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Rapport d'enquête aéronautique A11H0001

Descente inopinée au décollage
du Sikorsky S-92A (hélicoptère), C-GQCH
exploité par Cougar Helicopters Inc.
à 200 nm à l'est de St. John's (Terre-Neuve-et-Labrador
le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 23 juillet 2011, à 14 h 57, heure avancée de Terre-Neuve, un hélicoptère Sikorsky S-92A (immatriculé C-GQCH et portant le numéro de série 920074) exploité par Cougar Helicopters sous l’indicatif Cougar 851 décolle du navire de production, stockage et déchargement en mer Sea Rose, avec 5 passagers et 2 membres d’équipage à son bord, à destination de l’aéroport international de St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador). Après l’activation du mode remise des gaz des commandes automatiques de vol durant le décollage, l’assiette en tangage de l’hélicoptère passe à environ 23° en cabré dans des conditions météorologiques de vol aux instruments. Il se produit une perte rapide de vitesse anémométrique. Après avoir atteint une altitude maximale de 541 pieds au-dessus du niveau de la mer (534 pieds altitude radar), l’hélicoptère commence à descendre vers l’eau en assiette de cabré à basse vitesse anémométrique. La descente est arrêtée 38 pieds au-dessus de la surface de l’eau. Après quelque 5 secondes de vol stationnaire, l’hélicoptère s’envole et retourne à St. John’s. Les limites de transmission de l’hélicoptère ont été dépassées pendant le rétablissement. L’hélicoptère ne subit aucun dommage et il n’y a aucun blessé.

1.0 Renseignements de base

1.1 Déroulement du vol

Le vol 851 de Cougar Helicopters Inc. (Cougar Helicopters) a décollé à 12 h 41Footnote 1 de l’aéroport international de St. John’s (CYYT) (Terre-Neuve-et-Labrador) selon un plan de vol aux instruments (IFR) avec escales prévues à la plateforme pétrolière Global Santa Fe et au navire de production, stockage et déchargement en mer Sea RoseFootnote 2. Il s’agissait de transporter les travailleurs des plateformes pétrolières à destination et en provenance de ces installations, situées à environ 200 milles marins (nm) à l’est de CYYT. Le vol en question était effectué conformément à la sous-partie 704 du Règlement de l’aviation canadien (RAC).

Le commandant, qui occupait le siège de droite, était le pilote aux commandes (PF) pour la première étape du vol de CYYT jusqu’au moment précédant l’approche du Global Santa Fe. Le commandant a passé les commandes au premier officier, qui a suivi une approche aux instruments sur le Global Santa Fe et a effectué l’atterrissage sur la plateforme. Sur le Global Santa Fe, 4 passagers sont descendus de l’hélicoptère et 1 passager est monté à bord. À partir du pont du Global Santa Fe, l’équipage de conduite pouvaapercevoir le Sea Rose, à quelque 3,4 nmFootnote 3.

Le premier officier a repris ses tâches de PF pour le décollage et a effectué un départ normal d’une installation de forage en utilisant le mode remise des gaz (GA) du pilote automatique. Un départ normal d’une installation de forage consiste en un départ vertical jusqu’à une hauteur de 30 pieds au-dessus du pont, suivi de l’adoption d’une assiette de 10° en piqué pour accélérer à la vitesse de sécurité au décollage (V2)Footnote 4. À mesure que la vitesse anémométrique de l’hélicoptère approche V2, le pilote augmente l’assiette de l’hélicoptère à environ 5° en cabré et continue de monter à la V2. En même temps, le pilote surveillant (PM) vérifie si l’hélicoptère maintient un taux de montée positif, puis rentre le train d’atterrissage. À ce stade, le PF active les modes de pilote automatique désirés, comme le mode GA du pilote automatique ou celui réglé sur la vitesse verticale (VS).

Une fois l’hélicoptère en palier à 500 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl), le commandant a pris les commandes. À cette altitude, les membres de l’équipage de conduite pouvaient voir à travers la couche de nuages de 100 à 150 pieds d’épaisseur et apercevoir le Sea Rose et le navire de secours, à ­0,5 nm sous le vent du Sea Rose. En fonction des conditions de vol, le commandant a choisi d’effectuer une approche et un atterrissage à vue sur la plateforme du Sea Rose, qui est à 120 pieds au-dessus de la surface de l’océan.

Après un atterrissage et un avitaillement moteur en marcheFootnote 5 sur le Sea Rose, conformément aux procédures d’utilisation normalisées (SOP) pour hélicoptères SK-92 de Cougar Helicopters, 5 passagersFootnote 6 sont montés à bord de l’hélicoptère pour le vol de retour à CYYT.

Le commandant est demeuré aux commandes pour le départ. Après avoir terminé un exposé de départ complet, le commandant a appuyé sur le bouton de débrayage du compensateur d’effort cycliqueFootnote 7 (figure 1) et à 14 h 57 min 27 s, a mis l’hélicoptère en vol stationnaire 10 pieds au-dessus de l’hélisurface. L’hélicoptère a ensuite été tourné vers la gauche afin de pouvoir effectuer un départ au vent s’éloignant du Sea Rose. Le levier de collectif a ensuite été augmenté pour amorcer une montée verticale en conformité avec la procédure de décollage d’une installation de forage de catégorie A de Cougar Helicopters.

Figure 1. Manche de pas cyclique du S-92A
Figure 1. Manche de pas cyclique du S-92A

Cliquer sur l’image pour l’agrandir.

Pendant que l’hélicoptère montait à la verticale vers le point critique de décisionFootnote 8, son assiette en tangage était d’environ 8° en cabré. Une fois passé le point critique de décision, le commandant a déplacé le cyclique rapidement vers l’avantFootnote 9, et a adopté une assiette de 12° en piqué pour l’accélération initialeFootnote 10. Ce changement d’assiette initial a pris environ 3 secondes. Après avoir initialement atteint 12° en piqué, l’assiette en tangage de l’hélicoptère s’est stabilisée à 9° en piqué. Le premier officier a avisé le commandant de la vitesse anémométrique et a ensuite annoncé la V2, ce qui correspondait à une vitesse anémométrique de 36 nœuds (KIAS). À mesure que la vitesse anémométrique approchait de la V2, l’hélicoptère est entré dans un banc de nuages dont la base était à 200 pieds asl. Conformément aux SOP de Cougar Helicopters, le commandant a indiqué qu’il procédait à la mise en palier, et il a déplacé le cyclique vers l’arrière pour établir l’assiette en tangage de montée initiale normale (approximativement 5° en cabré). L’hélicoptère a continué de monter et la vitesse anémométrique et la vitesse verticale ont toutes deux continué d’augmenter. Quelques secondes plus tard, alors que l’hélicoptère passait 55 KIAS en accélération, le premier officier a indiqué que le taux de montée était positif (600-700 pieds par minute [pi/min]).

Conformément aux SOP de Cougar Helicopters, le commandant a demandé au premier officier de rentrer le train et de régler le commutateur du système de flottaison à la position sûre. À 14 h 58, le commandant a relâché le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique. À 14 h 58 min 4 s, le commandant a activé le mode GA à une vitesse anémométrique de 64 KIAS. À ce stade, l’assiette en tangage n’était pas stable et elle passait 2,4° en cabré en augmentant. Le cap de l’hélicoptère à ce moment était de 073° magnétique (M), et la vitesse verticale était de 1000 pi/min en montée, et elle augmentait. À mesure que l’hélicoptère prenait de l’altitude, la lumière ambiante s’intensifiait de façon perceptible à l’intérieur de l’hélicoptère, ce qui a été interprété comme signifiant que l’hélicoptère serait bientôt dans un ciel dégagé au-dessus du banc de nuages. Immédiatement après l’activation du mode GA, le curseur de vitesse anémométrique s’est déplacé à 80 nœudsFootnote 11, le curseur de l’indicateur de vitesse verticale (VSI) s’est réglé à 750 pi/min et les barres directrices magenta étaient affichées aux 2 écrans de vol principaux (PFD). Ni l’un ni l’autre des pilotes n’a remarqué si les paramètres de tangage et de collectif du pilote automatique appropriés figuraient dans la partie supérieure des PFD.

Le commandant a ensuite relâché la pression manuelle exercée sur le cyclique et a augmenté la référence de vitesse anémométrique à 120 KIAS à l’aide du poussoir de compensateur des commandes automatiques de vol (AFCS) sur le cyclique. Pendant que le commandant augmentait la référence de vitesse anémométrique, l’assiette en tangage de l’hélicoptère continuait d’augmenter; elle dépassait 9° en cabré. La vitesse anémométrique, qui a atteint un maximum de 67 KIAS à 14 h 58 min 6 s, a commencé à chuter rapidement. Le taux de montée, qui a atteint un maximum de 1500 pi/min dans la seconde suivant l’activation du mode GA, a aussi commencé à chuter. À mesure que la vitesse anémométrique poursuivait sa chute à 56 KIAS, avec l’assiette en tangage brièvement stabilisée à 9,5° en cabré, le commandant a appuyé momentanément sur le bouton de débrayage du compensateur d’effort et a tiré brusquement le cyclique vers l’arrièreFootnote 12. Lorsque le commandant a relâché le bouton de débrayage du compensateur d’effort, la référence de vitesse anémométrique a été remise à 54 KIAS. À 14 h 58 min 13 s, la vitesse anémométrique a chuté sous 50 nœuds, ce qui est la vitesse minimale de vol aux instruments (Vmini) pour le S-92A, et le pilote automatique a été automatiquement découplé. Le découplage du pilote automatique a déclenché un avertissement principal, un avertissement de non-fonctionnement du directeur de vol (FD) et une alerte sonore de découplageFootnote 13.

Une fois le pilote automatique découplé, l’inclinaison longitudinale de l’hélicoptère est rapidement passée à 15° en cabré, et a ensuite continué d’augmenter plus lentement. Huit secondes plus tard, à 14 h 58 min 21 s, à une assiette de 23° en cabré, l’hélicoptère a atteint une altitude maximale de 541 pieds asl (534 pieds altitude radar) et il a ensuite commencé à descendre avec un mouvement de lacet à droite, à une vitesse anémométrique de 33 nœuds, qui diminuait. À ce moment, les 2 membres de l’équipage de conduite étaient concentrés sur les instruments de vol et ne regardaient pas à l’extérieur.

Alors que l’aéronef commençait à descendre dans une assiette de cabré à basse vitesse anémométrique, le premier officier s’est rendu compte de l’écart par rapport au profil type de vol et a commencé à faire des annonces d’écart d’assiette et de vitesse anémométrique. Le commandant, dont l’attention était concentrée sur l’indicateur d’assiette, a accusé réception de ces annonces d’écart et a indiqué que des mesures correctives seraient prises. À 14 h 58 min 28 s, alors que l’hélicoptère descendait sous 454 pieds asl (437 pieds altitude radar), le système d’avertissement de proximité du sol amélioré (EGPWS) de l’hélicoptère a déclenché une alerte sonore automatisée « Don’t Sink » pour les pilotes, qui a retenti pendant 11 secondes. Le taux de descente à ce moment était de 1375 pi/min. Pendant la descente, le premier officier a fait des annonces d’assiette et de vitesse anémométrique à au moins 2 autres reprises et a aussi conseillé au commandant d’abaisser le nez de l’hélicoptère. Le commandant a accusé réception de ces annonces et a avisé le premier officier que la correction était en cours. Pendant la descente, le commandant a tenu enfoncé le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique, et a tenté d’abaisser le nez de l’hélicoptère en exerçant une pression graduelle vers l’avant sur le cyclique. Le déplacement graduel du cyclique vers l’avant a permis de réduire l’assiette en tangage de l’hélicoptère très lentement d’un maximum de 23° en cabré à environ 10° en cabré juste avant que l’appareil descende sous la base des nuages.

Alors que l’hélicoptère descendait sous 200 pieds asl, l’hélicoptère est sorti des nuages et l’équipage de conduite pouvait voir l’eau plus bas. À 14 h 58 min 38 s, le commandant a augmenté le pas collectif; la puissance des 2 moteurs a augmenté; cela s’est traduit par un couple maximum de 132 % pour le moteur no 1 et de 129 % pour le moteur no 2. Malgré l’augmentation de la puissance, le régime du rotor principal (Nr), qui était à 105 %, a chuté à une valeur minimale de 91,2 %. Lorsque le régime du rotor principal a diminué sous 95 %, l’alerte sonore de bas régime rotor (« Low rotor ») a retenti et le voyant d’alarme rouge associé s’est allumé sur le tableau principal des voyants d’alarmeFootnote 14. Au même moment, l’alerte sonore du EGPWS est passée de l’alerte sonore « Don’t Sink » à l’indication sonore de train d’atterrissage (« Too low gear »)Footnote 15 en raison du fait que le train d’atterrissage était en position rentré à une altitude radar inférieure à 150 pieds au-dessus du sol (agl). En réponse à l’avertissement de bas régime rotor, le premier officier a conseillé au commandant d’abaisser immédiatement le levier de pas collectif. Le commandant a accusé réception et a abaissé légèrement le collectif pour rétablir le Nr. Le premier officier a ensuite réarmé le dispositif de flottaison en prévision d’un impact avec le plan d’eau. Le cap, qui avait augmenté (nez tournant vers la droite) durant la descente, a atteint une valeur maximale de 209 °M pendant l’application du collectif pour arrêter la descente, et il a ensuite commencé à diminuer lentement.

À 14 h 58 min 53 s, la descente a été arrêtée à 38 pieds au-dessus de l’eau, sur un cap de 153 °M. Le sillage du rotor de l’hélicoptère soulevait des embruns qui recouvraient les fenêtres. En tout, 32 secondes se sont écoulées à partir de 541 pieds asl (534 pieds altitude radar) jusqu’à ce que l’hélicoptère se mette en vol stationnaire. Pendant que l’appareil était en vol stationnaire, l’équipage de conduite a balayé rapidement le poste de pilotage pour vérifier la présence de toute anomalie, puis l’hélicoptère est reparti pour St. John’s quelques secondes plus tard. Ni l’un ni l’autre des pilotes ne savait que les limites de couple de l’hélicoptère avaient été dépassées pendant l’application du collectif pour arrêter la descente. Pendant le départ subséquent, le commandant a activé le mode GA et l’hélicoptère a traversé 200 pieds altitude radar en montée à une vitesse anémométrique de 60 KIAS. Le profil a été suivi sans écart d’assiette ou de vitesse anémométrique; le mode GA a été désactivé à 15 h 1 min 23 s lorsque l’hélicoptère a traversé 1880 pieds altitude radar en montée et est retourné à CYYT.

1.2 Victimes

Tableau 1. Victimes
Équipage de conduite Passagers Tiers Total
Tués

Blessés graves

Blessés légers

Indemnes

2 5 7

Total

2 5 7

1.3 Dommages à l’aéronef

L’aéronef n’a pas été endommagé.

1.4 Autres dommages

Il n’y a eu aucun autre dommage.

1.5 Renseignements sur le personnel

1.5.1 Généralités

Tableau 2. Renseignements sur le personnel

Commandant Premier officier
Licence Licence de pilote de ligne (ATPL) – hélicoptère Licence de pilote de ligne (ATPL) – hélicoptère
Date d'expiration du certificat de validation 1er décembre 2011 1er novembre 2011
Nombre total d'heures de vol 18 094 18 643
Nombre total d’heures de vol aux instruments 3000 8000+
Nombre total d’heures de vol d’hélicoptère 18 094 989
Heures de vol sur type 1203 804
Heures de vol dans les 30 derniers jours 33 22

1.5.2 Commandant

Le commandant possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur. Le commandant était titulaire d’une licence de pilote de ligne (ATPL) – hélicoptère canadienne, ainsi que des qualifications de type sur Bell 206, Bell 212, Bell 47, Eurocopter AS350, Eurocopter AS355 et Sikorsky S-92A. Le commandant avait une qualification de vol aux instruments de groupe 4 valide jusqu’au 1er juillet 2012.

Avant d’être engagé par Cougar Helicopters, le commandant avait une vaste expérience du pilotage d’hélicoptères monomoteurs légers et bimoteurs de moyen tonnage, surtout selon les règles de vol à vue (VFR). En avril 2008, le commandant a été engagé par Cougar Helicopters comme premier officier sur S-92A. Le commandant a suivi son cours de transformation initial sur S-92A avec succès à Flight Safety International (FSI) le 14 mai 2008. Le commandant a échoué à ses 2 premières tentatives au contrôle de compétence pilote (CCP) et à sa qualification IFR, et a passé son CCP et sa qualification IFR à sa troisième tentative le 19 juin 2008.

Le commandant est retourné à FSI en mai 2009 pour suivre sa formation périodique annuelle. Pendant cette formation, on a remarqué que le commandant avait de la difficulté avec les rétablissements à partir d’assiettes inhabituelles, en raison d’erreurs dans l’interprétation de l’information du directeur de vol et de surcorrections. Il est noté au rapport de formation que le commandant était capable d’effectuer des sorties beaucoup plus maîtrisées après le recyclage. Le rapport indiquait une tendance à « surpiloter » la compensation et à « travailler plus fort que nécessaire », et de la difficulté avec les virages en raison d’un « manque de compréhension des fonctions de compensation ». Le rapport de formation recommandait plus de travail avec le directeur de vol couplé.

Bien qu’aucun règlement ne l’exige, le commandant a suivi un atelier de 2 jours sur la gestion des ressources en équipe (CRM) à Cougar Helicopters, en novembre 2009.

En avril 2010, le commandant a fait l’objet d’une vérification de pilote en ligne (LPC) pour le grade de commandant. Pendant cette séance sur simulateur, le commandant a éprouvé de la difficulté avec une urgence qui a entraîné une baisse de vitesse anémométrique, une assiette de cabré et une perte d’altitude. À la suite de cette LPC, sa candidature n’a pas été recommandée pour l’entraînement en ligne des commandants. La LPC indiquait que le pilote devait augmenter son degré de conscience de la situation et améliorer sa surveillance d’instruments.

En novembre 2010, le commandant a terminé son entraînement en ligne et sa formation de transition pour commandantFootnote 16. En tout, 4 vols ont été effectués, et tous les éléments ont été jugés satisfaisants. Le dossier de formation du commandant comprend un formulaire qui indique que le commandant avait été libéré pour des tâches en ligne à titre de commandant de bord (CdB). Le commandant avait cumulé 1013 heures de vol sur ce type au moment de sa promotion.

En mars 2011, le commandant a reçu une formation supplémentaire sur la gestion des ressources en équipe dans le cadre de sa formation périodique sur simulateur.

Le commandant n’avait pas dépassé la limite de sa période de service de vol. Le jour de l’événement, le commandant s’est présenté au travail vers 8 h; rien n’indique que la fatigue a été un facteur dans cet événement.

1.5.3 Premier officier

Le premier officier possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur. Le premier officier était titulaire d’une licence ATPL – hélicoptère canadienne, ainsi que des qualifications de type sur Kamov KA-32, Robinson R-22 et Sikorsky S-92A, et avait une qualification de vol aux instruments de groupe 4 valide jusqu’au 1er mai 2012.

Cougar Helicopters a embauché le premier officier en décembre 2007. Avant de travailler pour Cougar Helicopters, le premier officier n’avait aucune expérience de vol en hélicoptère. Avant son embauche, le premier officier avait travaillé comme pilote d’aéronefs à voilure fixe au large des côtes, rattaché à CYYT pendant plusieurs années. Cougar Helicopters l’a embauché en raison de sa grande expérience dans un environnement IFR au large des côtes de Terre-Neuve et de son désir de rester à St. John’s. Au moment de son embauche, Cougar Helicopters avait de la difficulté à trouver des pilotes d’hélicoptère IFR d’expérience qui voulaient vivre dans la région de St. John’s.

De décembre 2007 à janvier 2008, le premier officier a suivi sa formation sur hélicoptère Robinson R-22 et a obtenu sa licence de pilote d’hélicoptère commercial. En janvier et février 2008, le premier officier a suivi son cours de transformation initial sur S-92A avec succès à FSI, à West Palm Beach (Floride).

Bien qu’aucun règlement ne l’exige, le premier officier a suivi un atelier de 2 jours sur la gestion des ressources en équipe (CRM) à Cougar Helicopters en novembre 2009. En mai 2011, le premier officier a reçu une formation supplémentaire sur la gestion des ressources en équipe dans le cadre de sa formation périodique sur simulateur.

Le premier officier n’avait pas dépassé la limite de sa période de service de vol. Le jour de l’événement, le premier officier s’est présenté au travail vers 8 h; rien n’indique que la fatigue a été un facteur dans cet événement.

1.6 Renseignements sur l’aéronef

1.6.1 Généralités

Le S-92A est un hélicoptère bimoteur quadripale de moyen tonnage construit par Sikorsky Aircraft Corporation. L’hélicoptère en cause était configuré pour transporter 2 membres d’équipage et jusqu’à 17 passagers dans la cabine. L’hélicoptère était certifié et équipé conformément à la réglementation en vigueur. Rien n’indique qu’il y ait eu un mauvais fonctionnement d’un système avant ou pendant le vol, et l’hélicoptère était exploité en deçà de ses limites de masse et de centrage.

Le système de régulation automatique à pleine autorité redondante (FADEC) du S-92A est doté d’une fonction qui protège le moteur et la boîte de transmission principale en empêchant le pilote de dépasser les limites affichées en exploitation normale. Le système est conçu pour limiter le débit de carburant lorsque les limites de couple « tous les moteurs en marche » ou celles de température sont atteintes. Lorsque l’une ou l’autre de ces conditions se produit, la limitation du débit de carburant entraîne la baisse ou l’affaissement du Nr. Cependant, on peut augmenter ces limites en appliquant une logique « blowaway » lorsque des conditions de vol extrêmes exigent une puissance accrue. Si la puissance requise entraîne un affaissement du Nr sous 100 %, la fonction « blowaway » va s’activer et les pilotes auront davantage de puissance à leur disposition, même si cela cause un dépassement des limites de couple.

En l’espèce, les limites de couple « tous les moteurs en marche » de l’hélicoptère ont été dépassées, le couple moteur atteignant un maximum de 132 % pour le moteur no 1 et de 129 % pour le moteur no 2. Il n’y a pas de procédure en vol normale ou d’urgence en cas de dépassement des limites de couple. Sikorsky n’exige pas que l’on prenne de mesures correctives en vol à la suite d’un dépassement des limites de couple, mais exige toutefois que soient prises des mesures de maintenance après vol. Comme le dépassement des limites de couple au-delà de 120 % a duré 1,5 seconde, Cougar Helicopters était uniquement tenue d’effectuer une inspection conditionnelle. L’inspection n’a révélé aucune anomalie et l’hélicoptère a été remis en service.

À la suite de l’événement, Cougar Helicopters a effectué d’autres essais en vol qui n’ont révélé aucune anomalie. Dans le cadre de ces essais en vol, l’équipage de conduite a pu recréer une suite d’événements semblable à celle qui s’est produite lors du vol en question en appliquant une pression vers l’avant sur le cyclique contre la compensation d’effort, et puis en activant le mode GA et en relâchant la pression vers l’avant sur le cyclique.

1.6.2 Aérodynamique de l’hélicoptère

À mesure que la vitesse anémométrique d’un hélicoptère augmente, l’augmentation de l’écoulement d’air à travers le système de rotor entraîne une tendance naturelle au cabré. Ce phénomène aérodynamique est appelé refoulement. Pour compenser cette tendance au cabré, le pilote doit pousser sur le cyclique proportionnellement au cabrage pour maintenir l’assiette d’accélération appropriéeFootnote 17. Si cette tendance n’est pas corrigée, il pourrait s’ensuivre une assiette de cabré importante et une réduction de la vitesse anémométrique.

1.6.3 Paramètres du vol en cause

À partir des données récupérées de l’enregistreur de vol multifonction (MPFR), l’enquête a permis de déterminer le taux de variation et la position des commandes de vol tout au long de l’événement. Pendant la partie initiale du décollage, lors du passage au vol vers l’avant, l’assiette en tangage de l’hélicoptère a diminué de près de 7° par seconde en moyenne, avec un taux de tangage maximal de 11,25° par seconde. Ensuite, pendant l’accélération de l’hélicoptère, l’assiette en tangage a augmenté à un taux de 5,6° par seconde. De plus, les données ont révélé que le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique a été relâché à une position du manche cyclique considérablement vers l’arrière, avec un taux de cabré environ 10 fois supérieur à celui associé aux 4 activations précédentes du mode GA.

Lorsque le pilote automatique a été découplé, le taux de montée de l’hélicoptère avait chuté de 1500 à 850 pi/min. La vitesse verticale s’est brièvement stabilisée à 750 pi/min en montée, puis elle a chuté rapidement. Lorsque l’hélicoptère est descendu sous la base des nuages, le taux de descente a atteint un maximum de 1880 pi/min à 152 pieds au-dessus du plan d’eau et il a ensuite commencé à diminuer en réponse au déplacement important du collectif amorcé pour arrêter la descente. Se reporter à l’annexe B pour voir la représentation du profil de départ de l’hélicoptère en cause.

Les données de l’enregistreur des données de vol (FDR) ont aussi révélé que l’hélicoptère était demeuré presque à l’horizontale en roulis pendant la descente inopinée. En outre, elles ont révélé que l’hélicoptère était descendu dans un cabré pendant environ 16 secondes, sans augmentation du collectif. Alors que l’hélicoptère descendait sous la base des nuages, l’inclinaison longitudinale de l’hélicoptère a été réglée à un point légèrement au-dessus de l’horizon et le collectif a été relevé pour arrêter la descente. À partir de l’activation du mode GA jusqu’à ce qu’il soit en vol stationnaire, l’hélicoptère a fait un mouvement de lacet imprévu de 120° vers la droite.

1.7 Renseignements météorologiques

Au moment de l’événement, les conditions météorologiques signalées au Sea Rose étaient un couvert nuageux à 200 pieds au-dessus de l’eau et une visibilité de 5 à 6 milles terrestres. Le haut du couvert nuageux était à un point se situant entre 300 et 350 pieds asl. On a signalé un vent soufflant du 110 °M à 6 nœuds et un calage altimétrique était de 29,78 pouces de mercure. Les vagues signalées au moment de l’événement étaient une petite houle de 1,9 mètre.

1.8 Aides à la navigation

Rien n’indique que les aides à la navigation disponibles aient présenté des problèmes.

1.9 Communications

Aucun problème au niveau de la qualité des messages radio n’a été constaté.

1.10 Renseignements sur l’aérodrome

Sans objet.

1.11 Enregistreurs de bord

L’hélicoptère en cause était doté d’un MPFR Penny & Giles, destiné à l’enregistrement des données de vol (FDR) ainsi que des conversations dans le poste de pilotage (CVR), sur une mémoire à semi-conducteurs protégée contre les impacts. Le MPFR enregistre 25 heures de données du FDR et 2 heures de données du CVR, puis les données sont écrasées.

Le MPFR n’a pas été mis en sécurité après le vol en question. On a plutôt procédé au nettoyage du moteur ainsi qu’à certaines tâches d’entretien ordinaires. Ce n’est qu’après avoir effectué ce travail supplémentaire sur l’hélicoptère que Cougar Helicopters a téléchargé les données du MPFR. À cause de ces retards de conservation des données du MPFR, toutes les données CVR de l’événement ont été écrasées. Les données du CVR commencent peu de temps après l’établissement de l’hélicoptère à l’altitude de croisière pour le vol de retour à CYYT. Au moment de l’événement, Cougar Helicopters n’avait aucune procédure ou politique de protection du contenu des CVR en vigueur.

Le Bureau de la sécurité des transports (BST) a antérieurement documenté de nombreux exemples où des données critiques du FDR et/ou du CVR n’étaient pas disponibles pour une enquête parce qu’elles n’avaient pas été mises en sécurité après un événementFootnote 18.

Tandis que les données du CVR de l’événement ont été perdues, toutes les données du FDR de l’événement ont été extraites du MPFR. Ces données ont fourni d’importants détails sur le vol en question et elles ont joué un rôle déterminant dans l’enquête. Elles ont aussi fourni des détails sur les 4 activations précédentes de la remise des gaz aux fins de comparaison.

1.12 Renseignements sur l’épave et sur l’impact

Sans objet.

1.13 Renseignements médicaux et pathologiques

Aucun problème d’ordre médical qui aurait pu perturber les capacités de l’équipage n’a été signalé.

1.14 Incendie

Il n’y a pas eu d’incendie.

1.15 Questions relatives à la survie des occupants

Sans objet.

1.16 Essais et recherches

Sans objet.

1.17 Renseignements sur les organismes et sur la gestion

1.17.1 Généralités

La société Cougar Helicopters, créée en 1986, détient des certificats d’exploitation qui l’autorisent à mener ses opérations aux termes des sous-parties 704 et 702 du RAC. L’entreprise a des bases d’exploitation à St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador) et à Halifax (Nouvelle-Écosse). Cougar Helicopters est employée exhaustivement dans le transport extracôtier; en outre, elle exerce des activités de recherche et sauvetage et assure des services médicaux d’urgence. Le parc aérien de Cougar Helicopters comprend 7 Sikorsky S-92A, 1 Sikorsky S-76A++ et 1 AugustaWestland AW139. Au moment de la rédaction du présent rapport, l’entreprise comptait 281 employés occupant les postes suivants :

Tableau 3. Répartition des employés de Cougar Helicopters
Direction 5
Régulation 12

Spécialistes en sauvetage

23

Pilotes

56

Ingénieurs

86

Personnel de soutien

99

En 2004 Cougar Helicopters a été rachetée par l’entreprise Vancouver Island Helicopters (VIH) Aviation Group, dont elle fait maintenant partie. La société VIH a été fondée à Victoria (Colombie-Britannique) en 1955. Outre la prestation de services de nolisement partout dans le monde, l’entreprise VIH Aviation Group exploite un centre de réparation d’hélicoptères, une entreprise d’aéronefs d’affaires et une installation d’entretien courant implantée à l’aéroport international de Victoria.

1.17.2 Système de gestion de la sécurité de Cougar Helicopters

1.17.2.1 Généralités

Malgré l’absence d’exigence réglementaire à cet égard, Cougar Helicopters avait mis en œuvre un système de gestion de la sécurité (SGS) intégré comportant un système de signalement non punitif. Le manuel du SGS de Cougar Helicopters décrit la politique en matière de sécurité de l’entreprise, qui stipulait, en partie, que le dirigeant responsable de Cougar Helicopters est déterminé à maintenir [traduction]:

une culture de présentation transparente de rapports sur tous les dangers pour la sécurité, selon laquelle la direction n’adoptera aucune mesure disciplinaire à l’endroit d’un employé qui signale de bonne foi un danger ou un événement lié à la sécurité causé par un comportement non intentionnel (signalement non punitif); et

qui exige de tous les employés qu’ils maintiennent un environnement de travail sûr en adhérant aux politiques, aux procédures et à la formation qui ont été approuvées, et qu’ils se familiarisent avec les politiques et procédures en matière de sécurité et s’y conformentFootnote 19.

Le manuel précise également ce qui suit [traduction] :

Nous considérons que nous sommes une organisation d’apprentissage; à ce titre, la direction procédera à l’examen de tous les incidents et accidents qui surviennent sur les lieux de travail, dans le but d’en déterminer la cause plutôt que de jeter le blâme, et elle traitera des préoccupations liées à la sécurité dans le cadre de réunions régulières avec la direction et les employés.

Tous les employés doivent reconnaître qu’il leur incombe de se conformer aux lois et règlements de même qu’aux règles et procédures de la Société en matière de sécurité aérienne et en matière de santé, de sécurité et d’environnement. On s’attend à ce que les employés et les entrepreneurs travaillent de manière à assurer leur propre sécurité de même que celle de leurs collègues, des passagers et de toute personne liée à notre entreprise, et qu’ils signalent à la direction tout processus ou toute activité qu’ils considèrent comme non conforme à la présente politiqueFootnote 20.

La politique relative au système de gestion de la sécurité de Cougar Helicopters, datée du 27 mai 2010, précise que [traduction] « l’entreprise maintient une culture de sécurité juste et n’imposera pas de mesures disciplinaires aux employés qui signalent des dangers ou des événements à moins que l’on constate qu’il s’agit de violations irresponsables, de sabotage ou d’actes malveillants »Footnote 21. De même, dans une section du manuel du SGS de Cougar Helicopters qui traite du signalement non punitif, il est précisé ce qui suit [traduction] :

Cougar Helicopters Inc. appuie une approche d’apprentissage juste dont le but premier n’est pas de déterminer qui doit porter le blâme. Il est reconnu que l’erreur humaine est possible et qu’il est essentiel, lorsqu’elle se produit, d’en tirer toutes les leçons possibles et de les partager le plus rapidement possible au sein de l’organisation. Le cas échéant, aucun blâme ni sanction subséquente ne sera attribué comme résolution du problème; toutefois, toutes les personnes en cause, directement ou indirectement, devront accepter la responsabilité du rôle qu’elles ont joué. En cas de négligence grave ou de violation délibérée, des mesures disciplinaires appropriées doivent être prises, celles-ci pouvant aller jusqu’au renvoiFootnote 22.

Le signalement de dangers est un élément essentiel de l’efficacité des systèmes de gestion de la sécurité. Une politique en matière de signalement non punitif encourage le signalement ouvert d’événements relatifs à la sécurité. Si les employés sont préoccupés par la possibilité que des mesures disciplinaires soient prises à la suite d’un signalement, ils seront moins portés à communiquer ces renseignements par crainte de répercussions sur leur cheminement de carrière.

L’importance d’un système de signalement non punitif est également soulignée dans les SOP de Cougar Helicopters. Selon les SOP de l’entreprise, l’efficacité du programme de gestion des ressources de Cougar Helicopters Aviation (CHARM) repose sur 3 piliers essentiels [traduction] :

  1. la confiance – à tous les échelons de la hiérarchie des responsabilités – une gestion efficace des erreurs exige un climat de confiance entre la direction et les employés relativement à leur engagement commun à l’égard de la sécurité;
  2. une politique non punitive à l’égard des erreurs qui encourage les membres d’équipage à parler de leurs erreurs et à participer aux mesures pour empêcher qu’elles ne se reproduisent;
  3. un engagement de la direction à prendre des mesures pour réduire les conditions susceptibles de faire augmenter les erreursFootnote 23.

Lorsqu’ils étaient en route pour le retour à CYYT, le commandant et le premier officier ont parlé de la nécessité de soumettre un rapport de SGS, et ils ont indiqué qu’ils devraient signaler l’événement au directeur des opérations aériennes (DOA) et au pilote en chef (PC) de l’entreprise. À l’atterrissage, l’équipage de conduite a présenté un rapport de SGS et a collaboré avec l’enquête du SGS de Cougar Helicopters.

1.17.2.2 Suivi des données de vol des hélicoptères

Dans le cadre de son SGS, Cougar Helicopters a créé un programme de suivi des données de vol des hélicoptères (HFDM). Grâce à une surveillance attentive du FDR, le programme de HFDM contribue à la détermination des tendances et contrôle en outre les dépassements de paramètres définis par l’entreprise. Comme il est décrit dans une présentation de Cougar Helicopters, l’objectif du programme de HFDM est d’utiliser les données pour les comptes-rendus, l’éducation ainsi que l’examen de la formation et des SOPFootnote 24. À la fin de chaque jour, les données de l’enregistreur de vol de chaque hélicoptère sont téléchargées et transférées au poste de travail de HFDM, où elles sont analysées à des fins de contrôle de la qualité du vol, mais également dans la perspective de déceler tout écart éventuel par rapport aux SOP de Cougar Helicopters. En cas de lecture anormale, quel qu’en soit le type, les données sont examinées par un comité de HFDM interne. Selon lemanuel d’exploitation de Cougar Helicopters, le comité de HFDM est responsable, notamment, du traitement confidentiel et de l’analyse des données de vol, et du maintien proactif de contacts avec le personnel naviguant, le personnel de formation et le comité sur la sécurité aérienne. Le comité de HFDM est constitué du directeur du HFDM, de l’analyste des données de vol, d’un interprète-ingénieur, d’un représentant de la sécurité et parfois d’autres employés à qui l’on demande de participer aux activités de HFDM. Si un examen des données de HFDM détermine qu’il s’est produit un événement important, le DOA et le PC en sont informés.

