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Rapport d'enquête aéronautique A00W0072

Perte de maîtrise
Rotorway Exec 90 (hélicoptère) C-GZXE
Aéroport d'Innisfail (Alberta)
Le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 23 mars 2000, le propriétaire de l'hélicoptère Rotorway Exec 90 de construction amateur portant le numéro de série 19638 est parti de l'aéroport d'Innisfail (Alberta) pour effectuer un vol d'entraînement à la navigation en solo. Vers 12 h 30, heure normale des Rocheuses, ce jour-là le pilote avait mentionné à quelqu'un qu'il n'avait pas l'intention de voler. On ne sait pas à quel moment le pilote a décidé de faire un vol ni à quelle heure il a décollé. Vers 18 h, on a décidé de vérifier les alentours de l'aéroport parce qu'on était sans nouvelles du pilote. Le camion du pilote était stationné près du hangar, et les roues de servitude de l'hélicoptère se trouvaient à l'extérieur du hangar. Des recherches sur l'aéroport et dans les environs ont été faites par la Gendarmerie royale du Canada et une opération de repérage à l'infrarouge a été effectuée après la tombée de la nuit par un Hercules C-130 des Forces canadiennes, mais sans succès. La radiobalise de repérage d'urgence (ELT) avait été enlevée de l'hélicoptère pour de l'entretien courant. Le téléphone cellulaire du pilote a été retrouvé sur le siège de son camion. Le 25 mars 2000, une équipe de recherche a trouvé l'épave grâce à un fermier de la région qui avait signalé avoir vu de la fumée et des flammes à cet endroit l'après-midi de l'accident. L'épave se trouvait juste à l'extérieur des limites de l'aéroport d'Innisfail. L'hélicoptère s'était écrasé et avait pris feu, tuant le pilote.

Renseignements de base

L'aéroport d'Innisfail est exploité par la municipalité et possède trois pistes en dur qui forment un triangle. Chaque piste mesure 3 025 pieds de long sur 100 pieds de large. Il n'y a aucun service de circulation aérienne à cet aéroport. Cependant, l'aéroport de Red Deer, situé à sept milles marins au nord-est de l'aéroport d'Innisfail, fournit des services météorologiques et de planification de vol. Le pilote n'avait pas déposé de plan de vol ni laissé à personne son itinéraire de vol. Rien n'indique que le pilote ait reçu un exposé sur les conditions météorologiques. Personne n'a vu le pilote décoller de l'aéroport.

À peu près au moment de l'accident, la station d'information de vol (FSS) de Red Deer faisait état des conditions météorologiques suivantes : nuages épars à 2 000 pieds au-dessus du sol (agl); nuages fragmentés à 8 000 pieds agl; ciel couvert à 25 000 pieds agl; vents du nord à 7 noeuds et visibilité de 15 milles. On a jugé que la météo n'avait joué aucun rôle dans l'accident.

L'hélicoptère a percuté le sol à l'intersection de deux rangées d'arbres dans le coin d'un champ d'une ferme. À partir de l'angle avec lequel une des pales a coupé les arbres (la pale s'est enfoncée de six pouces dans le sol gelé), on a pu déterminer que l'hélicoptère avait une assiette en roulis d'environ 135 degrés vers la droite. L'angle de tangage n'a pas été déterminé. L'appareil n'a ni rebondi, ni glissé après l'impact initial. Rien n'indique qu'il y ait eu une défaillance de la cellule ou un mauvais fonctionnement d'un système, que ce soit avant ou pendant le vol. Toutes les pièces de l'hélicoptère ont été retrouvées sur les lieux de l'accident, sauf une des pales du rotor de queue qui reposait à environ 60 pieds derrière l'épave.

Un certificat spécial de navigabilité avait été délivré en mars 1997 pour l'hélicoptère de construction amateur après son assemblage. Depuis, l'appareil avait effectué près de 105 heures de vol. Selon l'information recueillie, les livrets de l'appareil, les dossiers d'assemblage et tous les autres documents concernant l'appareil se trouvaient à bord dans une chemise. On suppose donc que tous ces documents ont été détruits par le feu.

Le pilote avait obtenu sa licence de pilote privé - avion en 1975. Il possédait alors un Cessna 150 qu'il avait ensuite vendu en octobre 1983. Il avait effectué quelque 210 heures de vol durant cette période. Il n'avait pas volé depuis. Le pilote avait acheté l'hélicoptère en octobre 1999 et avait débuté sa formation au sol et son entraînement en double commande au début de novembre 1999 à l'usine de Rotorway en Arizona. La formation comportait trois étapes. À la fin de chaque étape, le pilote devait utiliser son propre hélicoptère pour effectuer des vols d'entraînement à la navigation en solo dans la région de Red Deer. Peu de temps avant l'accident, le pilote avait fait transporter son hélicoptère à l'aéroport d'Innisfail, d'où tous les vols suivants devaient être effectués. Au total, le pilote a effectué 23 heures de vol en double commande et 12 heures de vol en solo après avoir acheté l'hélicoptère.

