. 6.44. illustrant la position dans laquelle doit être la main du pilote lorsqu’il actionne les manettes d’inversion de poussée (figure 12).

Selon le manuel de formation des équipages de conduite de 737 NG et le manuel d’exploitation des équipages de conduite de 737-600/-700/-800/-900/-900ER de Boeing, un atterrissage avec arrêt complet doit être effectué après avoir commencé à utiliser l’inverseur de pousséeIbid., p. 6.43.,The Boeing Company, 737-600/-700/-800/-900/-900ER Flight Crew Operations Manual, révision 21 (30 septembre 2022), Landing Roll Procedure, Warning, p. NP.21.76..
1.17.6 Organisme de maintenance agréé de Flair
Flair est autorisé par Transports Canada (TC) à exécuter des travaux de maintenance en vertu d’un certificat d’organisme de maintenance agréé (OMA). Le certificat autorise l’OMA à effectuer la maintenance des Boeing 737 avec une portée de travail limitée et à effectuer des travaux de maintenance non spécialisés jusqu’aux vérifications CUne inspection complète de l’aéronef effectuée à un intervalle précis (environ tous les 20 à 24 mois), ou après un nombre particulier d’heures de vol, tel que défini par le constructeur., mais sans inclure ces dernières.
Flair exploite des installations de maintenance agréées à Calgary (Alberta) et à Edmonton, en plus d’avoir accès à un hangar pleine grandeur à CYKF pour l’entretien sur une base ponctuelle. L’entreprise confie également en sous-traitance des travaux d’entretien prévus et imprévus à des OMA tierces à divers autres aéroports.
1.17.6.1 Contrôle de la maintenance
Les principales fonctions du centre de contrôle de la maintenance (MCC) de Flair sont la planification et la coordination des travaux de maintenance. Il y a normalement 8 contrôleurs de maintenance travaillant en équipes de deux par quarts de travail de 12 heures de façon à assurer une disponibilité 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.
Chaque contrôleur de maintenance est également autorisé par Flair à titre d’autorité de certification d’aéronefUne personne autorisée à signer une certification technique pour les travaux effectués sur un aéronef. et est titulaire d'une licence de technicien d’entretien d’aéronef (TEA) dans la catégorie applicable.
Le groupe maintient la communication avec les OMA en sous-traitance en ce qui concerne la correction ou le report des défectuosités. Le contrôleur de maintenance s’assure de commander les bonnes pièces, d’assurer le suivi des commandes, et de prendre des dispositions pour qu’elles soient livrées à l’emplacement où la pièce est nécessaire pour corriger ou dépanner un problème de maintenance.
1.17.6.2 Signalement des défectuosités
Le manuel de contrôle de la maintenance (MCM) approuvé par l’entreprise stipule que toutes les anomalies doivent être consignées dans le champ des anomalies du carnet de route de l’aéronef par le personnel de maintenance ou l’équipage de conduiteFlair Airlines Ltd., Maintenance Control Manual, révision 39 (17 mars 2022), Section 4 : Maintenance Reporting and Rectification, Subsection 4.4 : Unplanned Maintenance – Discrepancies, p. 4-2..
Le RACTransports Canada, DORS/96-433, Règlement de l’aviation canadien, article 605.94, section IV, annexe 1, point 9. indique que le commandant de bord est chargé de consigner dans ce carnet les détails sur toute défectuosité de pièce ou de l’équipement de l’aéronef qui devient apparente durant des opérations aériennes le plus tôt possible et au plus tard avant le prochain vol.
1.17.4.3 Correction différée de défectuosités et défectuosités récurrentes
Dans les Normes de service aérien commercial (NSAC), il est également indiqué qu’il incombe à l’exploitant aérien de s’assurer que son personnel de maintenance est au courant des défectuosités récurrentes, afin d’éviter le dédoublement des tentatives infructueuses de correctionTransports Canada, Normes de service aérien commercial, article 726.05 : Méthodes de correction des défectuosités et de contrôle des mesures correctives..
En vertu de la réglementation, une défectuosité est récurrente si « le mode de défaillance se répète sur un aéronef donné trois fois à l’intérieur de 15 segments de vol d’une réparation antérieure pour ce même mode de défaillanceIbid., paragraphe 726.05(3). ».
Le système de suivi d’entretien, de réparation et de révision de FlairAMOS est le système de suivi d’entretien, de réparation et de révision utilisé par Flair Airlines Ltd. Il est mis au point et fourni par Swiss Aviation Software. générera une alerte si 3 défectuosités portant le même numéro de chapitre à 2 chiffres de la Air Transport AssociationLe système de numérotation de la Air Transport Association est une norme de référence couramment utilisée dans la documentation des aéronefs commerciaux. se produisent à l’intérieur de 15 segments de vol de l’aéronef. L’alerte sera évaluée afin de déterminer si les défectuosités sont interreliées, de sorte que des travaux d’entretien appropriés puissent être entrepris en délivrant un bon de travail.
Le Maintenance Control Manual de Flair indique qu’une défectuosité récurrente existe seulement lorsqu’une anomalie connexe survient une 4e fois en 15 vols (3 récurrences)Flair Airlines Ltd., Maintenance Control Manual, révision 39 (17 mars 2022), section 4 : Maintenance Reporting and Rectification, sous-section 4.8 : Recurring Discrepancy Procedure, p. 4-6., conformément à la réglementation.
Le système ne génère pas de notification si une défectuosité se produit à nouveau en dehors de ces paramètres.
1.17.6.4 Historique des défectuosités liées à l’inverseur de poussée gauche
Le manuel d’identification des pannes (FIM)The Boeing Company, Fault Isolation Manual (15 juin 2016), Section 801: Engine Accessory Unit (EAU) Bite Procedure. de l’aéronef est utilisé par le personnel de maintenance pendant le processus de dépannage. Dans le cas d’un problème d’inverseur de poussée, le FIM exige la vérification du module des accessoires moteur (EAU), qui indique quelle partie du système est défectueuse.Une fois les résultats du test enregistrés, l’historique des codes de défectuosité est réinitialisé, ce qui réinitialise également le voyant de signalisation REVERSER sur le tableau plafond dans le poste de pilotage.
Il est également courant de remettre un aéronef en service en reportant la correction d’un élément, à condition qu’elle puisse être différée conformément à la MEL de l’aéronef. La MEL décrit également en détail les procédures de maintenance et d’exploitation à privilégier pendant que la correction de la défectuosité est différée, et fournit une date limite pour la réparation de la défectuosité.
Au cours de cette période, il y a eu 18 occasions où la seule mesure de maintenance prise consistait à réinitialiser l’EAU et à soumettre les manettes d’inversion de poussée à un cycle de fonctionnement. Ces réinitialisations ont été effectuées par 6 OMA différents à 10 destinations différentes de Flair.
La MEL a été appliquée à 6 reprises, bien que dans un cas, la seule mesure prise avant d’autoriser la MEL ait été de réinitialiser l’EAU. Dans 3 cas, une prolongation de 10 jours de la MEL a été accordée, y compris la prolongation en vigueur au moment où est survenu l’événement à l’étude en raison de l’indisponibilité des pièces de rechange. L’inverseur de poussée gauche avait été désactivé et verrouillé en position « fermé » pendant un total d’environ 50 jours entre le moment où la défectuosité a été signalée pour la première fois et le jour de l’événement.
Les demandes de pièces ont été soumises à Flair le 20 mai 2022 avec une désignation « urgente », ce qui signifie que la pièce était requise dans les 3 à 5 jours suivants. Aucune mesure n’a été consignée par l’OMA de Flair pour exécuter ou approuver la demande.
Le 12 juin 2022, une demande identique a été présentée, encore une fois sans qu’aucune mesure consignée n’ait été prise pour exécuter ou approuver la demande. L’enquête n’a pas permis de déterminer pourquoi ces demandes n’ont pas été traitées.
Le 17 juin 2022, après 6 réinitialisations du système et 10 jours sur la MEL, la première mesure de maintenance consignée autre qu’une réinitialisation du système a été effectuée sur le système d’inverseur de poussée gauche : un connecteur électrique a été nettoyé, mais le bloc de commutation de l’automanette n’a pas été commandé. Trois autres pièces ont été remplacées au cours des 4 mois suivants pour tenter de résoudre le problème.
Le 10 novembre 2022, la commande de pièces pour le bloc de commutation de l’automanette, qui avait été demandée pour la première fois en mai 2022, a été approuvée par l’OMA de Flair. Après l’événement, le remplacement du bloc de commutation gauche de l’automanette a résolu le problème persistent de l’inverseur de poussée du moteur gauche.
Le RAC exige que les exploitants aériens incluent dans leur système de contrôle de la maintenance un moyen de consigner les défectuosités des aéronefs, de s’assurer que les défectuosités sont corrigées conformément aux exigences de la réglementation, et de détecter et d’identifier les défectuosités qui se reproduisentTransports Canada, DORS/96-433, Règlement de l’aviation canadien, article 706.05..
(1) En vertu de l’article 706.05 du RAC, le système de correction des défectuosités doit comprendre une méthode pour souligner les défectuosités qui se reproduisent, pour qu’elles soient facilement décelables par les équipages de conduite et par l’organisme de maintenance à toutes les bases où l’aéronef est utilisé. Il incombe à l’exploitant aérien d’indiquer au personnel de la maintenance qu’il s’agit de défectuosités récurrentes afin d’éviter la duplication de tentatives de correction infructueuses.
(2) En vertu de l’article 706.05 du RAC, le système de contrôle des défectuosités doit assurer que la correction d’une défectuosité qualifiée de défectuosité récurrente va tenir compte de la méthodologie utilisée dans les tentatives de réparation antérieures.
(3) Aux fins des présentes normes, une défectuosité est dite récurrente si le mode de défaillance se répète sur un aéronef donné trois fois à l’intérieur de 15 segments de vol d’une réparation antérieure pour ce même mode de défaillanceTransports Canada, Normes de service aérien commercial, article 726.05 : Méthodes de correction des défectuosités et de contrôle des mesures correctives..
1.17.6.5. Continuité dans les efforts de dépannage du système
Bien que le MCC de Flair ait reçu des documents techniques générés par chaque OMA sous-traitant, ces documents ne sont pas tenus d’avoir un compte rendu détaillé des tentatives de dépannage infructueuses ou des mesures prises pour corriger la défectuosité, et ne comprennent souvent pas un tel compte rendu. Par conséquent, il y avait peu ou pas d’informations disponibles au sujet des efforts de dépannage précédents quand la même défectuosité se produisait à un endroit différent.
1.17.7 Système de gestion de la sécurité
En tant qu’entreprise de transport aérien et OMA exploitant et entretenant des aéronefs en vertu des sous-parties 705 et 573 du RAC, Flair est tenu d’élaborer et de tenir à jour un système de gestion de la sécurité (SGS). Le manuel des politiques relatives à la gestion de la sécurité de FlairFlair Airlines Ltd., SMS Policy Manual, révision 26 (1er novembre 2022). décrit le SGS de l’entreprise de transport aérien.
1.17.7.1 Examen des rapports du système de gestion de la sécurité
Les enquêteurs ont examiné les rapports du SGS de Flair pour l’année précédant l’événement afin de déterminer si des problèmes semblables à ceux du vol à l’étude avaient été résolus adéquatement par le SGS. Les résultats de l’examen sont présentés dans les sections qui suivent.
1.17.7.1.1 Pression par inadvertance sur le commutateur de décollage et de remise des gaz
Les rapports du SGS de Flair remontant jusqu’à janvier 2021 ont été examinés pour déterminer si des cas de pression par inadvertance sur le commutateur TO/GA pendant l’approche avaient déjà été signalés. L’enquête a permis de déterminer que 3 cas avaient été signalés. Dans chaque cas, l’équipage de conduite avait remarqué l’activation par inadvertance peu de temps après qu’elle se soit produite :
- La 1re fois, l’activation par inadvertance est survenue à environ 425 pieds au-dessus du sol; le PF a déconnecté l’automanette et a procédé à un atterrissage normal.
- La 2e fois, le PF a appuyé sur le bouton TO/GA au lieu du commutateur AT DISC pendant la courte finale, et l’aéronef a procédé à un atterrissage normal.
- La 3e fois est survenue à environ 500 pieds au-dessus du sol lorsqu’un premier officier en entraînement en ligne a enfoncé le commutateur TO/GA au lieu du commutateur AT DISCaprès s’être fait dire qu’une remise des gaz pourrait être nécessaire en raison de la distance qui le séparait de l’aéronef devant lui. L’équipage de conduite a amorcé une remise des gaz suivie d’une 2e approche avec atterrissage réussi.
Flair a classé les 3 événements comme présentant un faible risque, étant donné que le choix du mode par inadvertance a été identifié rapidement et que des mesures adéquates ont été prises pour poursuivre le vol en toute sécurité. Flair a fait remarquer que ses SOP sont conçues pour atténuer le risque en exigeant la désactivation de l’automanette en même temps que la désactivation du pilote automatique.
1.17.7.1.2 Défectuosité persistente de l’inverseur de poussée
L’enquête a permis de déterminer que le problème persistant avec l’inverseur de poussée gauche, qui a commencé en mai 2022, n’avait pas été consigné dans le SGS en tant que danger identifié pour l’analyse des risques, bien qu’il ait été signalé que le problème était connu et géré par le MCC de Flair en coordination avec les OMA sous-traitants. Les défectuosités de l’aéronef ne sont normalement pas saisies dans le SGS.
1.18 Renseignements supplémentaires
1.18.1 Transports Canada
1.18.1.1 Activités de surveillance
L’enquête s’est penchée sur les documents de surveillance de TC concernant Flair pour les 2 années précédant l’événement à l’étude. Au cours de ces 2 années, TC a effectué 1 inspection du processus (IP)Une inspection du processus est un « examen approfondi d’un processus utilisé par une entreprise pour produire un résultat afin de vérifier s’il fonctionne ». (Source : Transports Canada, Instruction visant le personnel (IP) SUR-001, Procédures de surveillance, édition no 06 [22 juin 2016], section 2.3.). prévue, 1 IP réactive et 1 inspection ciblée liée à l’atténuation des risques pendant la pandémie de COVID-19.
L’IP prévue a été réalisée en octobre 2020 et se limitait à la régulation opérationnelle, aux exigences en matière de sécurité de la cabine et à l’assurance de la qualité des OMA. Flair a été jugée conforme dans tous les domaines examinés au cours de l’IP.
L’IP réactive a été effectuée en mai 2022 et était liée à la surveillance de la sécurité et au temps de service de vol. Un plan de mesures correctives a été convenu en août 2022 et l’IP a été achevée le 21 décembre 2022.
Aucun document n’indiquait que le système de contrôle de maintenance de l’exploitant avait été examiné dans le cadre de la surveillance assurée par TC au cours de la période de 2 ans. La politique de planification de la surveillance de TC n’exige pas que les inspecteurs examinent des parties précises d’une exploitation.
Peu après l’événement, TC a effectué une IP réactive axée sur la régulation opérationnelle telle qu’elle s’appliquait à l’équipage de conduite au cours de la semaine précédant le vol à l’étude. L’IP de portée limitée n’a relevé aucune anomalie.
1.18.2 Facteurs humains
1.18.2.1 Gestion des ressources de l’équipage
La gestion des ressources de l’équipage (CRM) vise à réduire l’erreur humaine en aviation. Selon la définition couramment acceptée, la CRM désigne l’utilisation de toutes les ressources humaines, matérielles et informationnelles mises à la disposition de l’équipage de conduite pour assurer la sécurité et l’efficacité des opérations aériennes.
Des chercheurs ont recommandé que la formation en CRM se fonde sur la prémisse sous-jacente voulant que l’erreur humaine soit inévitable et qu’elle ne puisse être entièrement éliminée, et que la CRM soit utilisée comme [traduction] « un ensemble de mesures pour contrer l’erreur présentant trois lignes de défenseR.L. Helmreich, A.C. Merritt et J.A. Wilhelm, « The Evolution of Crew Resource Management Training in Commercial Aviation », University of Texas at Austin Human Factors Research Project 235 (1999). ».
intègre le développement de compétences techniques à la formation sur les communications et la coordination entre les membres de l’équipage, et [...] la gestion des risques opérationnels, en appliquant des concepts de gestion des menaces et des erreursTransports Canada, Circulaire d’information (CI) no 700-042 : Gestion des ressources de l’équipage (CRM), numéro 02 (14 mars 2020), section 2.3..
1.18.2.2 Gestion des menaces et des erreurs
La gestion des menaces et des erreurs (TEM) est maintenant considérée comme un élément clé d’une CRM efficace. Le cadre de TEM a plusieurs applications potentielles, notamment la gestion de la sécurité organisationnelle et les évaluations des risques par les équipages de conduite.
Les principes clés de la TEM sont la prévision, la reconnaissance et la correction des menaces et des erreurs. La TEM préconise l’analyse attentive des dangers potentiels et la prise des mesures qui s’imposent pour éviter, neutraliser ou atténuer les menaces et les erreurs avant qu’elles ne mènent à un état indésirable de l’aéronef.
Les équipages de conduite peuvent neutraliser une erreur en l’identifiant et en la corrigeant, aggraver une erreur en commettant une autre erreur par la suite, ou n’avoir aucun effet sur l’erreur en ne la détectant pas ou en n’en tenant pas compteOrganisation de l’aviation civile internationale (OACI), document no 9803, Line Operation Safety Audit (LOSA), première édition (2002), p. 2-4..
Le modèle de TEM définit 5 types d’erreurs :Ibid., p. 2-3.
- les erreurs de non-conformité intentionnelle (écarts par rapport aux SOP);
- les erreurs de procédure (ratés, manquements dans l’application des procédures);
- les erreurs de communication (l’information est incorrectement communiquée ou interprétée);
- les erreurs de compétence (manque d’habileté et de connaissances pour gérer l’aéronef);
- les erreurs de décision opérationnelle (la décision prise augmente le risque).
La gestion des erreurs dans le poste de pilotage exige de faire preuve de vigilance, d’assurance et de constamment remettre tout en question. Bien que les menaces et les erreurs soient communes dans les opérations aériennes, elles portent rarement à des conséquences importantes parce qu’elles sont gérées efficacement par l’équipage.
Lorsqu’on gère les erreurs [traduction] :
quel que soit le type d’erreur, l’effet d’une erreur sur la sécurité varie selon que l’équipage de conduite détecte ou non l’erreur et y réagit avant qu’elle ne conduise à un état indésirable de l’aéronef et à un résultat potentiellement dangereux.C’est pourquoi l’un des objectifs de la TEM est de comprendre la gestion des erreurs (c’est-à-dire, la détection et la réponse), plutôt que de se concentrer uniquement sur la causalité des erreurs (c’est-à-dire, la causalité et la commission)D. Maurino, « Threat and Error Management (TEM) », présenté lors du séminaire sur la sécurité aérienne canadienne, Vancouver (Colombie-Britannique) (avril 2005)..
1.18.2.3 Formation sur la gestion des ressources de l’équipage
Le paragraphe 725.124(39) des NSAC oblige les exploitants d’entreprises de transport aérien assujettis à la sous-partie 705 du RAC à offrir à tous leurs membres d’équipage (équipage de conduite, agents de bord, régulateurs de vol/préposés au suivi des vols, équipage au sol et personnel de la maintenance) une formation initiale et récurrente annuelle en CRM. La formation initiale en CRM doit couvrir les sujets suivants :
(i) la gestion des menaces et des erreurs;
(iii) la conscience de la situation;
(iv) la pression et le stress;
(vi) la gestion de la charge de travail;
(viii) le leadership et la cohésion d’une équipe;
(ix) la gestion de l’automatisation et de la technologie;
(x) une étude de cas pertinenteTransports Canada, Normes de service aérien commercial, paragraphe 725.124(39)..
1.18.2.4 Prise de décisions du pilote et conscience situationnelle
La prise de décisions en général est un processus cognitif qui consiste à déterminer et à choisir un plan d’action parmi plusieurs solutions de rechangeAmerican Psychological Association, APA Dictionary of Psychology, à l’adresse https://dictionary.apa.org (dernière consultation le 22 janvier 2025).. Pour les pilotes, la prise de décisions est menée dans un environnement dynamique et passe par 4 étapes : recueillir l’information, traiter l’information, prendre des décisions et mettre en œuvre les décisions.
La conscience situationnelle fait partie intégrante de la prise de décisions du pilote. Les pilotes doivent comprendre les éléments pertinents en jeu, en saisir l’importance et être capables de prévoir l’état futur de ces élémentsM.R. Endsley, « Design and evaluation for situation awareness enhancement », dans Proceedings of the Human Factors Society: 32nd Annual Meeting (Santa Monica [Californie] : 1988), p. 97 à 101..
1.18.2.5 Modèles mentaux et conscience situationnelle communs
Les membres d’équipage de conduite doivent avoir une conscience situationnelle communeM.R. Endsley, « Toward a theory of situation awareness in dynamic systems », dans Human Factors, volume 37, numéro 1 (1995), p. 32 à 64.,E. Salas, C. Prince, D.P. Baker et L. Shrestha, « Situation Awareness in Team Performance: Implications for Measurement and Training », dans Human Factors, volume 37, numéro 1 (1995), p. 123 à 136.; autrement dit, la connaissance de la situation qu’a chaque pilote est compatible avec celle de l’autre pilote. Avec une compréhension commune, les équipages de conduite peuvent prévoir et coordonner efficacement leurs actions et les exécuter de façon efficace et sécuritaire pour gérer les menaces.
Les SOP et les listes de vérification sont des sources d’information cruciales qui offrent aux pilotes des lignes directrices d’exploitation générale d’un aéronef. Elles aident les pilotes à prendre des décisions et à établir des modèles mentaux communs en leur fournissant des solutions prédéterminées et efficaces à diverses situations tout en tenant compte des facteurs de risque qui peuvent ne pas être évidents pour un pilote pendant les opérations normales ou dans une situation anormale ou d’urgence.
1.18.2.6 Adaptations (écarts par rapport aux procédures d’exploitation normalisées)
Les adaptations découlent souvent du fait de mal comprendre l’objet de la règle ou de la procédure, de ne pas prévoir les conséquences potentielles d’une dérogation à la règle ou à la procédure, ou de croire que le travail peut être accompli plus efficacement par une adaptation. Les adaptations peuvent être des pratiques systémiques qui ne sont pas propres à une personne ou à un équipage en particulier.
Même si les entreprises prescrivent des politiques et des SOP dans le but de fixer des limites sécuritaires pour les opérations, les personnes peuvent parfois prendre la décision de ne pas respecter ces limites. Lorsque ces décisions sont répétées au fil du temps, cette dérive entraîne des adaptations des procédures elles-mêmes et des écarts par rapport aux limites prescrites, ce qui se traduit par des pratiques dangereusesJ. Rasmussen, « Risk management in a dynamic society: a modeling problem », dans Safety Science, volume 27, numéro 2/3 (1997), p. 183 à 213..
S’il n’y a pas d’intervention, les membres d’équipage se communiquent entre eux les adaptations qui ont du succès et celles-ci se répandent dans toute la compagnie. Ces adaptations ont peu de chances d’être reconnues comme des écarts par les membres du groupe qui les emploie. Les adaptations deviennent peu à peu un comportement normal, et il est peu probable que le risque qui leur est associé soit reconnu, particulièrement lorsqu’il n’y a pas de conséquences néfastesS. Dekker, Drift into Failure (Ashgate Publishing, 2011), p. 111..
1.18.2.7 Performance fondée sur les habiletés (ratés dans l’application des procédures)
Il existe 3 façons générales de classifier la performance humaine du point de vue du traitement de l’information : la performance fondée sur les habiletés, la performance fondée sur les règles et la performance fondée sur les connaissancesJ. Rasmussen, « Skills, Rules, and Knowledge; Signals, Signs and Symbols, and Other Distinctions in Human Performance Models », dans IEEE Transactions on Systems, Man, and Cybernetics, volume SMC-13, numéro 3 (mai/juin 1993), p. 257 à 266..
La performance fondée sur les habiletés est observée dans des situations familières et des tâches qui nécessitent très peu d’attention pour être gérées. En général, ces tâches sont relativement routinières, prévisibles et effectuées souvent.
L’avantage de la performance fondée sur les habiletés est qu’elle est exécutée très rapidement et nécessite très peu d’attention. Elle permet de libérer des ressources de traitement de l’information qui peuvent être appliquées à autre chose. Toutefois, ces avantages la rendent vulnérable aux ratés lorsque l’exécution d’une routine automatique est interrompue ou perturbée et cette interruption ou perturbation passe inaperçue.
Les ratés se produisent lorsqu’une personne a l’intention d’accomplir une action particulière, mais qu’elle effectue par inadvertance une action différente et involontaire.Les ratés découlant de défaillances attentionnelles sont susceptibles de se produire lorsque des séquences d’actions automatiques ou habituelles prennent le dessusJ. Reason, Human Error (Cambridge : Cambridge University Press, 1990), p. 68 à 72.. La fatigue peut augmenter la probabilité de ratés en réduisant les capacités attentionnelles, rendant ainsi plus difficile la détection et la correction des actions involontaires, en particulier lors de tâches routinières.
1.18.2.8 L’effet d’amorçage
L’effet d’amorçage se produit lorsqu’un stimulus dans l’environnement affecte la réponse ultérieure en activant des constructions mentales sans que la personne en soit conscienteE. Weingarten, Q. Chen, M. McAdams et al., « From primed concepts to action: A meta-analysis of the behavioral effects of incidentally presented words », Psychological bulletin, vol. 142, no 5 (2016), p. 476.. L’effet d’amorçage se fait par le biais d’un processus en 3 étapesC. Loersch et B.K. Payne, « Demystifying priming », dans Current Opinion in Psychology, vol. 12 (décembre 2016), p. 32 à 36..
Premièrement, un stimulus est perçu dans l’environnement. Ce stimulus peut être visuel, auditif ou conceptuel.
Troisièmement, l’information est rapidement activée dans la mémoire et affecte par la suite le comportement ou la réponse de la personne. Cette influence peut se manifester de diverses manières, par exemple en modifiant la prise de décision, le jugement ou les actions de la personne, ce qui se fait souvent de manière inconsciente.
1.18.2.9 Conception des commandes et des affichages
La conception et la disposition des commandes et des affichages visent à établir un équilibre entre la fonctionnalité, l’efficacité, la facilité d’utilisation et la sécurité. La disposition des commandes dans le poste de pilotage tient compte de leur importance, de leur fréquence d’utilisation, de leur séquence d’utilisation ou du regroupement par fonctions.
Les conséquences de l’activation ou du déplacement involontaire d’un contrôle peuvent créer de la confusion ou de la distraction. Les mesures de conception qui visent à réduire la probabilité d’activation ou de déplacement non intentionnels sont les suivantes :
- des repères visuels et tactiles;
- un espacement adéquat entre les commandes;
- l’emplacement et l’orientation des commandes;
- une résistance au contrôle suffisante;
- la mise en séquence des opérations;
- les mécanismes de verrouillage ou d’enclenchement;
- la restriction de l’accès au moyen d’une barrière physique ou d’un renfoncement, ou alors par le positionnement des commandes hors de la portée normale du piloteD. Harris, Human Performance on the Flight Deck (Ashgate Publishing, Ltd., 1er octobre 2012), p. 97 et 98.,P.M. Burcham, US Army Research Laboratory, ARL-MR-337, Inadvertent Activation of Controls, Literature Search (octobre 1996)..
La disposition des affichages du poste de pilotage est conçue de façon à améliorer la conscience situationnelle et l’efficacité tout en réduisant la charge de travail des pilotes. Cette disposition prend en compte plusieurs facteurs, y compris la facilité de détection et le caractère distinctif (saillance) des signaux, la priorisation de l’information en fonction de son importance et le regroupement intuitif des commandes et des affichages pour faciliter des réponses rapides et précisesFederal Aviation Administration (FAA), HF-STD-001, Human Factors Design Standard for Acquisition of Commercial-Off-The-Shelf Subsystems, Non-Developmental Items, and Developmental Systems (mai 2003), section 3.7.15 : Consider potential vigilance decrements, section 5.1 : Displays, section 6.3.2.10 : Arrangement by importance or frequency of use et section 6.1.1.3 : Arrangement and grouping..
Un autre aspect de la conception du poste de pilotage est la normalisation des emplacements des commandes et des commutateurs, ainsi que de leurs indicateurs respectifs. La standardisation vise à améliorer l’utilisabilité et à réduire le risque d’erreur en fournissant une interface cohérente aux pilotesIbid., section 2.4 : Standardization et section 2.5 : Safety.. Cependant, il peut être difficile d’assurer l’uniformité en raison des exigences et des contraintes propres à chaque types d’aéronefs. Même parmi les différents modèles d’un même fabricant, la position et la fonctionnalité de l’automanette et des commandes TO/GA varient.
1.18.3 Liste de surveillance du BST
Les sorties en bout de piste sont un problème figurant sur la Liste de surveillance 2022. Bien que l’événement ait entraîné une sortie en bout de piste, les occupants n’ont pas été blessés et l’aéronef a subi des dommages minimes. La pente et la taille de la zone herbeuse au-delà de la RESA publiée pour la piste utilisée répondaient essentiellement à la norme de l’OACI pour les RESA, même si elle n’était pas officiellement classée comme telle.Cet événement permet de mettre en lumière l’efficacité des RESA pour atténuer les risques associés aux sorties en bout de piste.
MESURES À PRENDRE : Sorties en bout de piste
L’enjeu des sorties en bout de piste demeurera sur la Liste de surveillance du BST jusqu’à ce que
La gestion de la fatigue dans le transport aérien est un problème figurant sur la Liste de surveillance 2022. Comme le démontre l’événement à l’étude, même si les exploitants aériens se conforment à la réglementation en vigueur, des vols ou des attributions de tâches nécessitant des périodes d’éveil prolongé peuvent augmenter la probabilité de fatigue chez les pilotes.
En décembre 2018, TC a publié de nouvelles exigences normatives concernant la gestion de la fatigue des équipages de conduite dans la Partie II de la Gazette du Canada. La réglementation avait une période de mise en œuvre échelonnée. Les exploitants aériens assujettis à la sous-partie 705 du RAC avaient jusqu’à décembre 2020 pour se conformer aux nouvelles exigences.
1.18.4 Événements similaires
Un examen des rapports d’enquête portant sur des accidents antérieurs indique que l’activation par inadvertance du commutateur TO/GA est l’une des causes d’accidents et d’incidents remontant aussi loin que les années 1990National Transportation Safety Board of the United States, Accident Report NTSB/AAR-20/02 PB2020-101004: Atlas Air Flight 3591, 23 février 2019; Aircraft Accident Investigation Commission of Japan, Aircraft Accident Investigation Report: China Airlines Flight 140, 26 avril 1994; Accident Investigation Board, Finland, Major Accident Report Nr 2/1994, 3 novembre 1994; Australian Transport Safety Bureau, Aviation Occurrence Investigation AO-2016-042: Engine nacelle strike and continued operation involving Boeing 737-8FE, YH-YIW, 23 avril 2016; Bureau de la sécurité des transports du Canada, Rapport d’enquête aéronautique A05A0161 : Contact entre l’aile et la piste à l’atterrissage, 25 décembre 2005., notamment un événement de 2005 ayant fait l’objet d’une enquête par le BST, de même que des renseignements recueillis après un accident de Boeing 737-800 survenu en 2018 à l’aéroport de Trabzon (LTCG), en Turquie, pour lequel aucun rapport public n’a été publiéVol 8622 de Pegasus,13 janvier 2018..
Un rapport de 2005 du système d’évaluation, d’analyse et d’échange de données sur les tendances en matière de sécurité de l’Association du Transport Aérien International portant sur les erreurs d’automatisation a révélé que 45 % des incidents de traitement automatisé signalésLe traitement automatisé s’entend de l’utilisation de systèmes automatisés dans des opérations aériennes. se sont produits au cours de la phase d’approche.
Parmi ces incidents de traitement automatisés, plusieurs rapports d’événements ont fait mention d’erreurs de traitement spécifiques, parmi lesquelles les erreurs de sélection étaient une préoccupation majeure. Ces erreurs de sélection comprenaient [traduction] « l’activation involontaire de la fonction TO/GA [décollage/remise des gaz] en essayant de désactiver les automanettes pendant la phase d’approche »IATA Safety Trend Evaluation, Analysis and Data Exchange System (STEADES), Automation Errors, numéro 4, (2005)..
2.0 Analyse
Cette analyse portera sur la séquence des événements qui ont mené à la sortie en bout de piste, en commençant par les facteurs opérationnels, y compris les procédures d’exploitation normalisées (SOP), la fatigue et les affectations de l’équipage. Elle se concentrera ensuite sur les commandes et les affichages de l’aéronef, tels que l’état et les indicateurs du système, la logique du système, l’utilisation d’un seul inverseur de poussée et le freinage. Enfin, l’analyse abordera le traitement des rapports de défectuosités de l’aéronef.
2.1 Facteurs opérationnels
2.1.1 Procédures d’exploitation normalisées
Le commandant de bord, qui était le pilote aux commandes, a décidé de laisser l’automanette activée après avoir désactivé le pilote automatique. Cette adaptation aux SOP était probablement fondée sur l’expérience de vol antérieure du commandant de bord avec d’autres exploitants, chez lesquels il s’agissait d’une procédure normale. Le fait de laisser l’automanette activée jusqu’à un moment du vol où les 2 membres de l’équipage de conduite étaient concentrés sur l’atterrissage de l’aéronef a rendu difficile pour chacun des pilotes de confirmer visuellement si l’automanette avait été désactivée.
2.1.2 Fatigue et effet d’amorçage
L’enquête a permis de déterminer que 4 facteurs de risque de fatigue étaient présents à des niveaux suffisants pour avoir une incidence sur les fonctions cognitives du commandant de bord. Le fait de piloter l’aéronef après une période d’éveil de près de 18 heures et à la fin d’un creux circadien a diminué l’attention et la vigilance du commandant de bord. Les perturbations chroniques et aiguës du sommeil du commandant de bord dans les jours précédents ont aggravé son niveau de fatigue.
Le fait d’appuyer par inadvertance sur le commutateur de décollage/remise des gaz (TO/GA) au lieu du commutateur de désactivation de l’automanette – un raté –est attribuable aux effets néfastes de la fatigue sur les fonctions cognitives du commandant de bord, ce qui a rendu plus difficile pour lui de rester concentré et d’exécuter ses tâches avec précision. Ce changement de mode par inadvertance dans le pilote automatique/directeur de vol n’a pas été détecté par l’équipage de conduite.
Pour réduire la probabilité de ratés et maintenir la précision et la sécurité dans les opérations aériennes, il est essentiel de mettre en œuvre une combinaison de moyens de défense administratifs, y compris le respect des procédures normalisées, la gestion de la fatigue et la formation sur la gestion des ressources de l’équipage et des menaces et des erreurs. Des moyens de défense physiques sont également nécessaires, comme un affichage et des commandes conçus en tenant compte des facteurs ergonomiques dans le poste de pilotage ainsi qu’une rétroaction sensorielle saillante (indicateurs sonores et visuels).
Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
Le commandant de bord avait accumulé un important déficit de sommeil au cours de la semaine précédant l’événement et pilotait l’aéronef après une période d’éveil de près de 18 heures, à la fin d’un creux circadien. Par conséquent, au moment de l’événement, le niveau de fatigue du commandant de bord réduisait son attention et sa vigilance, augmentant ainsi la probabilité d’un raté.
Peu avant l’atterrissage, le commandant de bord avait l’intention d’appuyer sur le commutateur de désactivation de l’automanette, mais il a plutôt appuyé sur le commutateur TO/GA par inadvertance. Ce raté est probablement attribuable en partie au niveau de fatigue du commandant de bord et au fait qu’il était prédisposé à appuyer sur le commutateur TO/GA, car il s’était préparé mentalement à une remise des gaz plus tôt dans l’approche.
2.1.3 Aptitude au travail
Le fait d’être réserviste se traduit par un horaire moins prévisible avec moins de préavis quant aux destinations prévues et à la durée de l’affectation. Il peut alors être plus difficile pour les membres d’équipage de se reposer suffisamment pour les vols qu’ils devront effectuer. Il incombe aux pilotes de se reposer suffisamment pendant leur temps hors service ou leurs périodes de repos désignées pour être prêts pour une période de service, en particulier lorsqu’ils sont réservistes. De plus, la détermination de l’aptitude au travail est subjective étant donné que la quantité de repos nécessaire variera en fonction de chaque personne.
2.2 Systèmes de bord
La gestion de cette complexité, surtout lorsque l’équipage de conduite se concentrait principalement sur le maintien de la trajectoire latérale de l’aéronef pendant l’atterrissage, est devenue difficile. Ces problèmes ont été exacerbés par l’inverseur de poussée gauche qui était désactivé. Cette complexité a accru le risque de confusion, de distractions et d’erreurs supplémentaires.
2.2.1 État du système et indicateurs
Les écrans et les indicateurs de rétroaction liés au pilote automatique et à l’automanette jouent un rôle important dans la conscience situationnelle de l’équipage de conduite. Bien que ces systèmes aient des objectifs et des fonctions similaires, ils diffèrent dans la façon dont les pilotes interagissent avec eux.
Cette variation de signalisation entre 2 commandes automatiques de vol peut être une source de confusion pour les équipages de conduite et ainsi entraîner une réduction de la conscience situationnelle en ce qui concerne l’état de ces systèmes. Il peut être particulièrement difficile de se fier à l’absence d’un indicateur pour confirmer l’état du système dans un environnement au sein duquel la charge de travail est lourde.
En l’occurrence, lorsque le commutateur TO/GA a été enfoncé de manière involontaire, l’automanette a tenté d’augmenter la poussée du moteur jusqu’à la poussée de remise des gaz. Les principales indications visuelles que cela s’était produit étaient l’affichage des lettres « TO/GA » sur le tableau annonciateur de mode (FMA) pour indiquer le mode d’automanette activé, ainsi que les signaux du directeur de vol indiquant qu’il fallait augmenter le tangage pour atteindre le taux de montée programmé du mode GA.
Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs
La sélection par inadvertance du commutateur TO/GA à 70 pieds au-dessus du sol s’est produite pendant une période de l’approche où l’équipage de conduite se concentrait principalement sur ce qui se passait à l’extérieur du poste de pilotage. Par conséquent, étant donné que les indications de la sélection par inadvertance du commutateur TO/GA n’étaient pas suffisamment saillantes pour alerter l’équipage de la situation, les indications de changement de mode sur le tableau annonciateur de mode et sur l’écran de poussée moteur n’ont pas été remarquées par l’équipage de conduite.
2.2.2 Utilisation d’un seul inverseur de poussée
Après le toucher des roues, le PF a relâché les deux manettes de poussée pour saisir et actionner la manette d’inversion de poussée no 2 (droit). Étant donné que le PF ne maintenait plus la manette de poussée gauche au ralenti, l’automanette a fait avancer cette dernière vers la poussée de remise des gaz.
Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs
La manette d’inversion de poussée gauche avait été verrouillée en position « fermé » conformément à la liste d’équipement minimal (MEL). Lorsqu’il a sélectionné la manette d’inversion de poussée droite après le toucher des roues, le pilote a retiré sa main des manettes de poussée , ce qui a permis à la manette gauche d’avancer, à l’insu de l’équipage, comme l’avait commandé l’automanette.
En raison de la sélection du mode TO/GA, de nombreuses conditions qui, autrement, entraîneraient la désactivation automatique de l’automanette ont été bloquées. Aucun paramètre de désactivation de l’automanette n’est lié à l’utilisation des inverseurs de poussée, quel que soit le mode. Par conséquent, il a été possible pour l’automanette de commander la poussée pendant que l’équipage de conduite commandait l’inversion de poussée.
Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs
Même si l’aéronef était au sol et que l’inverseur de poussée droit était ouvert, l’automanette permettait un fonctionnement simultané de l’inverseur de poussée sur 1 moteur et de la poussée sur l’autre. Par conséquent, l’automanette a continué de commander les moteurs vers la poussée de remise des gaz jusqu’à ce qu’elle se désactive automatiquement quand l’aéronef a ralenti à moins de 80 nœuds.
2.2.3 Systèmes de freinage
L’équipage de conduite avait réglé le commutateur de freinage automatique à 3 et avait sélectionné les aérofreins automatiques pendant l’approche, conformément aux SOP de l’entreprise. L’équipage s’attendait donc à ce que l’aéronef décélère automatiquement après l’atterrissage. Toutefois, après le toucher des roues, lorsque l’automanette a fait avancer la manette de poussée gauche, ces 2 systèmes de décélération automatique ont été désactivés.
Lorsque des difficultés de manoeuvrabilité sont survenues peu après le toucher des roues en raison de la poussée asymétrique, l’équipage de conduite s’occupait de maintenir la maîtrise directionnelle et ne s’est pas rendu compte d’emblée que l’aéronef ne ralentissait pas comme prévu. Au moment où le freinage manuel maximal a été appliqué, il était peu probable que l’aéronef ait pu s’arrêter sur le dernier bout de piste.
Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs
Lorsque le commandant de bord a serré les freins au maximum, il restait 2500 pieds de piste et l’aéronef roulait à une vitesse sol de 115 nœuds sans aérofreins, avec l’un des moteurs produisant une poussée quasi maximale et l’autre, une inversion de poussée près du maximum. À cette vitesse et dans cette configuration, il ne restait pas suffisamment de piste pour immobiliser l’aéronef, et ce dernier a dépassé l’extrémité de la piste.
2.3 Contrôle des défectuosités
Une défectuosité liée à l’inverseur de poussée gauche a été signalée pour la première fois en mai 2022, soit plus de 6 mois avant que survienne l’événement. Au cours des mois qui ont suivi, il y a eu 22 autres signalements d’une défectuosité liée à l’inverseur de poussée, chacun d’eux offrant l’occasion de dépanner le problème. En dépit de ce fait, la défectuosité ne répondait pas à la définition réglementaire d’une défectuosité récurrente. Par conséquent, le logiciel de contrôle de maintenance de Flair ne l’a pas relevée.
Autre facteur de complication : 6 organismes de maintenance agréés (OMA), dont les services avaient été retenus par Flair pour effectuer la maintenance sur ses aéronefs, ont pris part au processus de dépannage. Les dossiers montrent qu’une partie des efforts de dépannage ont été réalisés plus d’une fois parce que ces OMA n’avaient pas obtenu accès aux résultats des efforts de dépannage précédents effectués par d’autres OMA.
Une procédure simple de réinitialisation avait été utilisée plusieurs fois avant l’événement pour effacer le message de défectuosité et permettre à l’aéronef de continuer à voler, même s’il était clair que le problème sous-jacent avec le système n’avait pas été réglé. Les premiers efforts de dépannage ont indiqué la cause probable du problème, mais une demande de pièces n’a pas été approuvée avant que près de 6 mois ne s’écoulent.
3.0 Faits établis
3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
Il s’agit des conditions, actes ou lacunes de sécurité qui ont causé l’événement ou y ont contribué.
- Le commandant de bord, qui était le pilote aux commandes, a laissé l’automanette activée après avoir désactivé le pilote automatique en raison d’une habitude formée lors d’expériences de vol antérieures lors desquelles la pratique était permise.
- Le commandant de bord avait accumulé un important déficit de sommeil au cours de la semaine précédant l’événement et pilotait l’aéronef après une période d’éveil de près de 18 heures, à la fin d’un creux circadien. Par conséquent, au moment de l’événement, le niveau de fatigue du commandant de bord réduisait son attention et sa vigilance, en plus d’augmenter la probabilité d’un raté.
- Peu avant l’atterrissage, le commandant de bord avait l’intention d’appuyer sur le commutateur de désactivation de l’automanette, mais il a plutôt appuyé sur le commutateur de décollage/remise des gaz par inadvertance. Ce raté est probablement attribuable en partie au niveau de fatigue du commandant de bord et au fait qu’il était prédisposé à appuyer sur le commutateur de décollage/remise des gaz, car il s’était préparé mentalement à une remise des gaz plus tôt dans l’approche.
- La sélection par inadvertance du commutateur de décollage/remise des gaz à 70 pieds au-dessus du sol s’est produite pendant une période de l’approche où l’équipage de conduite se concentrait principalement sur ce qui se passait à l’extérieur du poste de pilotage. Par conséquent, étant donné que les indications de la sélection par inadvertance du commutateur de décollage/remise des gaz n’étaient pas suffisamment saillantes pour alerter l’équipage de la situation, les indications de changement de mode sur le tableau annonciateur de mode et sur l’écran de poussée moteur n’ont pas été remarquées par l’équipage de conduite.
- La manette d’inversion de poussée gauche avait été verrouillée en position « fermé » conformément à la liste d’équipement minimal. Lorsqu’il a sélectionné la manette d’inversion de poussée droite après le toucher des roues, le pilote a retiré sa main des manettes de poussée, ce qui a permis à la manette gauche d’avancer, à l’insu de l’équipage, comme l’avait commandé l’automanette.
- Même si l’aéronef était au sol et que l’inverseur de poussée droit était ouvert, l’automanette permettait un fonctionnement simultané de l’inverseur de poussée sur 1 moteur et de la poussée sur l’autre. Par conséquent, l’automanette a continué de commander les moteurs vers la poussée de remise des gaz jusqu’à ce qu’elle se désactive automatiquement quand l’aéronef a ralenti à moins de 80 nœuds.
- L’avancée de la manette de poussée gauche a fait en sorte que les aérofreins, qui s’étaient brièvement déployés, se sont rétractés et ont entraîné la désactivation de la sélection du circuit de freinage automatique, ce qui a réduit considérablement la décélération pendant la course à l’atterrissage.
- Lorsque le commandant de bord a serré les freins au maximum, il restait 2500 pieds de piste, et l’aéronef roulait à une vitesse sol de 115 nœuds sans aérofreins, avec l’un des moteurs produisant une poussée quasi maximale et l’autre, une inversion de poussée près du maximum. À cette vitesse et dans cette configuration, il ne restait pas suffisamment de piste pour immobiliser l’aéronef, et ce dernier a dépassé l’extrémité de la piste.
3.2 Faits établis quant aux risques
- Si les pilotes ne surveillent pas leur repos pour évaluer s’ils ont cumulé un déficit de sommeil, il y a un risque accru que la fatigue ne soit ni détectée, ni atténuée.
- Si le problème sous-jacent derrière une défectuosité persistante liées à la maintenance n’est pas réglé en temps opportun, il y a un risque qu’il s’aggrave, entraînant de lourdes conséquences.
3.3 Autres faits établis
Ces éléments pourraient permettre d’améliorer la sécurité, de régler une controverse ou de fournir un point de données pour de futures études sur la sécurité.
4.0 Mesures de sécurité
4.1 Mesures de sécurité prises
4.1.1 Flair Airlines Ltd.
Flair Airlines Ltd. a ajusté la sous-section Standard Callouts (« annonces standard ») dans le volume 1 de son manuel d’exploitation de l’équipage de conduite de B737-800. Les annonces « AUTOPILOT DISENGAGED » (“Pilotage automatique déactivé ») et « AUTOTHROTTLE DISENGAGED » (« automanette désactivée ») ont été remplacées par l’annonce « MANUAL FLIGHT » (« vol manuel ») pour appuyer la procédure existante, qui exige que le pilote automatique et l’automanette soient déactivés en même temps.
Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le 18 décembre 2024. Le rapport a été officiellement publié le 13 février 2025.
Annexes
Annexe A – Horaire travail-repos
Heure de début de service | Heure de fin de service | ||
---|---|---|---|
Dimanche 20 novembre 2022 | Sommeil d’environ 9 heures | ||
Lundi 21 novembre 2022 | Sommeil d’environ 9 heures | ||
Mardi 22 novembre 2022 | Sommeil d’environ 9 heures | ||
Mercredi 23 novembre 2022 | Sommeil d’environ 9 heures | ||
Jeudi 24 novembre 2022 | Sommeil d’environ 11 heures | ||
Vendredi 25 novembre 2022 | S.O. |
Annexe B – Définitions des facteurs de risque de fatigue
- Perturbations aiguës du sommeil — Selon le stade où elle se produit, la perturbation du sommeil peut affecter le fonctionnement physiologique ou le fonctionnement cognitif, en plus d’augmenter le risque de fatigue. Le risque s’accroît lorsque la qualité ou la quantité de sommeil a été réduite au cours des 3 jours précédents.
- Perturbation chronique du sommeil — Toute perturbation de la quantité ou de la qualité de sommeil se prolongeant sur des périodes supérieures à 3 jours consécutifs est considérée comme une perturbation chronique du sommeil. En comparant la quantité de sommeil acquise à la quantité de sommeil requise pour une période d’éveil donnée, il est possible d’estimer le déficit de sommeil d’une personne.
- Éveil continu ou prolongé — Le fait d’être éveillé pendant plus de 17 heures augmente le risque de fatigue.
- Effets du rythme circadien — Changer les habitudes d’éveil et de sommeil trop rapidement, ou travailler à un moment de la journée où notre corps s’attend à dormir, peut causer la désynchronisation du rythme circadien, ce qui peut entraîner une performance inadéquate.
- Troubles du sommeil — De nombreux troubles entraînent des niveaux de fatigue plus élevés que la normale s’ils ne sont pas traités ou s’ils ne sont pas gérés correctement. Trois des troubles du sommeil les plus courants sont l’insomnie, l’apnée obstructive du sommeil et le trouble périodique du mouvement des membres.
- Problèmes de santé, troubles psychologiques, maladies ou drogues — La capacité d’une personne à obtenir un sommeil réparateur peut être influencée par des facteurs individuels, y compris certaines maladies, la consommation de drogues ou de médicaments qui affectent le sommeil ou entraînent de la somnolence, ou des caractéristiques telles que la vivacité en matinée ou en soirée ou la capacité d’une personne à faire une sieste.