1.17.2.3 Modèle d’arbre décisionnel d’une culture juste

Selon le manuel du SGS de Cougar Helicopters, l’entreprise emploie le « modèle d’arbre décisionnel d’une culture juste » (Annexe C) [traduction] « pour assurer le traitement uniforme, objectif et équitable de tous les membres de notre personnel et aider les cadres supérieurs à prendre des décisions liées à la discipline des employés ». L’approche d’une culture juste est fondée sur l’idée que l’erreur humaine est un symptôme et non une cause. Comme cela est expliqué dans Just Culture: Balancing Safety and Accountability, « l’erreur humaine est un effet d’un problème plus profond dans le système. Pour régler un problème d’erreur humaine, nous devons nous pencher sur le système dans lequel les gens travaillent : la conception de l’équipement, l’utilité des procédures, ainsi que l’existence de conflits d’objectifs et de pression de production »Footnote 25.

Le manuel du SGS de Cougar Helicopters explique que le modèle d’arbre décisionnel d’une culture juste est un outil [traduction] « que la haute direction peut utiliser pour décider quelles mesures disciplinaires il convient de prendre, le cas échéant, après un incident, lorsque les actions des employés en cause sont prises en considération ».

1.17.2.4 Enquête menée dans le cadre du système de gestion de la sécurité de Cougar Helicopters

Le jour de l’événement, Cougar Helicopters a entrepris une enquête interne dans le cadre du SGS, qu’elle a terminée le 2 août 2011. L’équipe de l’enquête était constituée du pilote en chef de type S-92A, du directeur de la sécurité et d’un pilote instructeur de S-92A chevronné. Le pilote en chef de type S-92A et le pilote instructeur avaient auparavant été nommés au comité de HFDM. L’équipe de l’enquête a réalisé des entrevues auprès de l’équipage de conduite et a examiné les données du FDR et du système de surveillance des cycles de fonctionnement (HUMS) recueillies dans le cadre du programme de HFDM de l’entreprise. Lors des discussions avec les membres de l’équipage de conduite, les membres du comité de HFDM chargés de l’enquête leur ont demandé leur consentement pour écouter le CVR dans le but de mieux comprendre ce qui s’était passé pendant le vol en question. Les 2 pilotes ont donné leur consentement et le CVR a été retiré de l’hélicoptère. Cependant, on a rapidement établi que les données du CVR avaient été écrasées; par conséquent, on n’a pas écouté le CVR. Les pilotes en cause et les membres du comité de HFDM ignoraient que les données du CVR sont protégées aux termes de la Loi sur le Bureau canadien d’enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports (Loi sur le BCEATST) et qu’on ne peut y accéder que dans les circonstances prévues par cette loi.

Le rapport d’enquête du SGS de Cougar Helicopters indique que l’événement était dû à de mauvaises techniques de compensation et à l’omission de prendre les mesures nécessaires pour sortir d’une assiette de cabré. Le rapport précise aussi que les 2 membres de l’équipage ont été évalués selon le modèle d’arbre décisionnel d’une culture juste. Dans le cas du premier officier, l’entreprise a appliqué le modèle et a déterminé que son rôle dans l’événement satisfaisait les critères d’une « erreur honnête ». Des cadres supérieurs de l’entreprise ont indiqué que le modèle d’arbre décisionnel d’une culture juste avait été suivi jusqu’au stade du « test de substitution ». À ce stade, la haute direction considérait que l’événement révélait un manque sous-jacent dans l’ensemble de compétences du commandant, et qu’aucune formation ne pourrait combler ce manque. Le 28 juillet 2011, l’entreprise a mis fin à l’embauche du commandant en raison de la perte de confiance de la direction dans sa capacité de voler en toute sécurité dans l’environnement IFR extracôtier. Il a alors été décidé d’envoyer le premier officier suivre une formation supplémentaire sur simulateur et de le soumettre à une évaluation.

Les pilotes de l’entreprise ont été informés des détails de l’événement et on leur a dit qu’on avait écarté l’expérience et la formation de l’équipage de même que le système de pilote automatique comme facteurs contributifs possibles. Les pilotes ont aussi été informés que le commandant avait été licencié [traduction] « parce qu’il n’avait pris aucune mesure pour tenter de sortir l’aéronef d’une situation dont il était facile de se sortir, ce qui a fait qu’on est venu aussi près que possible d’un écrasement sans s’écraser »Footnote 26.

L’enquête du BST a révélé que certains employés pensaient que l’entreprise ne semblait pas agir en conformité avec le modèle d’arbre décisionnel d’une culture juste et sa politique en matière de signalement non punitif. En outre, certains pensaient que la décision peut avoir été influencée par d’autres facteurs tels que des pressions de la part des exploitants de la zone extracôtière de Terre-NeuveFootnote 27 (exploitants extracôtiers), qui ont le pouvoir de décision finale sur les pilotes utilisés pour le transport de leur personnel à destination et au départ des installations extracôtières.

À la suite de l’enquête menée par l’entreprise dans le cadre du SGS, Cougar Helicopters a apporté des modifications aux SOP de décollage, a publié des notes de service sur les procédures d’embrayage du pilote automatique et de rétablissement à partir d’assiettes anormales et a amélioré la formation sur les assiettes anormales pour les pilotes dans le cadre de la formation périodique sur simulateur.

1.18 Renseignements supplémentaires

1.18.1 Impact sans perte de contrôle

En juin 2012, le BST a publié une mise à jour de sa Liste de surveillance, qui comprend les enjeux de sécurité sur lesquels il a enquêté et qui posent les plus grands risques pour les Canadiens. À ce jour, les mesures adoptées par l’industrie et l’organisme de réglementation sont insuffisantes pour éliminer les risques mentionnés dans la Liste de surveillance. Y figurent notamment les impacts avec le sol et l’eau, généralement appelés « impact sans perte de contrôle » (CFIT).

Un CFIT se produit lorsqu’un aéronef en état de navigabilité et maîtrisé par le pilote est par inadvertance conduit contre le sol, l’eau ou un obstacle. Ce type d’accident survient souvent lorsque la visibilité est réduite, la nuit ou par mauvais temps.

Outre les CFIT, les professionnels en sécurité se préoccupent aussi des événements de vol contrôlé en direction du relief (CFTT). Un événement de CFTT est essentiellement un événement qui a presque entraîné un CFIT, mais qu’une intervention du pilote a permis d’éviter. La base de données de l’Aviation Safety Reporting System de la National Aeronautics and Space Administration (NASA) contient près de 3000 rapports d’événements où il aurait pu se produire un CFIT s’il n’y avait pas eu une intervention quelconque avant l’impact.

1.18.2 Systèmes d’avertissement de proximité du sol améliorés

En 1995, le BST a publié, à l’intention de Transports Canada (TC), la recommandation A95-10, selon laquelle tous les aéronefs de ligne et de transport régional propulsés par turbine à gaz et approuvés pour le vol IFR, et pouvant transporter au moins 10 passagers, devraient être équipés d’un dispositif avertisseur de proximité du sol. En 2005, dans une mise à jour de l’état de ses efforts à l’égard de la recommandation A95-10, TC souligne que le système d’avertissement et d’alarme d’impact (TAWS), technologie qui surpasse le dispositif avertisseur de proximité du sol (GPWS), comblera certainement les lacunes inhérentes à ce dernier. Le TAWS est conçu pour « fournir à un équipage de conduite des alarmes sonores et visuelles permettant d’éviter le vol contrôlé par inadvertance vers un relief, un obstacle ou l’eau »Footnote 28.

En 2012, la Liste de surveillance du BST a indiqué qu’un plus vaste recours à la technologie, comme le TAWS, est nécessaire pour aider les pilotes à évaluer leur proximité du sol. Le 4 juillet 2012, TC a pris des règlements aux articles 605.42, 703.71, 704.71 et 705.85 du RAC exigeant que les avions à turbomoteur privés et commerciaux comportant 6 sièges passagers ou plus et effectuant des vols en mode IFR et/ou de nuit en mode VFR soient équipés d’un système TAWS et que ce dernier soit utilisé. Cependant, ces modifications réglementaires proposées ne s’appliquent qu’aux avions, et par conséquent, elles ne visent pas les hélicoptères. Selon les modifications réglementaires proposées, les avions neufs doivent être immédiatement équipés d’un TAWS; 2 ans après la date de son entrée en vigueur, la réglementation s’appliquera à tous les avions configurés de manière similaire qui ont été fabriqués avant cette date. Comme ces modifications vont réduire de façon importante la lacune de sécurité décrite dans la recommandation 95-10 du BST, la réponse de TC a été évaluée comme entièrement satisfaisanteFootnote 29.

L’hélicoptère en cause était équipé d’un système d’avertissement de proximité du sol amélioré (EGPWS) Honeywell Mark XXII, qui satisfait aux exigences des spécifications techniques canadiennes (CAN-TSO) C151b de classe Apour les TAWS. Les modes de base de l’EGPWS de l’hélicoptère en cause sont fondés sur l’altitude radar, et ils sont conçus pour « empêcher une descente dans un relief plat ou en pente uniforme ». Les modes de prévision renforcée ou de balayage frontal fonctionnent par comparaison de la position GPS avec des bases de données sur les obstacles et le relief. Le mode de balayage frontal est bloqué lorsque la vitesse anémométrique de l’hélicoptère est inférieure à 70 KIAS. Selon le manuel de vol du S-92A, [traduction] « le système a pour objet d’alerter le pilote en temps utile pour lui permettre de prendre des mesures correctives pour empêcher le CFIT tout en évitant les fausses alarmes injustifiées »Footnote 30.

différents modes de l’EGPWS sont décrits dans le manuel de vol du S-92A. Le mode 1 a été conçu dans le but de « détecter le moment où l’aéronef descend en direction du relief à grande vitesse compte tenu de son altitude relative au-dessus du relief », à partir d’information du calculateur de données aérodynamiques et de l’altitude indiquée au radioaltimètre. Cependant, en raison du nombre excessivement élevé de fausses alarmes en conditions normales d’approche, Sikorsky et Honeywell ont conjointement choisi de désactiver le mode 1, et ce, sur la foi d’un raisonnement selon lequel, historiquement parlant, une vitesse verticale de descente excessive est un moindre problème pour les hélicoptères que pour les aéronefs à voilure fixe.

Le mode 2 de l’EGPWS est un mode de balayage frontal qui fournit des alertes lorsque l’aéronef s’approche du relief à une vitesse excessive, que ce soit en raison d’une descente ou de la trajectoire de vol projetée à l’avant de l’hélicoptère.

Le mode 3 fournit des alertes lorsque l’aéronef perd beaucoup d’altitude immédiatement après le décollage. Selon le manuel de vol du S-92A, le mode 3 est actif après le décollage lorsque le train d’atterrissage est rentré ou lorsque la vitesse anémométrique est supérieure à 50 KIAS. Le mode 3 demeure en fonction jusqu’à ce que l’hélicoptère prenne suffisamment d’altitude pour que les autres modes assurent la protection contre les CFIT (normalement 60 secondes après le décollage). Cependant, pour permettre un décollage interrompu ou un circuit ferméFootnote 31, le mode 3 est désactivé lorsque la vitesse anémométrique baisse sous 40 KIAS. Selon le constructeur de l’aéronef, cette logique est basée sur l’hypothèse selon laquelle s’il se produit une descente inopinée pendant le décollage, elle ne sera pas accompagnée d’une diminution importante de la vitesse anémométrique. Si l’hélicoptère descend et ralentit sous 40 KIAS, la logique suppose que le pilote a l’intention d’effectuer un atterrissage. La vitesse de descente n’est pas prise en compte. Cette logique était un compromis jugé acceptable pour éviter les alertes sonores indésirables pendant un décollage interrompu.

Le mode 3 est fondé sur une variable de perte d’altitude calculée en fonction de l’altitude au début de la descente inopinée (figure 2). La perte d’altitude permise avant qu’une alerte soit donnée est calculée en fonction de la hauteur de l’hélicoptère au-dessus du relief et du temps écoulé depuis le décollage.

Lorsqu’une vitesse verticale de descente est détectée, le mode 3 demeure activé jusqu’à ce que l’altitude augmente suffisamment. Cela déclenchera un avertissement sonore « Don’t sink » et allumera un témoin avertisseur jaune « DON’T SINK » correspondant sur l’indicateur directeur d’assiette (ADI). Selon les SOP du SK-92 de Cougar Helicopters, la réponse du PF à cet avertissement est d’annoncer « correction », d’augmenter immédiatement la puissance jusqu’à la puissance maximale au décollage et de corriger l’assiette de l’hélicoptère pour reprendre une vitesse ascensionnelle positive. Même si la procédure varie selon le type d’aéronef, ce genre de procédure est généralement appelé une procédure d’évitement de CFIT.

Figure 2. Mode 3 – Descente inopinée après l'enveloppe de décollage (Source : S-92A Rotorcraft Flight Manual [2011]) (Remarque : traduction superposée par le BST)
Figure 2. Mode 3 – Descente inopinée après l'enveloppe de décollage (Source : S-92A Rotorcraft Flight Manual [2011]) (Remarque : traduction superposée par le BST)

Le mode 4 de l’EGPWS du S-92A est conçu pour alerter le pilote lorsque l’hélicoptère descend sous une marge ou un plancher de franchissement du relief prédéterminé. Ce mode comporte 3 sous-modes, dépendant de la vitesse anémométrique de l’hélicoptère et de la configuration du train d’atterrissage.

Le mode 4A est actif en croisière et pendant l’approche lorsque le train est rentré. Une alerte sonore « Too low terrain » retentit et un avertissement « TERRAIN » jaune s’allume à l’ADI lorsque la vitesse anémométrique est supérieure à 60 KIAS et que l’altitude radar est inférieure à 150 pieds. Une alerte sonore « Too low gear » retentit, un avertissement « GEAR » jaune s’allume à l’ADI et « LDG GEAR » s’allume au tableau principal des voyants d’alarme lorsque la vitesse anémométrique est égale ou inférieure à 60 KIAS et que l’altitude radar est inférieure à 150 pieds.

Le mode 4B est actif en croisière et pendant l’approche lorsque le train est sorti. Le cas échéant, une alerte sonore « Too low terrain » retentit lorsque l’altitude radar est inférieure à 100 pieds et que la vitesse anémométrique est supérieure à 120 KIAS. À mesure que la vitesse anémométrique diminue, la limite d’alerte baisse jusqu’à 10 pieds et 80 KIAS.

Le mode 4C est actif durant la phase de décollage lorsque la vitesse anémométrique est supérieure à 50 KIAS et que le train est rentré. Ce mode veille à ce que la hauteur par rapport au sol augmente après le décollage en fonction d’un plancher de 75 % de l’altitude radar actuelle. Une alerte sonore « Terrain » retentit lorsque la marge de franchissement du relief est inférieure à l’altitude plancher fluctuante. Il demeure possible que des alertes soient générées même si le taux de montée de l’hélicoptère est positif, ce qui indiquerait que le relief s’élève rapidement sous l’hélicoptère et pénètre le plancher artificiel de 75 %. Dans ce mode, à mesure que la vitesse anémométrique diminue, la limite d’alerte baisse jusqu’à 10 pieds et 80 KIAS.

Dans le présent cas, le mode 3 de l’EGPWS a détecté la descente inopinée. L’alerte sonore « DON’T SINK » a retenti et un avertissement jaune s’est allumé au PFD. La descente inopinée a commencé lorsque la vitesse anémométrique a atteint une valeur maximale de 67 KIAS, train d’atterrissage rentré. Le mode 4 a également émis l’alerte sonore « Too low gear » et les signaux d’avertissement ou d’alarme correspondants à l’ADI et au tableau principal des voyants d’alarme lorsque l’hélicoptère est descendu sous 150 pieds asl, son train d’atterrissage toujours rentré.

1.18.3 Automatisation

1.18.3.1 Système de commandes automatiques de vol

L’hélicoptère en cause était équipé d’un système de commandes automatiques de vol (AFCS) qui stabilise l’hélicoptère en lacet, en roulis et en tangage pour assurer un vol compensé sans intervention dans la plupart des conditions de vol stable.

La commande cyclique comprend un frein électromagnétique à ressort. Cela permet au pilote de régler une assiette qui sera ensuite utilisée par le système de compensation cyclique comme référence pour la tenue en tangage et en roulis. La commande de collectif utilise un système de compensation du même type pour assurer le maintien d’une position de référence, d’une altitude ou d’une vitesse ascensionnelle que sélectionne le pilote. De même, le lacet est compensé à une position des pédales, une référence de cap ou une référence de dérapage latéral indiquée par le pilote ou le pilote automatique. Chaque vérin est doté d’un système d’embrayage qui permet aux pilotes d’annuler, au besoin, l’effet des commandes de vérin de compensateur.

Quatre moteurs de vérin de compensateur électriques fournissent le référencement des commandes et le gradient de sensation artificielle. Ces vérins sont responsables de la tenue en assiette et des opérations du directeur de vol couplé. Le directeur de vol couplé ne sera pas couplé à l’axe de tangage ou de roulis lorsque la vitesse anémométrique est inférieure à 50 KIAS.

Il est possible de désactiver les commandes des vérins de compensateur en appuyant sur les boutons de débrayage du compensateur d’effort, situés sur le cyclique, le collectif ou les pédales de palonnier. Les vérins peuvent aussi être commandés par les boutons de compensation à 4 voies situés sur le cyclique et le collectif (figure 1 et figure 3). Lorsque le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique est enfoncé, l’amortissement est disponibleFootnote 32.

En mode de tenue en assietteFootnote 33, le fait d’appuyer sur le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique et de le relâcher aura pour effet de modifier l’effort de compensation cyclique de référence à la nouvelle position du manche ainsi que l’assiette en tangage et en roulis au moment où le bouton est relâché. Si l’hélicoptère est couplé à la vitesse anémométrique, le fait d’appuyer sur le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique aura pour effet de modifier l’effort de compensation cyclique de référence à la nouvelle position et la vitesse anémométrique au moment où le bouton est relâché devient la nouvelle vitesse anémométrique de référence. La vitesse anémométrique de référence s’affiche en magenta sur l’anémomètre, et un curseur de vitesse anémométrique de référence s’affiche en magenta sur l’anémomètre.

De même, en mode de tenue en assiette, le fait d’appuyer sur la gâchette de débrayage de compensateur collectif et de la relâcher (figure 3) aura pour effet d’amener le collectif de référence à la nouvelle position. Si l’hélicoptère est couplé au mode de vitesse verticale, le fait d’appuyer sur la gâchette de débrayage de compensateur collectif aura pour effet de régler la vitesse verticale de référence à la vitesse réelle au moment où elle est relâchée. De même, il est possible de sélectionner une nouvelle vitesse verticale à l’aide du poussoir de compensateur collectif.

Une partie intégrante de l’AFCS du S-92A est le coupleur, ou « directeur de vol couplé », qui permet un certain nombre de différents modes de vol sans intervention, tels que les modes maintien de vitesse anémométrique, maintien de cap, maintien d’altitude, vitesse verticale, GA, présélection d’altitude, navigation et approche. Le coupleur utilise les vérins de compensateur pour maintenir l’hélicoptère sur une trajectoire de vol sélectionnée par le pilote. Pour que le coupleur fonctionne correctement, il est important que les vérins de compensateur soient centrés avant leur activation. Les vérins de compensateur peuvent déplacer les commandes à 100 % (d’une butée à l’autre). Ainsi, lorsque les vérins de compensateur bougent, les commandes de vol bougent aussi. Cependant, les vérins de compensateur sont intentionnellement limités à un taux de déplacement maximal de 10 % par seconde. Le taux d’amplitude des mouvements de commande du directeur de vol est limité intentionnellement, pour empêcher qu’un mauvais fonctionnement soit catastrophique. En conséquence, les vérins de compensateur ne peuvent pas appliquer de commandes importantes violemment pour corriger les écarts par rapport au régime de vol automatique voulu. Pour assurer une transition sans problème du vol non couplé au vol couplé, les SOP de Cougar Helicopters précisent que [traduction] « l’équipage doit confirmer que l’aéronef s’envole dans une assiette compensée normale, avant d’activer les fonctions du coupleur ». De même, il est également important de ne pas exercer d’effort contre le ressort. Selon le manuel de vol du S-92A [traduction] « une fois compensé, tout mouvement de commande de vol sans débrayage de la compensation entraînera un effort croissant vers la référence ».

Figure 3. Mode 3 - . Boîtier de commande de pas collectif (Source : S-92A Rotorcraft Flight Manual [2011]) (Remarque : traduction superposée par le BST)
Figure 3. . Boîtier de commande de pas collectif (Source : S-92A Rotorcraft Flight Manual [2011]) (Remarque : traduction superposée par le BST)

Le FD actif est indiqué dans le coin supérieur gauche du PFD. Si l’hélicoptère n’est pas couplé et que FD 2 est sélectionné, « FD 2 » s’affiche en blanc (figure 4).

Figure 4. FD non couplé (Source : S-92A Pilot Training Manual [2009])
Figure 4. FD non couplé (Source : S-92A Pilot Training Manual [2009])

Si l’hélicoptère est couplé, « CPL » s’affiche sous « FD 1 » ou « FD 2 » et les lettres P (tangage), R (roulis) et C (collectif) s’affichent dans la rangée du haut du PFD. Ces lettres correspondent à l’axe régissant chaque mode de directeur de vol couplé. Si un mode est capturé, la lettre s’affiche en vert pour indiquer que le mode est maintenant aux commandes de cette partie du directeur de vol couplé. Les modes qui sont enclenchés, mais qui ne sont pas encore capturés, s’affichent en lettres blanches. Cela signifie que les commandes ne sont pas appliquées en fonction de ce mode. De plus, les barres directrices magenta seront affichées dans la partie ADI du PFD (figure 5).

Figure 5. FD couplé (Source : S-92A Pilot Training Manual [2009])
Figure 5. FD couplé (Source : S-92A Pilot Training Manual [2009])

À Cougar Helicopters, on met beaucoup l’accent sur l’utilisation maximale de l’automatisation afin d’offrir un maximum de sécurité et de confort aux passagers. Selon une des SOP, [traduction] « afin de normaliser et d’améliorer la sécurité pendant les phases de départ et d’arrivée, le recours à l’automatisation à 3 paramètres est obligatoire ». Cette SOP est le résultat d’un événement antérieur chez Cougar Helicopters, mettant en cause un équipage de conduite qui a eu des problèmes de maîtrise durant un départ en conditions météorologiques de vol aux instruments (IMC) effectué manuellement. Les SOP indiquent qu’une fois rendu à 400 pieds agl (asl pour l’exploitation extracôtière), l’hélicoptère doit être en mode à 3 paramètres; pour ce faire, il faut recourir à la fonction GA ou demander au PM d’activer les modes de pilote automatique requis. L’automatisation à 3 paramètres signifie que le contrôle de la vitesse verticale ou de l’altitude est effectué par l’axe de collectifFootnote 34. En conséquence, les pilotes de Cougar Helicopters n’ont pas l’habitude de piloter manuellement le S-92A. La grande majorité des vols extracôtiers sont en très grande partie effectués en vol couplé.

On a fait des progrès énormes au chapitre de la technologie utilisée dans les hélicoptères modernes. Dans de nombreux cas, les hélicoptères sont équipés d’un niveau d’automatisation comparable à celui que l’on trouve dans les gros avions commerciaux. Les avantages de l’automatisation sont abondamment documentés. L’automatisation vise notamment à aider l’équipage et à améliorer la sécurité générale des volsFootnote 35. Comme dans de nombreux autres hélicoptères modernes, la suite d’automatisation du S-92A est capable de prendre en charge une bonne partie du pilotage traditionnellement effectué par les pilotes. C.E. Billings (1997) a relevé certains des pièges potentiels de l’automatisation, notamment la complaisance et l’excès de confiance, la méfiance excessive, une conscience de la situation réduite, la perte de sentiment d’autorité et de maîtrise et une perte d’habiletés manuellesFootnote 36. Dans de nombreux cas, pour des raisons liées aux opérations et à la sécurité, on s’attend toutefois à ce que les pilotes utilisent l’automatisation au maximum. Cela peut entraîner une situation où l’exploitant accorde une trop grande confiance à l’automatisation. Lorsque cela se produit, il se peut que les pilotes ne recueillent pas l’information dont ils auraient normalement besoin pour piloter l’hélicoptère manuellement. En conséquence, si un problème survient, les pilotes peuvent facilement se trouver hors circuit. Outre le fait de mettre plus de temps à comprendre ce qui se passe, les pilotes peuvent manquer d’expérience pratique pour composer avec le régime de vol qui s’ensuit. À cet égard, les pilotes servent de moyen d’appui à l’automatisationFootnote 37. Dans certains cas, on a soutenu que [traduction] « l’aéronef automatisé peut exiger du pilote des aptitudes au pilotage plus élevées, en raison du fait que le pilote utilise moins souvent ces aptitudes et uniquement dans des situations d’urgence exigeantes »Footnote 38. La question de la diminution des aptitudes au pilotage manuel a récemment été abordée lors d’une conférence dans le cadre du salon World Airline Training Conference and Tradeshow (WATS) de 2012. Dans une présentation d’Airbus Industries, on mentionnait que l’automatisation pouvait entraîner la complaisance et un manque de confiance. La présentation soulignait également le fait que les aptitudes au pilotage manuel sont désormais requises moins souvent, en raison de l’automatisation; cependant, elles sont toujours nécessaires. Pour contrer la diminution possible des aptitudes au pilotage manuel qui peut se produire en raison de l’automatisation, la présentation d’Airbus Industries mentionne l’importance d’une formation initiale appropriée, d’une formation de commandement adéquate et d’un plus grand recours à une formation pratique à intervalles réguliersFootnote 39. La présentation d’Airbus insistait aussi sur l’importance de la formation sur le rétablissement en cas de perte de maîtrise pour les équipages de conduite.

1.18.3.2 Remise des gaz

Dans le S-92A, le mode GA permet au pilote d’amorcer une montée à l’horizontale en appuyant sur le bouton GA sur l’un ou l’autre des cycliques ou en appuyant sur la touche de fonction de l’un ou l’autre des panneaux de sélection de mode. Selon le manuel de vol du S-92A, le mode GA « peut être utilisé dans le cadre d’une procédure d’approche aux instruments ou d’un départ aux instruments ou pour sortir d’une assiette anormale ». Selon le fabricant, le mode GA doit être activé à partir d’un profil de vol en régime stabilisé compensé. Cependant, hormis l’exigence d’être au-dessus de la Vmini, aucune autre restriction du domaine de vol n’est décrite dans le manuel de vol du S-92A pour l’utilisation du mode GA.

Cougar Helicopters encourage activement ses pilotes à utiliser le mode GA pour les départs d’une plateforme pétrolière en mer, et ce mode est utilisé par une grande majorité des pilotes de l’entreprise. Lorsqu’il est activé, le mode GA commande à l’axe de collectif de [traduction] « capturer une montée verticale de 750 pi/min, à l’axe de tangage de capturer une vitesse de 80 KIAS et à l’axe de roulis de maintenir le cap suivi »Footnote 40. Consulter l’annexe D pour connaître les indications visibles au pilote après la sélection du mode GA. Les zones délimitées par des boîtes jaunes indiquent au pilote que le mode GA est activé. Lorsque ce mode est activé, « IAS » est affiché en vert à côté de l’axe de tangage (P), et « GA » est affiché en vert à côté de l’axe de collectif (C). En outre, la référence de vitesse anémométrique sera réglée à 80 KIAS et la référence de vitesse verticale sera réglée à une montée de 750 pi/min.

Comme le précise la section 1.8.3.1, il est important que toutes les pressions de commande soient compensées, en vol stabilisé, avant l’activation du mode GA. Autrement, l’hélicoptère peut dévier considérablement du profil de vol voulu, puisqu’il est possible que les vérins des compensateurs ne puissent pas compenser adéquatement les changements d’assiette de l’aéronef.

Selon le fabricant, le directeur de vol commande en douceur aux moteurs des compensateurs d’établir les paramètres du mode GA soulignés précédemment. Normalement, le taux d’application maximal des commandes du FD est de 10 % de la course de la commande par seconde. En mode GA cependant, selon le fabricant, les 2 premiers degrés de changement d’assiette ne sont limités que par la vitesse de déplacement des vérins. Essentiellement, les 2 premiers degrés de changement d’assiette se produisent presque immédiatement. Une fois que le changement d’assiette initial de 2° est effectué, le taux d’application des commandes du FD est réduit à 2° par seconde d’assiette de référence. De même, le taux d’application des premiers 5 % des commandes de collectif n’est pas limité. Une fois que les premiers 5 % de changements de collectif ont eu lieu, les autres changements sont limités à 2,5 % par seconde, en supposant qu’aucun limiteur de moteur n’est actif. Cela veut dire que de très petites corrections de cyclique et de collectif se produisent très rapidement après l’activation du mode GA; cependant, le taux d’application des plus grands mouvements est limité. En conséquence, si les taux d’application des commandes induites par le pilote excèdent l’autorité du mode GA, le système peut avoir de la difficulté à adopter le profil type de remise des gaz en raison de la lenteur avec laquelle les vérins des compensateurs peuvent commander les changements de taux en mode GA.

Le manuel de vol du S-92A ne donne aucun conseil particulier quant à la vitesse anémométrique idéale pour l’activation du mode GA. Cependant, dans la section sur les départs d’une plateforme ou d’un navire des SOP de Cougar Helicopters, l’exemple d’exposé complet d’exploitation extracôtière se termine par [traduction] : « Je vais activer la remise des gaz jusqu’à 55 KIAS ».

L’enquête a révélé que la plupart des pilotes de Cougar Helicopters employaient le mode GA en suivant les étapes suivantes :

  1. Les pilotes stabilisaient l’hélicoptère de façon générale aux paramètres de vol GA (c.-à-d., 80 KIAS et vitesse ascensionnelle de 750 pi/min) et utilisaient le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique afin de s’assurer que toutes les pressions de commande sont relâchées avant l’activation du coupleur. Cela permettait de réduire le nombre de changements de commandes effectués après l’activation du mode GA;
  2. Après avoir relâché toute la pression du manche de pas cyclique et du levier de collectif, les pilotes appuient sur le bouton GA du cyclique avec le pouce droit;
  3. Les pilotes regardent ensuite si les curseurs de vitesse anémométrique et de vitesse verticale sont visibles et si les valeurs indiquées sont les bonnes. La plupart des pilotes de Cougar Helicopters n’avaient pas l’habitude d’utiliser la partie supérieure du PFD pour vérifier si le coupleur commandait les chaînes de tangage et de collectif;
  4. Une fois que le mode GA était activé, les pilotes augmentaient la vitesse anémométrique de l’hélicoptère jusqu’à une valeur se situant entre 100 et 110 KIAS à l’aide du poussoir de compensateur de l’AFCS sur le cyclique.

L’enquête a permis de déterminer que les pilotes de Cougar Helicopters savaient que des changements d’assiette inopinés pouvaient survenir si la compensation des pressions de commande n’était pas débrayée avant l’activation du coupleur. Plusieurs pilotes de Cougar Helicopters avaient, à un moment donné, activé le mode GA avec une pression résiduelle sur le cyclique avant l’activation du mode GA. Dans ces cas, les pilotes étaient intervenus en prenant les commandes de l’hélicoptère et soit en rétablissant l’assiette de l’hélicoptère et en permettant au mode GA de reprendre le vol couplé, soit en le pilotant manuellement jusqu’à une altitude sécuritaire. Dans le présent cas, le commandant n’a pas senti de pression sur le manche de pas cyclique avant d’activer le mode GA.

À Cougar Helicopters, il n’existe pas de procédure normalisée d’utilisation du bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique. Un sondage informel auprès des pilotes de Cougar Helicopters a révélé que pour les départs d’une plateforme, certains pilotes choisissaient d’appuyer sur le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique et de le garder enfoncé jusqu’à juste avant l’embrayage du pilote automatique. Une autre technique employée par les pilotes de Cougar Helicopters est de centrer les vérins de compensateur lorsque l’hélicoptère est en vol stationnaire et de relâcher le bouton de débrayage du compensateur d’effort, avant le départ d’une installation extracôtière. Les pilotes poursuivent ensuite simplement le vol au-delà de la pression de ressort tout en adoptant l’assiette d’accélération appropriée. De cette manière, en cas de désorientation spatiale, le fait de relâcher la pression sur le cyclique rétablira l’assiette en tangage qu’il y avait en vol stationnaire, qui correspond à celle qui est habituellement adoptée après l’activation du mode GA. En somme, si un pilote éprouve quelque type de désorientation spatiale que ce soit, le simple fait de relâcher de la pression du cyclique et d’appliquer de la puissance devrait permettre à l’hélicoptère d’adopter une assiette qui lui permettra de prendre de l’altitude en toute sécurité.

1.18.4 Procédures d'utilisation normalisées

1.18.4.1 Généralités

Selon les SOP de Cougar Helicopters, un transfert des commandes est amorcé par le PM disant, « J'ai les commandes ». Le pilote qui cède les commandes répond « Vous avez les commandes » et il les relâche. En plus de cette procédure, les SOP décrivent un certain nombre d'annonces normalisées visant à « diminuer le risque d'une mauvaise interprétation d'une demande ou d'un commandement et afin que la mesure corrective appropriée soit prise pour corriger la situation indésirable en cause ». Par exemple, les phrases normalisées suivantes sont mentionnées dans les SOP de Cougar Helicopters :

Il existe des annonces normalisées pour une inclinaison latérale, une vitesse de descente ou une vitesse anormales, notamment, mais il n'y en a pas pour les assiettes en tangage anormales.

La section traitant des vérifications après décollage des SOP de Cougar Helicopters précise que celles-ci doivent être effectuées à un moment propice, mais à au moins 400 pieds au-dessus de l'élévation de l'aérodrome ou de l'hélisurface. Les SOP stipulent aussi que l'hélicoptère doit être couplé à 3 paramètres avant d'atteindre 400 pieds asl. Il n'y a pas de restrictions de vol avec le train d'atterrissage déployé. Cependant, dans le cas de départs d'une plateforme ou d'un navire, les SOP indiquent que le train d'atterrissage doit être rentré après que les annonces de V2 et de taux de montée positif ont été effectuées. Les SOP précisent aussi que « l'automatisation ne doit pas être activée avant l'annonce “train rentré” durant le départ, parce qu'il peut s'agir d'une étape critique du vol dans des conditions IMC ». En outre, les SOP exigent que le commutateur du dispositif de flottaison soit réglé à la position sûre avant d'atteindre 80 KIAS, parce que les boudins ne doivent pas être déployés à plus de 80 KIAS. Le système d'avertissement se déclenchera si le dispositif de flottaison est armé à une vitesse anémométrique supérieure à 80 KIAS. À Cougar Helicopters, il était de pratique courante que le PM rentre le train et règle la flottaison à la position sûre, au commandement du PF, après l'annonce « taux positif » du PM. Le commutateur du système de flottaison se trouve au centre de la console entre les pilotes (photo 1). À partir du siège gauche, le PM doit se pencher considérablement pour atteindre l'interrupteur de train d'atterrissage (photo 2).

Photo 1.Pilote de S-92A se penchant vers le commutateur du système de flottaison
Photo of Pilote de S-92A se penchant vers le commutateur du système de flottaison
Photo 2. Pilote de S-92A se penchant vers le levier de commande du train d'atterrissage
Photo 2. Pilote de S-92A se penchant vers le levier de commande du train d'atterrissage
1.18.4.2 Politique d'appariement des membres d'équipage

Au moment de l'événement, Cougar Helicopters avait une politique d'appariement des membres d'équipage en place qui interdisait à 2 pilotes ayant cumulé moins de 300 heures sur ce type d'aéronef de voler ensemble. Cougar Helicopters avait également mis en œuvre un tableau d'évaluation des risques (TER) qui doit être rempli avant chaque vol. Celui-ci désigne les catégories de facteur de risque suivantes :

En vue d'éliminer une certaine subjectivité du processus, une valeur numérique est attribuée à chaque catégorie selon les facteurs de risque présents. Une fois que toutes les valeurs numériques sont calculées, le TER indique le niveau d'autorisation requis selon la valeur de risque globale. Le TER a été rempli pour le vol en question, et le niveau de risque attribué était suffisamment faible pour qu'aucune consultation avec le pilote en chef ou son représentant ne soit requise.

En plus de la politique d'appariement des membres d'équipage des SOP de Cougar Helicopters, tous les pilotes doivent d'abord être approuvés par les exploitants extracôtiers avant d'avoir la permission de transporter leurs travailleurs en mer. Dans le cadre du processus, les exploitants extracôtiers ont établi des exigences minimales de 1000 heures de vol sur des hélicoptères et de 250 heures de vol à titre de CdB. Le premier officier cumulait plus de 16 000 heures de vol sur des aéronefs à voilure fixe; cependant, il ne satisfaisait pas aux exigences minimales sur des hélicoptères établies par les exploitants extracôtiers. En conséquence, Cougar Helicopters a soumis aux exploitants extracôtiers une demande de dérogation en vue d'obtenir la permission de donner la possibilité au premier officier, qui cumulait 352 heures de vol sur des hélicoptères et 94 heures à titre de CdB, d'effectuer des vols commerciaux au large des côtes. La demande de dérogation indiquait que le premier officier avait [traduction] « rencontré ou excédé les normes exigées jusqu'à présent » et que ce fait, combiné à l'ensemble de son expérience de vol, offrait « un niveau de sécurité équivalent et de nouvelles façons de mesurer l'expertise, par opposition à une approche axée purement sur les heures de vol ». Une des conditions énoncées dans cette demande de dérogation était que le premier officier ne volerait qu'avec des pilotes instructeurs désignés jusqu'à ce qu'il satisfasse aux exigences minimales d'heures de vol établies par les exploitants extracôtiers. Une copie de la dérogation a été portée au dossier du premier officier. On a appliqué la restriction pendant plusieurs mois, puis on a commencé à jumeler le premier officier avec des pilotes qui n'étaient pas des commandants instructeurs qualifiés. Le commandant en question n'était pas un commandant instructeur qualifié. L'enquête a permis de déterminer qu'en raison d'une erreur administrative de la part de Cougar Helicopters, on avait cessé d'appliquer la restriction touchant le premier officier après plusieurs mois de vol pour l'entreprise. En outre, les détails de la restriction ne faisaient pas partie de l'exposé de relève au nouveau pilote en chef, qui avait assumé ces fonctions en juillet 2010. En conséquence, le premier officier a été jumelé avec des commandants non qualifiés à titre d'instructeur avant d'avoir satisfait aux exigences établies dans la dérogation.

1.18.5 Incapacité du pilote et désorientation spatiale

Dans certaines conditions, un pilote peut éprouver de la difficulté à s'acquitter de ses tâches normales en raison d'une quelconque déficience physiologique temporaire. Ce phénomène est souvent appelé une incapacité. Selon les SOP de Cougar Helicopters, une incapacité est « . . . un malaise physique qui pourrait compromettre le pilotage de l'hélicoptère . . . ». Une incapacité peut se manifester sous diverses formes, allant d'un manque très subtil de réactivité jusqu'à une perte de conscience complète. Elle peut prendre la forme d'une fixation ou encore d'une capacité réduite d'interpréter et de rapprocher divers indices. Comme l'expliquent les SOP de Cougar Helicopters, une incapacité subtile « peut se manifester sous forme de “vision tubulaire” ou simplement de surmenage général et de conscience limitée de la situation ».

L'incapacité peut survenir pour diverses raisons. Par exemple, elle peut être le résultat de fatigue, d'épuisement par la chaleur ou de tout autre type de stresseur physiologique. L'incapacité peut également survenir en raison d'une désorientation spatiale, phénomène selon lequel le cerveau du pilote interprète mal des indices de l'environnement concernant l'assiette de l'hélicoptère.

La désorientation spatiale peut être accompagnée d'une sensation de mouvement. Le cas échéant, cette sensation de mouvement peut être accablante, lorsque le pilote croit que l'aéronef se comporte différemment de la façon dont il se comporte en réalité. En l'absence d'indication visuelle extérieure, on peut surmonter la désorientation spatiale en se fiant aux instruments de vol et en ayant recours au vol aux instruments. Dans le présent cas, le commandant n'a pas éprouvé de sensations inhabituelles durant la descente, ni n'a perçu de sensations qui rendaient difficile pour lui la manipulation des commandes de vol.

Dans de nombreux cas, les pilotes peuvent ne pas se rendre compte qu'ils souffrent d'une quelconque incapacité. Par surcroît, il peut être très difficile pour d'autres membres d'un équipage de déterminer qu'un pilote est frappé d'incapacité lorsque celle-ci se manifeste subtilement et que la personne touchée donne tout de même des réponses appropriées aux interrogations d'un membre de l'équipage inquiet. Pour aider les pilotes à reconnaître le moment où un membre de l'équipage est frappé d'incapacité, les SOP de Cougar Helicopters précisent qu'un pilote est considéré comme étant frappé d'incapacité dans les cas suivants, ou dans l'un ou l'autre de ces cas :

Les SOP de Cougar Helicopters stipulent qu'un pilote qui se trouve en présence d'un pilote qui satisfait à l'une ou l'autre des conditions susmentionnées « doit prendre les commandes et s'assurer qu'un profil de vol sûr est suivi ». La procédure précise aussi que le pilote automatique doit être embrayé et que le contrôleur de la circulation aérienne (ATC) doit être informé de la situation. Dans le présent cas, le premier officier a cru observer la prise de mesures correctives. En aucun temps, le premier officier n'a cru que le commandant avait été frappé d'incapacité.

1.18.6 Rétablissement à partir d'assiettes anormales

La phase de départ est l'un des moments ou les risques pour les hélicoptères sont les plus grands. Comme il est mentionné dans le manuel Instrument Flying Handbook de la Federal Aviation AdministrationFootnote 43, les départs dans des conditions de mauvaise visibilité, de pluie ou de plafond bas sont particulièrement difficiles du fait qu'une transition soudaine du vol visuel au vol aux instruments peut entraîner des problèmes de désorientation spatiale et de maîtrise.

Selon le Instrument Flying Handbook,3 compétences essentielles sont requises pour assurer une maîtrise franche, mais en douceur, d'un hélicoptère pendant un vol aux instruments : la contre-vérification des instruments, l'interprétation des instruments et la maîtrise de l'aéronef. Une lacune au chapitre de l'une ou l'autre de ces compétences pourrait entraîner une assiette anormale. Une assiette anormale est toute manœuvre qui n'est pas requise pour le vol normal aux instruments des hélicoptères. Comme il est mentionné dans le manuel, les assiettes anormales peuvent être causées par [traduction] « un facteur tel que la turbulence, la désorientation, la défaillance d'instruments, la confusion, la préoccupation avec les tâches du poste de pilotage, le manque de diligence en contre-vérification, les erreurs d'interprétation des instruments ou le manque de capacité à maîtriser l'aéronef, ou une combinaison de ces facteurs»Footnote 44. De même, le Guide d'instructeur au pilotage de TC mentionne « qu'en vol aux instruments, le stress, la désorientation ou le vertige et le manque de pratique récente peuvent conduire à un manque d'attention ou de précision qui risque de provoquer des assiettes, des vitesses anémométriques et des réglages de puissance tombant à l'extérieur du domaine normal de vol aux instruments »Footnote 45. Étant donné l'instabilité inhérente des hélicoptères, les assiettes anormales présentent des risques importants pour l'équipage de conduite et les passagers des hélicoptères. En conséquence, il est essentiel de prendre des mesures opportunes pour rétablir l'hélicoptère dans un régime de vol sûr aussi rapidement que possible avec une perte minimale d'altitude.

Dans toute tentative de sortie d'une assiette anormale, il est essentiel que les pilotes ne commencent pas à centrer toute leur attention sur un seul instrument. Dans bien des cas, la fixation survient lorsque l'information ne correspond pas au modèle mental de la personne à ce moment-là. Le cas échéant, la personne peut commencer à avoir des idées fixes quand elle essaie d'interpréter avec prudence l'information qui ne cadre pas avec sa propre compréhension de la situation. La fixation sur un seul instrument de vol, à l'exclusion d'autres instruments de vol, entraîne habituellement une mauvaise maîtrise de l'aéronef. En conséquence, les pilotes doivent continuer à contre-vérifier tous les instruments de vol lorsqu'ils tentent de sortir d'une assiette anormale.

Dans le manuel Instrument Flying Handbook de la FAA, les 6 erreurs suivantes ont été désignées comme étant des erreurs courantes dans la sortie d'une assiette anormale :

Selon le Guide d'instructeur au pilotage de TC, « Le rattrapage doit être effectué en se référant à l'anémomètre, à l'altimètre, à l'indicateur de virage et d'inclinaison latérale et au variomètre. L'indicateur d'assiette peut être utilisé dans l'axe de roulis; cependant, dans l'axe du tangage, il faut y ajouter la lecture d'autres instruments »Footnote 47. Cela correspond aux directives fournies par la FAA, qui mentionnent qu'un pilote doit corriger l'inclinaison longitudinale et latérale, et ensuite régler la puissance, au besoin.

Dans le cadre du cours de transformation initial sur S-92A, on enseigne aux pilotes la procédure de rétablissement à partir d'assiettes anormales suivante .

En règle générale, on conseille aux pilotes de S-92A dans la formation initiale et périodique de régler le couple du moteur à 80 %. Dans la plupart des cas, cela donnera un taux de montée d'environ 750 pi/min ou plus selon la masse de l'hélicoptère. Les 2 pilotes en question connaissaient la procédure de rétablissement à partir d'assiettes anormales susmentionnée; elle leur avait été enseignée dans le cadre de leur cours de transformation initial sur S-92A.

1.18.7 Formation sur simulateur

La formation sur simulateur donne aux pilotes l'occasion de pratiquer des manœuvres qui, normalement, ne sont pas mises en pratique dans le cadre de véritables opérations en vol. Le fait de donner aux pilotes l'occasion de pratiquer ces manœuvres dans un environnement contrôlé leur permet d'acquérir de la confiance en leurs capacités de gérer une situation semblable si elle survenait dans le cadre de véritables opérations en vol.

Avant l'événement, la formation périodique sur simulateur de Cougar Helicopters ne comprenait pas de formation spécialisée en rétablissement à partir d'assiettes anormales (c.-à-d. de multiples sorties d'assiette anormale). Aucun règlement n'exige que soit donnée une telle formation. Plutôt, les sorties d'assiette anormale n'étaient pratiquées que si elles survenaient dans le cadre d'une séquence d'apprentissage. En conséquence, si les pilotes ne provoquaient pas accidentellement d'assiette anormale, ce genre de situation ne faisait pas partie de leurs exercices dans le simulateur. Ainsi, les pilotes de Cougar Helicopters ne pratiquaient pas activement les sorties d'assiette anormale dans le cadre de la formation périodique sur simulateur.

La formation périodique sur simulateur de Cougar Helicopters comprenait habituellement un exercice d'incapacité subtile. Le scénario de formation comprenait une situation où l'un des pilotes cesse de réagir. Les pilotes étaient avisés avant la séance de formation que cela se produirait à un certain moment durant la séance. Le scénario était normalement lancé par l'instructeur, qui tapait sur l'épaule d'un des pilotes. À compter de ce moment, ce pilote cessait de répondre aux interrogations de l'autre pilote. Le PM, sachant que la simulation comprenait un scénario d'un pilote frappé d'incapacité, devait mettre en œuvre les mesures requises et prendre les commandes de l'hélicoptère. Ces séances ne comportaient pas de scénarios où le PF continue de répondre aux interrogations du PM, mais ne prend aucune mesure pour rectifier le problème.

Pendant la formation sur simulateur, on mettait très peu l'accent sur l'importance d'utiliser la partie supérieure du PFD pour vérifier l'embrayage du pilote automatique.

1.18.8 Formation sur la gestion des ressources en équipe

Même si aucun règlement n'oblige les exploitants visés par la sous-partie 704 du RAC à le faire, Cougar Helicopters a mis en œuvre un programme de formation interne appelé CHARM. Selon les SOP de Cougar Helicopters, CHARM est un « programme holistique qui comprend la base d'un programme de CRM traditionnel, mais qui va au-delà de la définition étroite de la CRM pour traiter plus en détail des questions de rendement humain et d'équipes au-delà de ce qui se produit uniquement dans le poste de pilotage ». Notamment, les modules suivants sont au cœur du cours CHARM :

  1. gestion des menaces et des erreurs;
  2. traitement cognitif de l'information;
  3. prise de décisions;
  4. nutrition et stress;
  5. fatigue;
  6. règles, règlements et SOP;
  7. communication;
  8. connaissance de la situation;
  9. gestion des tâches et de la charge de travail;
  10. rendement de l'équipe;
  11. automatisation.

Les employés de l'entreprise sont tenus de suivre 6 heures de formation initiale en CRM. Ensuite, ils doivent suivre une formation annuelle en CRM de 2 heures.

L'un des principes fondamentaux de la gestion des ressources en équipe dans un environnement multipilote est que les membres de l'équipage doivent être prêts à s'entraider, et même à prendre les commandes si la sécurité du vol est compromise. Dans la section Communications du manuel CHARM, il est stipulé que dans une situation d'urgence, il faut « donner des directives très précises ou intervenir au besoin! » On poursuit en donnant des exemples d'annonces d'urgence : « si nous ne [action] immédiatement, je vais prendre les commandes », ou « même un simple “j'ai les commandes” »Footnote 48.

Le manuel CHARM mentionne aussi la fixation ou la préoccupation (attention canalisée) comme « une des plus importantes causes de perte de conscience de la situation ». Le manuel mentionne de plus que « cela se produit lorsque nous concentrons notre attention sur une seule chose ou un seul événement en particulier à l'exclusion de tous les autres, ce qui détourne notre attention de la situation dans son ensemble ».

Pour aider les pilotes qui peuvent se trouver dans une situation difficile dans laquelle ils peuvent devoir prendre les commandes d'un autre pilote, les SOP de Cougar Helicopters font référence à la règle de communication bilatérale, qui est un outil de CRM généralement reconnu. Selon la règle de communication bilatérale, le PM doit signaler au PF tout écart par rapport au profil de vol désiré. Si les mesures appropriées ne sont pas prises pour rectifier la situation, le PM doit répéter ce qu'il a dit, en employant la terminologie approuvée des SOP. Si les mesures appropriées ne sont pas mises en œuvre après la seconde interrogation, le PM doit prendre les commandes et de continuer le vol.

Lorsque le nez de l'hélicoptère en cause a commencé à se cabrer fortement, le premier officier était en train de sélectionner la rentrée du train d'atterrissage et de régler le commutateur du système de flottaison à la position sûre. Pendant ces brefs instants, le premier officier ne surveillait pas attentivement les instruments de vol. Immédiatement après ces sélections de commutateurs, le premier officier s'est rendu compte que l'hélicoptère descendait en cabré à basse vitesse anémométrique. Le premier officier a immédiatement verbalisé ses inquiétudes au commandant, en annonçant des écarts d'assiette et de vitesse anémométrique. Peu de temps après la première annonce d'écart, l'avertissement sonore « Don't sink » a aussi commencé à sonner et le premier officier a continué de faire des annonces d'assiette et de vitesse anémométrique au commandant, mais n'a pas pris les commandes de l'hélicoptère après cette deuxième interrogation. Cela est dû au fait que le premier officier croyait que le commandant effectuait les corrections nécessaires et que prendre les commandes de l'hélicoptère ne ferait vraisemblablement qu'empirer la situation. Le premier officier a plutôt réarmé le système de flottaison d'urgence en préparation pour un impact avec l'eau. C'était la première fois que le premier officier se trouvait dans une situation où des annonces d'écart étaient faites sans que le PF prenne des mesures correctives positives pour rectifier la situation.

Des études ont révélé que les premiers officiers sont souvent réticents à remettre en question les décisions du commandant, et encore plus à s'emparer des commandesFootnote 49. Des discussions informelles avec des pilotes civils et militaires menées dans le cadre de l'enquête ont révélé que de nombreux pilotes ayant moins d'expérience vont s'en remettre aux décisions de commandant, surtout lorsque la différence d'expérience entre les 2 pilotes est importante. Dans certains scénarios de formation, les PF ont testé leurs premiers officiers moins expérimentés en maintenant intentionnellement une vitesse anémométrique trop élevée ou un angle d'approche trop accentué. Lorsque le PM l'interrogeait, le PF répondait à l'interrogation du PM, mais les mesures appropriées n'étaient pas prises. Dans de nombreux cas, les PM pouvaient tenter à maintes reprises d'aviser le PF du problème perçu; cependant, ils étaient souvent réticents à saisir les commandes de l'aéronef, même si les marges de sécurité étaient compromises. Ce problème avait déjà été relevé dans le cas de l'accident, en 2009, du vol Cougar 491 (rapport d'enquête A09A0016 du BST). Le rapport a révélé que le manque d'assurance du premier officier a empêché la prise en compte de ses préoccupations à l'égard du profil de vol de l'hélicoptère dans le processus de prise de décisions du commandant).

1.18.9 Événements antérieurs

Le 26 août 2007, un S-92A de Cougar Helicopters a été mis en cause dans un événement suivant une approche interrompue de la plateforme pétrolière Hibernia en raison d'une mauvaise visibilité. On a alors entrepris une seconde approche et durant celle-ci, le PM a été capable de voir la plateforme pétrolière; la décision de continuer l'atterrissage sur la plateforme a été prise. Lorsque le PM a pris les commandes, il a essayé de découpler le directeur de vol. Les modes de vitesse anémométrique et de cap se sont découplés; cependant, le mode de maintien d'altitude radar ne s'est pas désactivé. En conséquence, l'hélicoptère a essayé de maintenir l'altitude lorsque le collectif a été abaissé pour amorcer la descente de 150 pieds asl. L'assiette en tangage de l'hélicoptère est passée de 10° vers le haut à un maximum de 21° en cabré. Cela a entraîné une baisse rapide de la vitesse anémométrique à environ 26 nœuds, qui a poursuivi sa chute jusqu'à 0 à un certain moment. Le taux de descente de l'hélicoptère a atteint 790 pi/min et il a été redressé à 31 pieds asl. À la suite de la descente inopinée, une autre approche interrompue a été effectuée.

Le 12 novembre 2008, un S-92A de Cougar Helicopters a subi un surcouple de la boîte de transmission principale durant une approche aux instruments de nuit vers une plateforme pétrolière extracôtière. Durant l'approche, le premier officier a éprouvé de la difficulté à maîtriser l'hélicoptère. Avec l'altitude de l'hélicoptère couplée au maintien d'altitude radar à 500 pieds au-dessus de l'eau, le premier officier a abaissé le collectif pour corriger la vitesse anémométrique excessive. Pendant que l'hélicoptère essayait de maintenir l'altitude sélectionnée, la vitesse anémométrique diminuait, et une vitesse verticale de descente élevée s'en est suivie. Le premier officier, ayant constaté le taux de descente, a augmenté le collectif pour arrêter la descente. L'hélicoptère a alors pris une assiette en tangage vers le haut d'environ 20° en cabré. Reconnaissant qu'il avait de la difficulté à maîtriser l'hélicoptère, le premier officier a cédé les commandes au commandant. Le commandant a ensuite ramené l'hélicoptère à une altitude sécuritaire, l'hélicoptère est retourné au Global Santa Fe et le moteur a été coupé. Il a été déterminé plus tard que l'équipage de conduite avait eu un dépassement des limites de couple de la boîte de transmission principale (BTP) de 135 % de 11 secondes, suivi d'un dépassement transitoire des limites de couple de 127 % de 1 seconde. L'hélicoptère est ensuite descendu à une altitude de 250 pieds au-dessus de l'eau.

Ni l'un ni l'autre de ces événements n'a été signalé au BST à l'époque où il s'est produit. Aux termes du paragraphe 2(1) du Règlement sur le Bureau de la sécurité des transports, un « incident aéronautique à signaler » est un incident résultant directement de l'utilisation d'un avion d'une masse maximale homologuée au décollage de plus de 5700 kg, ou de l'utilisation d'un giravion d'une masse maximale homologuée au décollage de plus de 2250 kg. Y sont énumérés plusieurs critères relatifs aux incidents à signaler. Par exemple, un incident est à signaler si « d) des difficultés de pilotage surviennent en raison d'une défaillance de l'équipement de l'aéronef, d'un phénomène météorologique, d'une turbulence de sillage, de vibrations non maîtrisées ou du dépassement du domaine de vol de l'aéronef »Footnote 50.

1.18.10 Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers

À la suite de l'écrasement du vol Cougar 491, l'Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers (OCTHE) a établi une Commission d'enquête sur les questions concernant la sécurité des hélicoptères de passagers pour les travailleurs de Terre-Neuve-et-Labrador dans la zone extracôtière. La Commission a produit une série de recommandations visant à réduire les risques liés au transport par hélicoptère de travailleurs de plateformes pétrolières au niveau acceptable le plus bas que l'on puisse atteindre dans la zone extracôtière de Terre-Neuve-et-Labrador.

Dans le cadre de sa stratégie de mise en œuvre, l'OCTHE a créé un poste de chef de la sécurité et a ajouté un conseiller en aviation à son équipe de sécurité aérienne. De plus, les recommandations de l'enquête ont entraîné la création d'un cadre de travail dans lequel l'OCTHE jouera un rôle accru dans la surveillance de la gestion de la sécurité des exploitations extracôtières. Cela permettra à l'OCTHE d'avoir les fonctions et les outils nécessaires pour surveiller la formation, la culture de sécurité et les activités des fournisseurs de service. L'objectif est de s'assurer que les exploitants extracôtiers et Cougar Helicopters prennent les mesures adéquates pour corriger les manquements systémiques à la sécurité.

1.19 Techniques d'enquête utiles ou efficaces

Sans objet.

2.0 Analyse

Aucun élément n’indique que l’événement ait pu être causé par une défaillance d’un système de l’aéronef. En conséquence, l’analyse porte essentiellement sur les facteurs opérationnels qui ont contribué à la descente inopinée survenue durant le décollage du Sea Rose.

De plus, certains facteurs organisationnels seront analysés en vue d’améliorer la sécurité dans le domaine de l’aviation.

2.1 Pilotage de l’aéronef

La première partie du départ du Sea Rose a été effectuée manuellement par le commandant, qui a déplacé rapidement le cyclique vers l’avant, à un taux de près de 7° par seconde, pour adopter l’assiette d’accélération. Alors que l’hélicoptère passait la vitesse de sécurité au décollage (V2) en accélération, le commandant a tiré fortement le cyclique vers l’arrière à un taux moyen de 5,6° par seconde, ce qui a entraîné l’hélicoptère dans un cabré avec décélération. Pendant que l’assiette en tangage passait 2,4° en cabré et que la vitesse anémométrique et la vitesse verticale augmentaient, le commandant a relâché le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique, puis a embrayé la remise des gaz (GA). La vitesse anémométrique à ce moment était de 64 nœuds (KIAS). Après avoir activé le mode GA, le commandant a relâché la pression manuelle exercée sur le manche de cyclique, car il croyait que l’hélicoptère allait amorcer une montée à 750 pieds par minute (pi/min) dans une assiette en roulis à l’horizontale conformément au profil type du mode GA.

Ayant constaté l’assiette de cabré anormale, le commandant a essayé de corriger le problème en appuyant momentanément sur le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique. Cependant, le commandant n’a pas établi une assiette appropriée, selon les procédures d’utilisation normalisées (SOP) de Cougar Helicopters, pour sortir de l’assiette en cabré anormale dans laquelle l’hélicoptère était entré parce qu’il avait initialement tiré sur le cyclique. Lorsque le commandant a relâché le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique, la référence de vitesse anémométrique de l’hélicoptère est passée à 56 KIAS et a continué de diminuer en raison de la position du manche de cyclique vers l’arrière et, dans une moindre mesure, des forces aérodynamiques associées au refoulement. Lorsque la vitesse anémométrique de l’hélicoptère est descendue jusqu’à moins de 5 nœuds de la vitesse minimale de vol aux instruments (Vmini), le commandant a appuyé momentanément sur le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique et a tiré le cyclique vers l’arrière. Cela a fait chuter la vitesse anémométrique sous la Vmini, et l’hélicoptère a été entraîné dans un cabré anormal de 23°.

Pendant que l’hélicoptère descendait vers l’eau, le commandant a essayé de sortir de l’assiette en cabré anormale causée par l’activation du mode GA. Cependant, même avec son attention concentrée principalement sur l’indicateur d’assiette, il n’a pas corrigé le cabré excessif et ne s’est pas rendu compte de la gravité de la descente jusqu’à ce que l’hélicoptère descende sous les nuages.

De plus, malgré l’alerte sonore « Don’t sink », il n’a fait aucune tentative initiale d’arrêter la descente, qui a atteint une vitesse maximale de 1880 pi/min, avec un mouvement de lacet à droite. Il est probable que le commandant ait eu de la difficulté à assimiler l’information présentée sur les instruments de vol, ne s’étant pas attendu à y voir cette information. Le commandant, frappé d’incapacité subtile, possiblement en raison de la désorientation spatiale, n’a pas abaissé le nez de l’hélicoptère et appliqué le collectif au moment opportun pour sortir de l’assiette en cabré anormale. Cela a contribué à la perte excessive d’altitude durant la descente inopinée.

Alors que l’hélicoptère descendait sous la base des nuages, sa vitesse verticale de descente a atteint 1880 pi/min, à une altitude de 156 pieds au-dessus de l’eau. À cette vitesse, l’hélicoptère était à moins de 5 secondes de percuter l’eau. En réponse à l’approche rapide de la surface de l’eau, le commandant a tiré brusquement sur le collectif pour arrêter la descente. L’application rapide du collectif pour arrêter la descente inopinée a causé le dépassement des limites de couple de la transmission. Comme prévu, le système FADEC de l’hélicoptère en cause est entré en mode « blowaway » lorsque le régime du rotor principal (Nr) est descendu sous 100 %, les 2 moteurs en marche. En mode « blowaway », les pilotes avaient plus de puissance à leur disposition pour arrêter la descente avant de heurter la surface de l’eau. Pendant l’application rapide du collectif, ni l’un ni l’autre des pilotes ne s’est rendu compte que les limites opérationnelles de la transmission avaient été dépassées pendant le rétablissement; les pilotes ont poursuivi le vol de retour à CYYT.

2.2 Enregistreur de vol multifonction

L’enregistreur de vol multifonction (MPFR) n’a pas été mis en sécurité immédiatement après l’événement. En conséquence, de précieux renseignements, qui auraient pu contribuer à l’enquête, ont été perdus. Le BST a documenté de nombreux exemples où des données critiques de l’enregistreur de données de vol (FDR) ou de l’enregistreur de conversations de poste de pilotage (CVR) ont été perdues parce que ces données n’avaient pas été mises en sécurité à la suite d’un événement. Dans le présent cas, les données du FDR étaient essentielles pour déterminer ce qui s’est passé lors du vol en question. Cependant, en l’absence de données du CVR, il a été plus difficile pour les enquêteurs d’analyser les actions de l’équipage de conduite pendant l’événement. Le défaut de prendre des mesures appropriées pour mettre en sécurité les données du FDR et du CVR après un événement entraîne un risque accru que de précieux renseignements liés à la sécurité soient perdus.

2.3 Système d’avertissement de proximité du sol amélioré

Peu de temps après le début de la descente inopinée, l’EGPWS de l’hélicoptère en cause a commencé à émettre un avertissement sonore « Don’t sink » de mode 3. Ensuite, alors que l’hélicoptère descendait en dessous de 150 pieds altitude radar, l’EGPWS a aussi déclenché l’alerte sonore « Too low gear » de mode 4A. L’avertissement sonore « Don’t sink » a avisé l’équipage de conduite, au moment opportun, que le départ ne se déroulait pas comme prévu. Cependant, l’avertissement sonore « Don’t sink » a été déclenché uniquement parce que le train d’atterrissage était rentré au moment de la descente inopinée. Sur le S-92A, le mode 1 est désactivé en raison d’un nombre élevé de fausses alarmes dans le cadre d’approches normales, et selon le raisonnement qu’une vitesse verticale de descente excessive n’est pas aussi courante pour les hélicoptères qu’elle l’est dans le cas des aéronefs à voilure fixe. De plus, avec le train sorti, la protection de mode 3 cesse lorsque la vitesse anémométrique de l’hélicoptère baisse sous 40 KIAS. La décision d’utiliser 40 KIAS comme seuil minimal de vitesse anémométrique pour le mode 3 avec le train sorti était considérée comme un compromis acceptable pour éviter les fausses alarmes durant les décollages interrompus. De plus, la décision du fabricant a aussi été influencée par la conviction que s’il se produisait une descente inopinée durant le décollage, elle ne serait pas accompagnée d’une réduction importante de vitesse anémométrique.

Cependant, cela crée une lacune sur le plan de la protection fournie par l’EGPWS du S-92A. Par exemple, si l’hélicoptère est en montée pendant que le train d’atterrissage est toujours sorti et qu’il se produit une descente inopinée avant que la vitesse de l’hélicoptère n’atteigne 50 KIAS, ou si la vitesse anémométrique descend sous 40 KIAS après avoir atteint 50 KIAS, l’EGPWS n’offrira aucune protection contre les impacts sans perte de contrôle (CFIT), peu importe le taux de descente. De même, si un hélicoptère est en approche, le train d’atterrissage sorti, et que la vitesse anémométrique descend sous 40 KIAS, l’EGPWS n’offre aucune protection contre une descente inopinée. Aucun seuil de vitesse verticale de descente n’est établi, pour les besoins de l’EGPWS, pour permettre de faire la différence entre une descente contrôlée et une descente inopinée qui pourrait entraîner un CFIT.

En raison de la nature de l’exploitation au large des côtes de Terre-Neuve, les équipages de conduite doivent couramment voler dans des conditions météorologiques de vol aux instruments (IMC). Dans de telles conditions, les pilotes doivent se fier aux instruments de vol de l’aéronef et ils sont susceptibles de désorientation spatiale. Comme le montrent le présent événement et les 2 événements antérieurs mentionnés dans le présent rapport, la transition à destination et au départ d’une installation extracôtière a donné lieu à une descente inopinée à basse vitesse anémométrique et à vitesse verticale de descente élevée. Heureusement, dans les 3 cas, l’équipage de conduite a été en mesure d’arrêter la descente avant l’impact avec la surface de l’eau. L’EGPWS du S-92A ne donne pas d’avertissement d’une descente inopinée à des vitesses anémométriques inférieures à 40 KIAS lorsque le train d’atterrissage est sorti. En conséquence, ces phases de vol présentent un risque accru de CFIT.

Comme il est mentionné dans la Liste de surveillance du BST, les impacts sans perte de contrôle représentent un risque important pour les voyageurs. Un des plus grands progrès dans la lutte contre le risque de CFIT est l’introduction des systèmes d’avertissement et d’alarme d’impact (TAWS) et EGPWS. Cependant, pour profiter pleinement des avantages d’un EGPWS, il faut enseigner la procédure d’évitement des CFIT appropriée aux équipages de conduite et leur donner des occasions de mettre cette procédure en application. Malgré le fait que Cougar Helicopters avait établi une procédure d’évitement des CFIT dans ses SOP, la procédure n’a pas été suivie en réponse aux alertes sonores « Don’t sink ». Dans le présent cas, le collectif a été augmenté environ 16 secondes après le début de la descente de l’aéronef. En conséquence, la vitesse verticale de descente de l’hélicoptère a augmenté excessivement, et celui-ci s’est trouvé à quelques secondes près d’entrer en collision avec l’eau. Les délais dans la mise en œuvre de la procédure d’évitement des CFIT en réponse à une alerte de l’EGPWS entraînent un risque accru de CFIT.

2.4 Automatisation

Les pilotes de Cougar Helicopters sont encouragés à exploiter au maximum l’automatisation du S-92A, et le recours à l’automatisation à 3 paramètres est obligatoire pour les départs d’une plateforme pétrolière au large des côtes. Malgré les raisons valides qui sous-tendent cette philosophie, il demeure important que les pilotes maintiennent un niveau suffisant d’aptitudes au pilotage manuel, dans l’éventualité où une intervention du pilote serait requise en raison d’une défaillance du pilote automatique ou d’un régime de vol imprévu, comme une assiette anormale. Les SOP de Cougar Helicopters exigeant le recours à l’automatisation à 3 paramètres durant le départ découlent des difficultés de maîtrise éprouvées par un autre équipage de conduite. Cela montre bien que le maintien d’un niveau suffisant de compétences en pilotage demeure un élément essentiel des tâches du pilote. L’introduction d’une règle exigeant le recours à l’automatisation ne résout pas le problème sous-jacent de la diminution des aptitudes au pilotage manuel, qui peut fort bien survenir en raison du grand rôle accordé à l’automatisation. Comme le montre le présent événement, les limites de conception des systèmes ont empêché l’automatisation du S-92A de sortir l’aéronef d’une assiette anormale. Cependant, le commandant a éprouvé de la difficulté à sortir de l’assiette anormale dans des conditions IMC. De plus, le premier officier n’a pas tenté de prendre les commandes de l’hélicoptère, croyant que cela aurait probablement aggravé la situation. Même si le premier officier cumulait un total de près de 1000 heures de vol sur le S-92A, un grand nombre de ces heures étaient en vol couplé dans le cadre de vols aux instruments (IFR) à destination et au départ d’installations extracôtières et non pas en pilotage manuel de l’hélicoptère. En conséquence, le premier officier ne croyait pas posséder les compétences nécessaires en matière de vol IFR pour sortir en toute sécurité de l’assiette anormale. Il est essentiel que les pilotes d’aéronefs hautement automatisés restent vigilants lorsque vient le temps d’utiliser le pilote automatique et qu’ils aient suivi une formation sur son utilisation appropriée et ses limites. Si les pilotes d’aéronefs automatisés ne maintiennent pas leurs compétences de vol manuel à vue et aux instruments, il y a un risque accru qu’ils soient réticents à prendre les commandes et qu’ils éprouvent de la difficulté à sortir de profils de vol inattendus qui demandent une intervention du pilote.

Lorsque le mode GA a été activé, l’hélicoptère volait dans le domaine de vol approuvé selon le manuel de vol de giravion (RFM) du S-92A. Cependant, l’hélicoptère n’était pas dans un régime de vol stable. Alors que l’assiette en cabré de l’hélicoptère augmentait, le directeur de vol de l’hélicoptère devait être en train d’essayer d’établir le profil de GA. Cependant, la vitesse verticale à ce moment correspondait au double du taux de montée standard de 750 pi/min pour le mode GA. En conséquence, le directeur de vol n’allait pas commander une augmentation immédiate du collectif. En outre, le directeur de vol aurait essayé de revenir lentement à 80 KIAS; cependant, les vérins de compensateur sont conçus pour apporter lentement et en douceur des corrections en réponse aux commandes du directeur de vol. En mode GA, le directeur de vol est limité à un changement d’assiette de 2° et les changements d’assiette subséquents sont limités à 2° par seconde. En conséquence, si un important changement d’assiette en tangage est requis, il pourrait s’écouler beaucoup de temps avant que le système soit capable d’adopter le profil de vol voulu. Comme le montre le présent événement, cela pourrait entraîner une baisse de vitesse anémométrique sous la Vmini, ce qui causerait le désembrayage du pilote automatique. Le mode de remise des gaz du S-92A est conçu avec une maîtrise réduite des commandes. En raison de cette maîtrise réduite des commandes, le directeur de vol a eu de la difficulté à sortir du cabré qui est survenu après l’activation du mode GA. Cela souligne l’importance de s’assurer que l’hélicoptère est compensé de façon adéquate, en vol stabilisé, avant de procéder à l’embrayage du pilote automatique.

Dans le présent cas, les pilotes n’utilisaient pas la partie supérieure des écrans de vol principaux (PFD) pour confirmer et surveiller le fonctionnement du coupleur. L’enquête a révélé que la plupart des pilotes de Cougar Helicopters n’avaient pas appris à se reporter à la partie supérieure du PFD pour vérifier l’embrayage du pilote automatique. Ceux-ci se fiaient plutôt aux marques de référence sur l’anémomètre et le variomètre comme principal moyen de vérifier l’embrayage approprié du mode GA. Même si cela n’a pas contribué à la gravité de l’événement, cela représente un risque potentiel pour l’équipage de conduite et les passagers. Les pilotes de S-92A qui ne consultent pas la partie supérieure du PFD pour confirmer l’embrayage approprié du pilote automatique pourraient être incapables de savoir si le système est dégradé ou s’il n’est pas embrayé.

2.5 Remise des gaz

Le RFM du S-92A indique que le mode GA peut être utilisé pour sortir d’assiettes anormales. Cependant, comme le montre le présent événement, la capacité du mode GA de sortir d’une assiette anormale dépend en grande partie du profil de vol au moment de son activation. Si l’hélicoptère n’est pas en vol compensé stabilisé, le système de commandes automatiques de vol (AFCS) peut ne pas avoir l’autorité de commande requise pour apporter les corrections nécessaires en tangage et au collectif pour sortir de l’assiette anormale et adopter le profil type de vol GA. Cela pourrait entraîner une perte excessive de vitesse anémométrique et d’altitude quand l’hélicoptère est dans une assiette anormale. Si la vitesse anémométrique est inférieure à la Vmini au moment de l’assiette anormale, le mode GA ne s’activera pas et le pilote devra sortir manuellement de l’assiette anormale. Cela pourrait retarder le temps de rétablissement et entraîner une perte excessive d’altitude.

De même, si la vitesse anémométrique descend sous la Vmini après l’activation du mode GA, celui-ci se désactivera et cessera d’agir sur les commandes. Une fois de plus, le pilote devra intervenir et sortir manuellement de l’assiette anormale. Dans les 2 cas, les pilotes pourraient se trouver dans une situation très précaire s’ils se sont fiés au mode GA pour sortir d’une assiette anormale, conformément au RFM du S-92A. En conséquence, il est important que les pilotes de S-92A comprennent les limites du mode GA et reconnaissent la possibilité que ce mode soit incapable de sortir l’hélicoptère d’une assiette anormale en raison des limites de sa conception. Le RFM du S-92A peut induire en erreur parce qu’il affirme que le mode GA peut être utilisé pour sortir d’une assiette anormale. Le mode GA ne fonctionnera pas à une vitesse inférieure à 50 KIAS, et la rapidité des changements d’assiette et de puissance est limitée. En conséquence, les pilotes et les passagers courent un risque plus élevé de collision avec le relief si les pilotes essaient d’utiliser le mode GA pour sortir d’une assiette anormale à basse altitude.

Le mode GA est conçu pour réduire la charge de travail du pilote en lui permettant de commander une montée à l’horizontale en appuyant sur un seul bouton. Le mode GA fournit aussi un profil type de vol qui est désirable du point de vue du confort pour les passagers. À Cougar Helicopters, on encourage activement les pilotes à utiliser le mode GA pour les départs d’une plateforme pétrolière au large des côtes, et la vaste majorité des pilotes ont de fait adopté cette pratique. La section sur les départs d’une plateforme ou d’un navire des SOP de Cougar Helicopters mentionne l’activation de la remise des gaz jusqu’à 55 KIAS. Même si cette vitesse se situe dans le domaine d’exploitation du système de pilote automatique du S-92A, elle est très près de la Vmini. Si la vitesse anémométrique venait à baisser en dessous de la Vmini après l’activation du mode GA, comme dans le cas présent, cela entraînerait le découplage du système et le pilote serait obligé de piloter l’hélicoptère manuellement. Si un pilote n’assure pas une surveillance étroite du départ, il pourrait s’ensuivre un écart imprévu par rapport au profil type. Si la remise des gaz est activée à 55 KIAS, conformément aux SOP de Cougar Helicopters, il existe un risque accru que le mode GA se désactive en raison d’une baisse transitoire de la vitesse anémométrique en dessous de la Vmini.

Dans le présent cas, le commandant a appuyé sur le bouton de débrayage du compensateur d’effort et l’a tenu enfoncé jusqu’au tout dernier moment précédant l’activation du mode GA. L’enquête a révélé que cette technique était employée par certains pilotes de Cougar Helicopters. Par contre, d’autres pilotes à Cougar Helicopters appuient sur le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique en vol stationnaire juste avant la transition au vol avant. Cette technique établit l’hélicoptère dans une assiette qui est presque semblable à l’assiette type de remise des gaz. Selon cette technique, la transition du vol non couplé au vol couplé se produit à la suite d’un relâchement graduel de la pression vers l’avant sur le cyclique jusqu’à ce que l’hélicoptère reprenne l’assiette compensée précédente. De plus, cette technique place aussi le manche de cyclique dans une position compensée qui facilite la sortie d’une assiette anormale, le cas échéant. Selon cette technique, le pilote relâche la pression exercée sur le manche et applique le collectif, et l’assiette de l’hélicoptère va adopter un profil de montée initiale à l’horizontale. Cougar Helicopters n’a pas de procédure normalisée d’utilisation du bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique pendant le départ. Cela pourrait causer des difficultés s’il faut effectuer un transfert rapide des commandes pendant le départ.

2.6 Procédures d’utilisation normalisées

2.6.1 Généralités

Les SOP de Cougar Helicopters énumèrent plusieurs annonces normalisées conçues pour accroître l’efficacité de l’équipage et améliorer la communication. Ces annonces normalisées portent sur un certain nombre d’écarts différents par rapport au profil de vol voulu; cependant, il n’y a pas d’annonce normalisée pour les écarts de tangage des hélicoptères. En conséquence, aucune limite prédéfinie n’a été établie pour les annonces normalisées afin de désigner les assiettes en piqué ou en cabré excessifs, qui sont habituellement associées aux assiettes anormales. L’absence d’annonces normalisées pour les écarts de tangage accroît la probabilité de mauvaises communications pendant les sorties d’assiette anormale.

2.6.2 Appariement des membres d’équipage

L’équipage du vol en question respectait la politique d’appariement des membres d’équipage de Cougar Helicopters interdisant à 2 pilotes ayant cumulé moins de 300 heures sur type de voler ensemble, et la matrice de tolérance du risque n’indiquait pas de niveau de risque anormalement élevé pour le vol en question. Cependant, des mesures supplémentaires de contrôle des risques liés à l’appariement des membres d’équipage avaient été mises en place pour répondre aux exigences des clients. Dans le présent cas, ces mesures n’ont pas été suivies. Afin de garantir un degré équivalent de sécurité, puisque le nombre d’heures de vol sur hélicoptère du premier officier ne respectait pas les exigences minimales du client à cet égard, le premier officier devait voler uniquement avec des pilotes instructeurs désignés jusqu’à l’obtention du nombre d’heures de vol minimum requis. Cette restriction visant le premier officier a été appliquée pendant plusieurs mois, puis on a commencé à le jumeler avec des commandants non qualifiés à titre d’instructeur. De plus, le nouveau pilote en chef n’a pas été avisé de la restriction. Cougar Helicopters n’avait pas établi de processus formel pour garantir le respect des restrictions liées à l’appariement des membres d’équipage. Ainsi, le premier officier en cause était jumelé à des pilotes qui n’étaient pas qualifiés à titre d’instructeur. En conséquence, cette mesure de contrôle des risques n’offrait aucune réduction des risques.

2.7 Formation sur simulateur

La réglementation n’exige pas la tenue d’exercices de rétablissement à partir d’assiettes anormales dans le cadre de la formation périodique, que ce soit dans un aéronef ou un simulateur. En conséquence, il incombe à l’exploitant de décider s’il convient d’offrir une formation à cet égard. Même si l’automatisation des aéronefs modernes d’aujourd’hui offre des niveaux de sécurité relevés, il est essentiel que les équipages de conduite maintiennent des compétences manuelles suffisantes dans l’éventualité peu probable où ils devraient prendre les commandes dans une assiette de vol précaire, comme une assiette anormale. Si les équipages de conduite ne reçoivent pas de formation périodique en rétablissement à partir d’assiettes anormales, ils sont plus susceptibles d’éprouver de la difficulté à sortir d’une assiette anormale.

La formation périodique sur simulateur de Cougar Helicopters comprenait un exercice sur l’incapacité subtile; cependant, le scénario habituel était celui d’un pilote aux commandes (PF) qui cessait de réagir, ce qui obligeait l’autre pilote à prendre les commandes. De plus, l’équipage de conduite en était habituellement informé à l’avance et savait donc qu’une telle situation surviendrait pendant la séance sur simulateur. Il en résulte un scénario d’entraînement irréaliste et non représentatif du type d’incapacité subtile le plus susceptible de se produire, soit une situation où le pilote semble essayer d’apporter les corrections appropriées, qui sont toutefois inadéquates pour rectifier la situation. Si les équipages de conduite ne reçoivent pas de formation sur la façon de reconnaître l’incapacité subtile et d’intervenir dans une telle situation, ils peuvent ne pas avoir la confiance nécessaire pour prendre les commandes d’un pilote plus expérimenté.

2.8 Gestion des ressources en équipe

Bien qu’aucun règlement n’oblige les exploitants visés par les sous-parties 702, 703 et 704 du Règlement de l’aviation canadien (RAC) à offrir une formation relative à la gestion des ressources en équipe (CRM), Cougar Helicopters s’est fait l’agent des concepts de CRM et a élaboré une formation initiale et périodique interne à cet égard. Le cours CHARM encourage le respect de l’autorité du commandant; cependant, il fait aussi valoir la responsabilité des autres membres de l’équipage d’assurer la sécurité du vol. Pour accroître l’efficacité de l’équipage de conduite, le cours CHARM lui fournit des stratégies pratiques qu’il peut mettre en application dans le poste de pilotage. Notamment, le cours CHARM fournit à l’équipage de conduite une série de stratégies de communication qui commencent par des questions exploratoires légères, pour en venir ensuite à une démarche plus affirmative, conçue pour éliminer toute ambiguïté et ramener les marges de sécurité à des niveaux acceptables. Cependant, ces stratégies de communication ne seront efficaces que si l’équipage de conduite est formé pour les utiliser et qu’il a eu des occasions de les mettre en application dans le cadre de la formation et en cours de vol. Si la formation sur simulateur et en vol ne comporte pas d’exercices liés aux stratégies de CRM, il existe un risque accru que les équipages de conduite subissent des défaillances de CRM qui pourraient diminuer les marges de sécurité.

Dans le cas présent, le premier officier a communiqué verbalement avec le commandant à plusieurs reprises pour aider à sortir l’hélicoptère de l’assiette anormale. Cependant, malgré sa décision de réarmer le système de flottaison sur le fondement de la croyance qu’un impact avec l’eau était imminent, le premier officier n’a pas essayé de prendre les commandes du commandant. Le premier officier n’a pas reconnu les symptômes d’incapacité subtile, qui sont décrits dans les SOP de Cougar Helicopters. En conséquence, le premier officier n’a pas pris les commandes du commandant, parce que ce dernier fournissait les réponses verbales appropriées à ses interrogations. Cette situation n’est pas inhabituelle. Comme il est mentionné précédemment dans le rapport, les premiers officiers sont souvent réticents à prendre les commandes de leurs commandants. En l’occurrence, le premier officier croyait qu’une tentative de prendre les commandes aggraverait la situation. Cela indique que le premier officier ne croyait pas posséder les aptitudes au pilotage manuel nécessaires pour sortir de la descente inopinée, malgré le fait que Cougar Helicopters avait enseigné à ses pilotes une procédure normalisée de rétablissement à partir d’assiettes anormales. Cela va à l’encontre des conseils figurant dans le manuel du cours CHARM et contrevient à la règle de communication bilatérale publiée dans les SOP de Cougar Helicopters, qui demande d’assumer automatiquement les tâches de pilotage si des mesures appropriées n’ont pas été prises après la deuxième interrogation. Le premier officier n’a pas pris les commandes de l’hélicoptère, contrairement à ce que prévoit la règle de communication bilatérale des SOP de Cougar Helicopters, lorsque les mesures appropriées pour sortir de la descente inopinée n’ont pas été prises.

Pendant le départ d’une plateforme pétrolière en mer, la charge de travail est accrue en raison du nombre d’interventions requises avant que l’hélicoptère atteigne une altitude de 400 pieds au-dessus de l’eau. Notamment, plusieurs choses peuvent se produire au moment où l’hélicoptère passe la V2 en accélération, ou à peu près à ce moment. Lorsque toutes ces choses se passent au même moment, l’attention du pilote surveillant (PM) est détournée des instruments de vol pendant une brève période alors que le train d’atterrissage est rentré et que le système de flottaison est réglé à la position sûre. Dans le cas présent, le premier officier a baissé la tête momentanément lorsque le mode GA a été activé. En conséquence, il n’assurait pas une surveillance active des instruments de vol à ce moment. Ayant regardé les instruments de vol, le premier officier s’est rendu compte que l’hélicoptère descendait dans une assiette de cabré anormale et a commencé à en informer le commandant. Si les modes de pilote automatique sont activés pendant qu’un des pilotes est occupé à d’autres tâches, ce pilote n’est pas en mesure d’accomplir correctement les fonctions de PM. Cela accroît le risque que des écarts par rapport au profil type de vol passent inaperçus ou qu’ils ne soient pas détectés au moment opportun.

2.9 Système de gestion de la sécurité de Cougar Helicopters

2.9.1 Culture juste et signalement non punitif

Le manuel du système de gestion de la sécurité (SGS) de Cougar Helicopters et d’autres documents connexes de l’entreprise préconisent un système de signalement non punitif comme élément fondamental d’un SGS sain. Dans le cas présent, les 2 pilotes ont signalé l’événement et ont coopéré pleinement à l’enquête menée par l’entreprise dans le cadre du SGS.

La décision de mettre fin à l’emploi du commandant a été prise parce que l’entreprise le jugeait incapable de voler de façon sécuritaire dans un environnement IFR au large des côtes. Pour certains employés, cela semblait aller à l’encontre des principes et des processus décrits dans le système de signalement non punitif du SGS de Cougar Helicopters.

Le compte rendu des dangers est une pierre angulaire d’un SGS fiable. Une politique en matière de signalement non punitif encourage le signalement ouvert d’événements relatifs à la sécurité. En même temps, il incombe aux entreprises de s’assurer que leurs employés ont les compétences nécessaires pour s’acquitter de leurs tâches de façon sécuritaire. Cela signifie que les entreprises peuvent parfois prendre des mesures radicales, y compris le licenciement d’employés en cause dans des incidents liés à la sécurité. En conséquence, lorsqu’elles mettent en œuvre un système de signalement non punitif et un modèle d’arbre décisionnel d’une culture juste, les organisations doivent signifier à leurs employés les types de situations qui pourraient entraîner des mesures disciplinaires ou autres, y compris le licenciement. Autrement, les mesures subséquentes prises par la direction peuvent miner la confiance des employés envers de tels systèmes.

Lorsque des mesures prises par une entreprise sont perçues par les employés comme étant incompatibles avec sa politique et ses processus en matière de signalement non punitif et de culture juste, il y a un risque que les employés ne signalent pas les événements touchant la sécurité par peur de représailles.

2.9.2 Enquête menée dans le cadre du système de gestion de la sécurité de Cougar Helicopters

Cougar Helicopters utilise activement le suivi des données de vol des hélicoptères (HFDM) pour faciliter les enquêtes qu’elle mène dans le cadre du SGS. Ces renseignements peuvent fournir de précieux détails sur un événement qui pourraient être perdus autrement. De plus, les données de HFDM sont utilisées de façon proactive pour surveiller tous les vols en vue de reconnaître des tendances avant qu’un événement se produise. Dans le cas présent, le CVR avait été retiré de l’hélicoptère en vue de son utilisation dans le cadre de l’enquête du SGS. Personne, dans l’équipe de direction à Cougar Helicopters, ne savait que les données de CVR sont protégées aux termes de la Loi sur le Bureau canadien d’enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports (BCEATST) et que les exploitants ne devaient pas les utiliser. L’exploitant ne savait pas que le CVR est protégé aux termes de la Loi sur le BCEATST.

Avant de terminer l’enquête menée dans le cadre du SGS, Cougar Helicopters a exclu comme facteurs l’expérience de l’équipage, la formation de l’équipage et le système de pilote automatique du S-92A. Cependant, des évaluations de la formation de perfectionnement du premier officier ont révélé certains problèmes liés aux aptitudes au pilotage manuel qui pourraient avoir contribué à l’événement en cause. De manière plus particulière, le premier officier n’avait pas les compétences de vol manuel qui lui auraient donné davantage confiance en ses capacités pour prendre les commandes et sortir de l’assiette anormale dans laquelle l’hélicoptère était entré. De même, les membres de l’équipage de conduite ont été jumelés, malgré le fait qu’ils ne satisfaisaient pas aux restrictions mises en place par les exploitants extracôtiers. De plus, après l’événement, Cougar Helicopters a publié à l’intention des pilotes des notes de service traitant de l’embrayage du pilote automatique et de la procédure de rétablissement à partir d’assiettes anormales et elle a modifié les SOP de l’entreprise en ce qui concerne la procédure de départ.

2.10 Événements antérieurs

En août 2007 et en novembre 2008, Cougar Helicopters a mené 2 enquêtes internes dans le cadre du SGS en raison de descentes inopinées dans un milieu extracôtier. Dans un cas, l’hélicoptère est descendu à une altitude de 31 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl), et dans l’autre, il y a eu dépassement du couple de la boîte de transmission principale. Ni l’un ni l’autre de ces événements n’a été signalé au Bureau de la sécurité des transports (BST) à l’époque où il s’est produit, malgré le fait que ces événements satisfaisaient tous deux aux critères d’incident à signaler aux termes du Règlement sur le BST. Si les incidents à signaler ne sont pas signalés au BST, il y a une plus grande probabilité que des occasions d’améliorer la sécurité des transports au Canada ne se concrétisent pas.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Pendant la procédure de départ, le commandant a tiré fortement et rapidement le cyclique vers l’arrière juste avant de relâcher le bouton de compensateur de cyclique et d’activer le mode remise des gaz (GA), ce qui a entraîné l’hélicoptère dans un cabré avec décélération.
  2. Le mode remise des gaz (GA) du S-92A est conçu avec une maîtrise réduite des commandes. En raison de cette maîtrise réduite des commandes, l’hélicoptère a eu de la difficulté à sortir du cabré qui était survenu à la suite de l’activation du mode GA.
  3. Lorsque la vitesse anémométrique de l’hélicoptère a baissé jusqu’à moins de 5 nœuds de la vitesse minimale de contrôle des conditions météorologiques de vol aux instruments (Vmini), le commandant a appuyé momentanément sur le bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique et a tiré sur le cyclique vers l’arrière. Cela a fait chuter la vitesse anémométrique sous la Vmini, et a entraîné l’hélicoptère dans un cabré anormal de 23°.
  4. Le commandant, frappé d’incapacité subtile, possiblement due à la désorientation spatiale, n’a pas abaissé le nez de l’hélicoptère et appliqué le collectif pour sortir de l’assiette en cabré anormale. Cela a contribué à la perte excessive d’altitude durant la descente inopinée.
  5. Le premier officier n’a pas pris les commandes de l’hélicoptère, contrairement à ce que prévoit la règle de communication bilatérale des procédures d’utilisation normalisées pour hélicoptères SK-92 de Cougar Helicopters, lorsque les mesures appropriées pour sortir de la descente inopinée n’ont pas été prises.

3.2 Faits établis quant aux risques

  1. L’absence d’enregistrement de conversations dans le poste de pilotage et de données de vol peut empêcher de relever les lacunes de sécurité et d’en faire part afin d’améliorer la sécurité des transports.
  2. Le système d’avertissement de proximité du sol amélioré du S-92A ne donne aucun avertissement de descente inopinée à des vitesses anémométriques inférieures à 40 nœuds de vitesse anémométrique, le train d’atterrissage sorti. En conséquence, il y a un risque accru d’impact sans perte de contrôle dans ces phases de vol.
  3. S’il y a des délais dans la mise en œuvre de la procédure d’évitement d’un impact sans perte de contrôle (CFIT) en réponse à une alerte du système d’avertissement de proximité du sol amélioré, il existe un risque accru de CFIT.
  4. Si les pilotes d’aéronefs automatisés ne maintiennent pas leurs compétences de vol manuel à vue et aux instruments, il y a un risque accru qu’ils soient réticents à prendre les commandes et qu’ils éprouvent de la difficulté à sortir de profils de vol inattendus qui demandent une intervention du pilote.
  5. Si les pilotes de S-92A ne consultent pas la partie supérieure de l’écran principal de vol pour confirmer l’embrayage approprié du pilote automatique, ils peuvent être incapables de savoir si le système est dégradé ou s’il n’est pas embrayé.
  6. Le manuel de vol de giravion du S-92A peut induire en erreur parce qu’il affirme que le mode de remise des gaz (GA) peut être utilisé pour sortir d’une assiette anormale. Le mode GA ne fonctionnera pas à une vitesse anémométrique inférieure à 50 nœuds et la rapidité des changements d’assiette et de puissance est limitée. En conséquence, les pilotes et les passagers courent un risque accru de collision avec le relief si les pilotes essaient d’utiliser le mode GA pour sortir d’une assiette anormale à basse altitude.
  7. Si le mode remise des gaz (GA) est activé à une vitesse anémométrique de 55 nœuds conformément aux procédures d’utilisation normalisées pour hélicoptères SK-92 de Cougar Helicopters, il existe un risque accru que le mode GA se désactive en raison d’une baisse transitoire de la vitesse anémométrique en dessous de la vitesse minimale de contrôle des conditions météorologiques de vol aux instruments.
  8. Cougar Helicopters n’a pas de procédure normalisée liée à l’utilisation du bouton de débrayage du compensateur d’effort cyclique pendant le départ. Cela pourrait causer des difficultés s’il faut effectuer un transfert rapide des commandes pendant un départ.
  9. L’absence d’annonces normalisées pour les écarts de tangage accroît la probabilité de mauvaises communications pendant les sorties d’assiette anormale.
  10. Il n’y avait aucun processus formel en place à Cougar Helicopters pour garantir le respect des restrictions liées à l’appariement des membres d’équipage. Ainsi, le premier officier en cause était jumelé à des pilotes qui n’étaient pas qualifiés à titre d’instructeurs. En conséquence, cette mesure de contrôle des risques n’offrait aucune réduction des risques.
  11. Si les équipages de conduite ne reçoivent pas de formation périodique en rétablissement à partir d’assiettes anormales, ils sont plus susceptibles d’éprouver de la difficulté à sortir d’une assiette anormale.
  12. Si les membres d’équipages de conduite ne reçoivent pas de formation sur la façon de reconnaître l’incapacité subtile et d’intervenir dans une telle situation, ils peuvent ne pas avoir la confiance voulue pour prendre les commandes d’un pilote plus expérimenté.
  13. Si la formation sur simulateur et en vol ne comporte pas d’exercices liés aux stratégies de gestion des ressources en équipe (CRM), il existe un risque accru que les équipages de conduite subissent des défaillances de CRM qui pourraient diminuer les marges de sécurité.
  14. Si les modes de pilote automatique sont activés pendant qu’un des pilotes est préoccupé par d’autres tâches, ce pilote n’est pas en mesure d’accomplir correctement les fonctions de pilote surveillant. Cela accroît le risque que des écarts par rapport au profil type de vol passent inaperçus ou qu’ils ne soient pas détectés au moment opportun.
  15. Lorsque des mesures prises par une entreprise sont perçues par les employés comme étant incompatibles avec sa politique et ses processus en matière de signalement non punitif et de culture juste, il y a un risque que les employés ne signalent pas les événements touchant la sécurité, par peur de représailles.
  16. Si les incidents à signaler ne sont pas signalés au Bureau de la sécurité des transports (BST), il y a une probabilité accrue que des occasions d’améliorer la sécurité des transports au Canada ne se concrétisent pas.

3.3 Autres faits établis

  1. L’application rapide du collectif pour arrêter la descente inopinée a entraîné le dépassement des limites de couple de la transmission.
  2. Pendant l’application rapide du collectif, ni l’un ni l’autre des pilotes ne s’est rendu compte que les limites opérationnelles de la transmission avaient été dépassées pendant le rétablissement, et ces derniers ont poursuivi le vol de retour à CYYT.
  3. L’exploitant ignorait que les données de l’enregistreur de conversations de poste de pilotage sont protégées aux termes de la Loi sur le Bureau canadien d’enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures de sécurité prises

4.1.1 Cougar Helicopters Inc.

À la suite de cet événement, Cougar Helicopters a publié à l’intention des pilotes une note de service intitulée « S92 Engaging Autopilot Functions » [activation des fonctions de pilote automatique du S92] (annexe E). Les renseignements fournis dans cette note de service ont aussi été incorporés dans les procédures d’utilisation normalisées (SOP) pour hélicoptères SK-92 de Cougar Helicopters.

Cougar Helicopters a également publié une note de service à l’intention des pilotes intitulée « Unusual Attitude Recovery » [rétablissement à partir d’assiettes anormales]. La note de service précise qu’elle vise à [traduction] « clarifier et renforcer la politique de l’entreprise en matière d’incapacité du pilote et de rétablissement à partir d’assiettes anormales »Footnote 51. Elle décrit aussi la procédure de rétablissement recommandée :

  1. accepter que l’aéronef ne se comporte pas comme prévu, rechercher la cause ultérieurement;
  2. aligner le nez sur l’horizon;
  3. mettre les ailes à l’horizontale;
  4. utiliser au moins 80 % Q (pourcentage du couple);
  5. accélérer à la Vy au moins; et
  6. monter à 1000 pi ou à l’altitude minimale de franchissement d’obstacles (MOCA) avant d’essayer de stabiliser l’aéronef ou de rechercher la cause du problèmeFootnote 52.

La note de service mentionne aussi ce qui suit [traduction] .

S’il se produit un écart d’assiette, le PM doit l’annoncer en conformité avec les SOP. Si le PF accuse réception, mais ne prend pas de moyen physique pour corriger l’assiette, vous devez considérer qu’il est frappé d’incapacité. . . . Si un PM détermine qu’une correction appropriée n’est pas apportée après qu’elle ait été demandée et qu’on ait accusé réception, le PM doit prendre les commandes et apporter la correction appropriée.

Cougar Helicopters a apporté les modifications suivantes à son manuel d’exploitation de l’entreprise .

Cougar Helicopters a apporté les modifications suivantes à ses SOP du SK-92 :

Cougar Helicopters a amélioré sa formation sur simulateur en y incluant plus d’exercices particuliers axés sur la technique de rétablissement à partir d’assiettes anormales de base. De plus, la formation comprend des situations où le pilote aux commandes répond aux annonces du pilote surveillant, mais ne prend pas les mesures physiques appropriées pour rectifier la situation.

Cougar Helicopters a élaboré un processus visant à garantir le respect des restrictions de jumelage. Toutes les restrictions sont entrées dans un système de gestion de l’information d’exploitation aérienne (FOIMS). Les restrictions sont passées en revue chaque semaine par les préposés à l’affectation des équipages, lorsque les horaires des équipages sont préparés. De plus, le jour d’un vol, le répartiteur et l’équipage de conduite passent en revue le FOIMS afin de s’assurer qu’aucune restriction n’a été oubliée avant le vol.

Cougar Helicopters a donné à tous les premiers officiers une séance de formation CHARM spécialisée qui traitait de stratégies de recours à la hiérarchie pour faire part de préoccupations aux commandants.

Cougar Helicopters a établi un poste de pilote instructeur en chef au sein de l’entreprise. Le pilote instructeur en chef est chargé de fournir de la formation et des directives aux instructeurs afin de maintenir des normes d’évaluation uniformes.

En 2012, Cougar Helicopters a commencé un programme de formation à la culture juste. De nombreuses séances ont été menées avec de petits groupes d’employés tout au long de l’année et tous les employés ont terminé les séances de formation en 2012.

4.1.2 Sikorsky Aircraft Corporation

En 2013, Sikorsky a émis la révision temporaire 11 visant le Manuel de vol de giravion (RFM) du S-92A. La révision exige des exploitants de S-92A qu’ils incorporent dans le RFM les renseignements suivants à l’égard de l’utilisation du directeur de vol couplé :

Lorsqu’un pilote en vol stationnaire accélère à une vitesse de montée ou de croisière sans relâcher le bouton de débrayage du compensateur cyclique (c.-à-d. contre la compensation) et tente ensuite de coupler à la vitesse verticale, le directeur de vol couplé pourrait ne pas maintenir le taux de montée voulu et ne pas procéder automatiquement à la mise en pallier à l’altitude voulue. Lorsque c’est possible, les changements de vitesse anémométrique devraient être effectués quand le bouton de débrayage du compensateur cyclique est relâché, ou avec le compensateur pas-à-pas. De plus, il est recommandé d’utiliser le couplage à 3 paramètres (le collectif contrôle le taux de montée ou l’altitude) durant la montée et la descente.Footnote 53

Elle exige en outre que soient incorporés dans le RFM de S-92A les renseignements suivants relatifs au mode de remise des gaz (GA) :

Avant d’activer le mode GA, s’assurer que l’aéronef est dans une montée stable et que l’effort du cyclique est annulé. Lorsque c’est possible, les changements de vitesse anémométrique devraient être effectués quand le bouton de débrayage du compensateur cyclique est relâché, ou avec le compensateur pas-à-pas.Footnote 54

4.1.3 Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers

Des discussions entre l’Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers et des exploitants extracôtiers sont en cours en vue de mettre au point des façons d’améliorer la surveillance de la sécurité de l’exploitation d’hélicoptères dans la zone extracôtière de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le présent rapport met un terme à l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le . Il est paru officiellement le .

5.0 Annexes

Annexe A – Liste des rapports de laboratoire du BST

Les rapports du Laboratoire de la Direction générale de l’ingénierie du BST suivants ont été finalisés :

Ces rapports peuvent être fournis sur demande par le Bureau de la sécurité des transports du Canada.

Annexe B – Profil de départ (fondé sur les données du FDR)

Annexe B – Profil de départ (fondé sur les données du FDR)
Annexe B – Profil de départ (fondé sur les données du FDR)

Annexe C – Modèle d’arbre décisionnel d’une culture juste

Annexe C – Modèle d'arbre décisionnel d'une culture juste
Annexe C – Modèle d'arbre décisionnel d'une culture juste

[traduction]

"Just Culture" Decision Tree Arbre décisionnel d'une « culture juste »
Rules of Fair Play for Managers Code de pratiques loyales des gestionnaires
START HERE POINT DE DÉPART
Was the Job understood? La tâche a-t-elle été comprise?
Were the actions as intended? Les actions étaient-elles intentionnelles?
Were the results as intended? Les résultats étaient-ils intentionnels?
Sabotage or Malevolent Act Sabotage ou acte malveillant
Knowingly violating procedures? A-t-on transgressé les procédures sciemment?
Are procedures clear and workable? Les procédures sont-elles claires et raisonnables?
Reckless Violation? Infraction d'insouciance?
Pass Substitution Test? Essai de substitution réussi?
Defective Training or Selection Experience? Formation ou expérience de sélection défectueuse?
Negligent Error? Erreur de négligence?
History of Violating Procedures? Antécédents de violation de procédures?
No Blame Error Erreur honnête
Repeated Incidents with Similar Root Causes Incidents répétés avec causes profondes semblables
QA CHECK VÉRIFICATION AQ
Yes Oui
No Non
Increasing Individual Culpability / Diminishing Individual Culpability Culpabilité individuelle grandissante / Culpabilité individuelle décroissante
Severe Sanctions Sanctions sévères
Final Warning and Negative Performance Appraisal Dernier avertissement et mauvaise évaluation de rendement
First Written Warning Coaching / Greater Supervision Until Behaviour is Corrected Dernier avertissement écrit Encadrement / plus grande surveillance jusqu'à ce que le comportement soit corrigé
Documented for the Purpose of Prevention Awareness and Training will Suffice Documenté aux fins de sensibilisation à la prévention et la formation suffira
*Indicates a "System" induced error. Manager/Supervisor must evaluate what part of the system failed, and what Corrective and Preventive Action is required. *Indique une erreur induite par le « système ». Le gestionnaire ou le surveillant doit déterminer quelle partie du système a échoué et quelles sont les mesures correctives et préventives requises.

Le manuel du système de gestion de la sécurité (SGS) décrit les paramètres d’utilisation du modèle, et précise que celui-ci est utilisé uniquement « lorsqu’un événement a fait l’objet d’un examen approfondi et que la haute direction croit qu’elle possède toute l’information pertinente »Footnote 55. À ce stade, le processus est amorcé en entrant le diagramme. L’arbre décisionnel d’une culture juste est constitué d’une série de questions fermées. La réponse oui ou non à chaque question détermine l’étape suivante du processus. Au bout du processus, le décideur arrive à un point final dans l’arbre qui permet de déterminer le type de mesure, le cas échéant, le plus approprié pour une situation donnée.

Annexe D – Indications de remise des gaz sur l’écran principal de vol Footnote 56

Annexe D – Indications de remise des gaz sur l'écran principal de vol
Annexe D – Indications de remise des gaz sur l'écran principal de vol

Annexe E – Note de service aux pilotes : Fonctions d'embrayage du pilote automatique du S-92A

Annexe E (1ère partie) – Note de service aux pilotes : Fonctions d'embrayage du pilote automatique du S-92A
Annexe E (1ère partie) – Note de service aux pilotes : Fonctions d'embrayage du pilote automatique du S-92A
Annexe E (2ième partie) – Note de service aux pilotes : Fonctions d'embrayage du pilote automatique du S-92A
Annexe E (2ième partie) – Note de service aux pilotes : Fonctions d'embrayage du pilote automatique du S-92A

[traduction]

Note de service aux pilotes

Date : le 26 juillet 2011
Destinataires : Pilotes de Cougar
Expéditeur : Pilote en chef
Objet : Activation des fonctions de pilote automatique du S92

La présente note de service vise à clarifier et à renforcer l'activation et l'utilisation des fonctions de pilote automatique du S92. L'accent est sur l'activation initiale des modes, p. ex., GA (remise des gaz).

  1. Avant d'activer une fonction de pilote automatique, QUELLE QU'ELLE SOIT – GA, IAS, ALT, VS, etc. – le pilote ne doit PAS exercer de pression sur la commande de collectif ou le cyclique. La moindre pression va causer une erreur dans le système et faire entrer l'aéronef dans une assiette imprévue.
  2. L'assiette de l'aéronef devrait être stable avant l'activation initiale des fonctions de pilote automatique. On rappelle aux équipages que pour coupler dans quelque mode que ce soit, la vitesse anémométrique en nœuds doit être supérieure à 50 KIAS, et l'altitude radar, supérieure à 50 pi. Si la sélection est effectuée en deçà de ces paramètres, les barres du FD seront affichées, mais le pilote automatique ne sera pas couplé.
  3. Avant de sélectionner une des fonctions de pilote automatique de vitesse anémométrique, d'altitude ou de VS (notamment les modes GA et ALTP), il faut appuyer momentanément sur le bouton de débrayage du compensateur du cyclique et le relâcher pour enlever toutes les pressions des commandes. Si on désire un couplage à 3 paramètres, le collectif doit être réglé, et la gâchette de débrayage, relâchée. La fonction voulue peut alors être sélectionnée.
  4. La terminologie verbale pour décrire les fonctions de pilote automatique est la suivante :
    1. Sélectionné – indique qu'un mode voulu a été physiquement sélectionné.
    2. Activé – le PF a confirmé, en vérifiant la partie supérieure du PFD, que le mode sélectionné a effectivement été activé et que le pilote automatique fonctionne. Le mode sera affiché en vert.
    3. Armé – le PF a confirmé, en vérifiant la partie supérieure du PFD, que le mode voulu est armé. Ce sera affiché en blanc.
    4. Capturé – lorsqu'un mode a « capturé » la référence voulue. Par exemple, l'aéronef monte en mode VS avec l'ALTP armé, lorsque le mode change pour maintien d'altitude et l'aéronef arrive en palier. Le PF confirme, en vérifiant la partie supérieure du PFD, pour s'assurer que le mode voulu est affiché en vert et qu'il est indiqué « altitude capturée ».

  5. Le pilote qui sélectionne une fonction de pilote automatique DOIT annoncer « __________ sélectionné », le PF doit contre-vérifier la partie supérieure du PFD et confirmer que le mode approprié est affiché en vert et il DOIT annoncer soit « __________ activé » ou « __________ armé » ou « __________ capturé » ou « __________ n'est pas activé ». Cela indique que le mode approprié fonctionne comme prévu.
  6. Chaque fois qu'un mode change, p. ex. d'armé à capturé, le PF doit verbaliser le changement.
  7. Si la mention dans la partie supérieure du PFD est affichée en jaune, le pilote automatique ne s'est pas couplé au mode sélectionné même si les barres du FD sont affichées, et le pilote doit toujours piloter de mode manuellement.
  8. Les équipages NE DOIVENT PAS se fier aux barres du FD comme indication que le pilote automatique est activé.
  9. Il faut prendre soin de ne pas induire d'erreurs en exerçant de la pression sur les commandes en vol couplé puisque cela peut diminuer les capacités du FD et entraîner des changements d'assiette inopinés. Cela n'empêche pas les pilotes d'effectuer manuellement un changement dans un axe lorsqu'il est couplé à un autre paramètre, p. ex. couplé à la vitesse anémométrique et le pilote change de cap manuellement en effectuant un mouvement de roulis, mais il faut prendre soin de permettre le déplacement du cyclique vers l'avant et vers l'arrière, tout en maintenant un angle d'inclinaison. Un autre exemple serait d'utiliser le bouton de compensateur pour changer le réglage de vitesse anémométrique de référence voulu (curseur) en vol couplé. Le pilote doit laisser le cyclique se déplacer pendant qu'il appuie sur le bouton de compensateur.

Lorsqu'ils sélectionnent des modes, les pilotes doivent faire preuve de vigilance et s'assurer que les modes sont activés comme prévu. Si l'aéronef ne répond pas comme prévu, le PF doit être prêt à piloter l'aéronef manuellement et à établir une attitude sécuritaire pour la condition de vol.

Il incombe aux CdB d'assurer la sécurité de l'aéronef en empêchant que des excursions inopinées deviennent des écarts importants par rapport au domaine de vol sécuritaire voulu.