Le pilote possédait un certificat d'élève-pilote de la Federal Aviation Authority (FAA) des États-Unis qui l'autorisait à effectuer des vols d'entraînement à la navigation en solo aux commandes de son hélicoptère Rotorway Exec 90. Cependant, d'après l'article 61.89 des Federal Aviation Regulations (FAR), un élève-pilote ne peut agir à titre de pilote commandant de bord d'un appareil qui effectue un vol à l'étranger. Par conséquent, pour effectuer un vol d'entraînement à la navigation en solo au Canada, le pilote en question aurait dû être titulaire d'un permis canadien d'élève-pilote ou d'une licence canadienne de pilote, ce qui n'était pas le cas. Sa licence de pilote privé - avion n'était plus valide parce qu'elle ne respectait pas les exigences de mise à jour des connaissances énoncées dans le Règlement de l'aviation canadien (RAC).

En vertu du RAC, un instructeur de vol qualifié aurait dû superviser les vols d'entraînement en solo du pilote. L'article 405.31 énonce les exigences relatives aux exposés et aux instructions avant vol. L'article 405.32 stipule les exigences relatives à l'autorisation d'un vol d'entraînement solo par un instructeur de vol.

Le pilote possédait un certificat médical de classe III de la FAA ayant été délivré le 17 novembre 1999. Son certificat médical de classe III de Transports Canada avait été renouvelé le 27 septembre 1999. Son dernier électrocardiogramme remontait au 1er octobre 1997.

L'autopsie qui a été pratiquée sur le corps du pilote a révélé de nombreuses blessures et brûlures ainsi qu'un important blocage des artères coronaires. Trois de ses cinq artères principales étaient bloquées à 90 %, la quatrième était bloquée à 75 % et la cinquième à 50 %. Il s'agit d'un blocage important malgré le blocage naturel dû à l'exposition des tissus à de la chaleur élevée. La coronaropathie était tellement grave qu'elle aurait pu provoquer à tout instant une perte de conscience partielle et même la mort à cause d'une ischémie myocardique (diminution de l'apport en oxygène au coeur). L'enquête n'a pas permis d'établir si le pilote était conscient ou même vivant immédiatement avant l'impact.

Analyse

L'hélicoptère a percuté le sol en piqué prononcé (presque sur le dos) avec une puissance moteur très élevée. Rien n'indique qu'il y ait eu une défaillance de la cellule ou un mauvais fonctionnement d'un système qui aurait provoqué la perte de maîtrise. Les circonstances de l'accident sont typiques d'une perte de maîtrise qui survient à la suite d'une incapacité du pilote. L'autopsie a révélé un blocage important des artères coronaires ainsi que la possibilité d'une ischémie myocardique. Il n'est toutefois pas possible d'affirmer avec certitude que l'incapacité du pilote a joué un rôle dans l'accident.

Bien que le programme de formation du pilote ait été sanctionné par la compagnie Rotorway, il n'était pas totalement conforme au RAC. En raison des exigences de mise à jour des connaissances, la licence du pilote n'était plus valide. De plus, les vols solo du pilote ne faisaient pas l'objet d'une supervision adéquate. La réglementation exige que ces vols soient supervisés pour des raisons de sécurité. Toutefois, le respect des exigences relatives à la mise à jour des connaissances et à la supervision par un instructeur n'aurait probablement rien changé au dénouement de l'accident.

L'épave est restée introuvable durant deux jours malgré des recherches intensives. On peut notamment expliquer cette situation par le fait que le pilote n'avait pas déposé de plan de vol et n'avait pas laissé d'itinéraire de vol, qu'il n'était pas supervisé par un instructeur de vol, que personne ne l'avait vu décoller et que l'appareil n'était pas équipé d'une radiobalise de repérage d'urgence (ELT).

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Le pilote a perdu la maîtrise de l'hélicoptère pour des raisons indéterminées, et l'appareil s'est écrasé.

Autres faits établis

  1. Le pilote effectuait ses vols d'entraînement solo sans la supervision d'un instructeur.
  2. Le pilote souffrait d'une grave coronaropathie qui peut avoir donné lieu à une ischémie myocardique avant la perte de maîtrise.
  3. Il n'y avait pas d'ELT à bord de l'appareil, ce qui a probablement ralenti les recherches qui ont mené à la découverte de l'épave.

Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .